À l'aube de ses 30 ans et à quelques semaines de son combat de championnat du monde contre Tavoris Cloud, Jean Pascal en vient à une conclusion simple: il n'a plus 20 ans. Il devient tranquillement un vétéran, pour le meilleur et pour le pire.

«Je suis encore jeune, mais je vieillis. Ça fait 17 ans que je boxe, que je fais du sport de haut niveau, et mon corps commence à s'user peu à peu, explique le boxeur, qui a repris l'entraînement après plus d'un an d'inactivité. Maintenant, je vois l'importance de prendre soin de mon corps. J'apprends à vieillir.»

Pascal prend part depuis des semaines à un camp d'entraînement éprouvant en vue du combat du 11 août, au Centre Bell. L'exercice a été émaillé de petites blessures. «Des bobos que je n'aurais pas eus à 20 ans!» lance le Lavallois.

Un matin, il y a 10 jours, Pascal courait dans un parc du quartier Saint-Michel. Il complétait des sprints de 100 mètres quand il a soudainement senti une brûlure dans la jambe droite. Un claquage. Une blessure toute bête, qui l'a fait boiter pendant quelques jours. «Mais ça va mieux, j'ai recommencé à jogger», assure l'ancien champion du monde WBC.

Puis il y a eu une petite blessure à la main droite. Rien de grave, selon son entraîneur. «On ne remarque rien de différent au gymnase, dit Marc Ramsay. C'est rare qu'un boxeur s'en tire sans aucun bobo dans un camp de huit semaines.»

Même s'il ne s'alarme pas des blessures subies par le plus célèbre de ses boxeurs, Ramsay remarque qu'il prend de l'âge. «À l'approche de la trentaine, il faut un peu modifier le genre d'entraînement. On ne peut pas entraîner un gars de 25 ans et un gars de 32 ans de la même manière», explique Marc Ramsay, qui travaille avec Jean Pascal depuis ses débuts chez les amateurs.

«Jean tombe dans cette zone-là, mais il n'est pas encore dans une pente descendante où on remarque beaucoup de différences, précise-t-il. D'ici deux ou trois ans, par contre, il faudra modifier un peu les choses.»

La solution pour l'instant consiste à limiter les excès. «Je comprends maintenant qu'il faut prendre soin de son corps même quand on ne s'entraîne pas, même quand on est en vacances, rappelle le boxeur. Bien manger et se coucher tôt. Désormais, c'est rendu obligatoire pour moi.»

Un camp à Montréal

Jean Pascal (26-2-1, 16 K.-O.) fêtera son 30e anniversaire en octobre. «Et je ne suis pas pressé de les avoir, mes 30 ans!» dit-il en rigolant. Mais n'empêche, vieillir a aussi du bon pour un athlète. Il se dit maintenant plus expérimenté, plus sage. Et le fait de gagner en âge lui a permis de tenir son camp d'entraînement à Montréal pour la première fois en cinq ans.

Par le passé, il préférait s'exiler avant ses combats pour s'éloigner des distractions. «C'est la première fois que je m'entraîne à Montréal depuis 2007. Je me suis entraîné en Arizona, en République dominicaine, en Colombie, à Miami», énumère-t-il.

«Avec l'âge, je n'ai plus besoin de faire ça», dit-il, en assurant qu'il ne craint plus les distractions offertes par Montréal. Il se rend donc chaque jour dans son gymnase habituel rejoindre Marc Ramsay, dans un local de la rue Saint-Urbain, près du quartier Ahuntsic.

Il a mis les gants avec son frère, Nicholson Poulard, David Lemieux, Eleider Alvarez... Mais aussi avec des lourds comme Didier Bence et Oscar Rivas, qui pourront le préparer au style costaud du champion du monde IBF, Tavoris Cloud (24-0, 19 K.-O.).

«J'ai hâte. Je sens que ça va être le fun. Je veux que les gens du Québec vivent une soirée avec beaucoup d'adrénaline, beaucoup de passion. Mais je sais que ça va être difficile. Je sens que ça va être dangereux, ce combat-là, affirme Pascal. C'est pour ça que je me prépare avec finesse. Je veux être à mon sommet aussi.»

Et pour être à son sommet, pour devenir le deuxième Québécois après Arturo Gatti à être couronné deux fois champion du monde, Jean Pascal devra se tenir éloigné des blessures du trentenaire. Il le sait.

«Que peut-on vous souhaiter dans ces dernières semaines de préparation?», lui demande-t-on pour clore l'entrevue.

Pascal n'attend pas une seconde et répond d'un trait. «De la santé, beaucoup de santé!», lâche-t-il en éclatant de rire.