Le Québec a eu un champion du monde de boxe de manière ininterrompue de 2007 à 2012. De ce jour de juillet, il y a cinq ans, où Joachim Alcine a remporté un titre jusqu'à la défaite crève-coeur de Lucian Bute il y a un an en Angleterre, un Québécois avait toujours une ceinture à se mettre à la taille.

Mais depuis maintenant 13 mois, la province - et le pays entier - n'a plus de champion du monde, une situation qui changera samedi soir si Adonis Stevenson l'emporte contre le champion WBC des mi-lourds (175 lb), Chad Dawson. En récupérant l'ancien titre de Jean Pascal, Stevenson ne ferait pas que mettre fin à la disette: il viendrait donner une bouffée d'air frais à toute l'industrie de la boxe québécoise.

«Si Adonis ne gagne pas samedi, quand aura-t-on la chance d'avoir un autre champion du monde? Ça pourrait prendre du temps, estime le promoteur Yvon Michel. Bute et Pascal vont se battre sans titre. Les autres qui suivent sont encore à quelques combats d'un combat de championnat. Si on ne réussit pas là, ça pourrait être long.»

«Le combat Pascal-Bute est exceptionnel, c'est sûr. Mais c'est le genre de combat qui arrive une fois par 10 ans, ajoute le promoteur. Pour la survie de l'industrie, on ne peut pas compter là-dessus. Il faut des champions du monde.»

Michel espère une victoire de Stevenson, non seulement pour aller chercher une ceinture, mais également pour donner de la stature à son boxeur. Car Stevenson n'est pas encore une grande vedette au Québec, comme l'attestent les 4500 billets vendus jusqu'à maintenant pour le combat de samedi. Il devrait y avoir de 6000 à 8000 spectateurs au Centre Bell. Ce n'est pas le Pérou.

«Il y a juste deux boxeurs connus au Québec du public général: Lucian Bute et Jean Pascal. Même avec eux, c'est difficile de vendre des billets s'il ne s'agit pas d'un combat de championnat du monde, explique Yvon Michel. Au niveau popularité, on peut placer Adonis au troisième rang au Québec. Mais il y a un grand écart entre les deuxième et troisième rangs.»

En attendant Pascal-Bute

Le promoteur américain Gary Shaw a vanté les mérites du Québec, hier, en conférence de presse. «Un endroit où la boxe est respectée et un vrai marché avec de vrais partisans», a lancé celui qui s'occupe de la carrière de Dawson.

Mais force est de constater que la boxe au Québec est fragile. Le Groupe Yvon Michel (GYM) ne sait même pas si le combat de samedi sera lucratif. Tous les revenus de la télé américaine (HBO) vont à Gary Shaw pour ce combat. «C'est un investissement que l'on fait pour l'avenir, note Yvon Michel. On joue le tout pour le tout.»

L'autre grand groupe de promotion d'ici, InterBox, ne semble plus désireux de développer la relève. «Après Bute, point de salut», pourrait être le slogan de la maison.

Dans ces circonstances, Bute-Pascal revêt une importance primordiale. Plus de 20 000 billets avaient été vendus. Le combat, qui aura finalement lieu en décembre ou en janvier, pourra renflouer les coffres de GYM. En attendant, un champion du monde ne ferait pas de tort.

«C'est très, très difficile à rentabiliser. On réussit à le faire parce qu'on fonctionne à très peu de coûts, avec une petite équipe, note Yvon Michel. On veut faire tourner la roue pour s'assurer qu'il y ait une relève. David Lemieux arrive proche. Eleider Alvarez arrive proche. Kevin Bizier arrive proche. Mais ils ne sont pas encore là.»

Adonis Stevenson, à 35 ans, est pour sa part rendu là. Il pourrait, samedi soir, redonner un champion au Québec. Et aider une industrie qui en a bien besoin.