Ses cheveux gris pointés vers le ciel, un cigare à la main et muni de son éloquence légendaire, Don King était de passage à Montréal mercredi pour mousser le combat du 11 août entre son boxeur Tavoris Cloud et le Montréalais Jean Pascal. Les fondations du Centre Bell en ont presque tremblé.

L'homme vendrait un frigo à un Inuit! Mercredi, il s'est acharné à vendre un combat qui a, sur papier, toutes les caractéristiques d'une guerre mémorable. Une tâche plutôt facile pour ce promoteur légendaire.

«Ça va être un combat difficile. Les deux sont durs. Une brute contre une brute; ce ne sera pas un petit vent d'été. Ça va être la tempête! s'est exclamé l'Américain qui a organisé parmi les plus grands combats, d'Ali à Tyson. Ça va être une soirée enlevante, avec des mains droites, des mains gauches, des crochets et des jabs.»



Puis gesticulant avec de grands gestes, de petits drapeaux canadiens dans les mains, Don King a fait son numéro. Car il s'agit bel et bien d'un numéro. L'homme de 80 ans a même ses accessoires: un blouson usé qu'il trimballe de combat en combat, des cheveux qui semblent être la conséquence d'une électrocution et ce cigare qu'il porte à la bouche continuellement. Mais le cigare est intact et éteint...



«La foudre est dans l'air. Des éclairs éclatent. Ce sera toute une tempête, s'est exclamé King devant un auditoire médusé au Centre Bell, où aura lieu l'affrontement. On va avoir une guerre et ça ne se rendra pas à la distance. Les juges n'auront pas leur mot à dire.»

L'attente en aura donc valu la chandelle. Car ce combat entre Jean Pascal (26-2-1, 16 K.-O.) et le champion IBF des mi-lourds, Tavoris Cloud (24-0, 19 K.-O.), a bien failli ne jamais voir le jour. Les négociations qui ont duré six mois ont testé les nerfs de Jean Pascal et de son promoteur, Yvon Michel.

«J'appelais Yvon même dimanche matin pour lui parler de mon prochain combat, pour lui demander si les choses avançaient», a raconté mercredi Pascal.

L'ancien champion WBC ne s'est pas battu depuis sa défaite contre Bernard Hopkins en mai 2011. Il a maintenant l'occasion de regagner une ceinture et de remonter au sommet de son sport.

«On aurait pu se diriger vers un combat plus facile à négocier contre un adversaire plus facile à battre, a expliqué Marc Ramsay, qui entraîne Pascal depuis les rangs amateurs. Mais ça fait longtemps que Jean nous a fait comprendre que ce n'était pas son but en boxe professionnelle. Il a toujours voulu affronter les meilleurs.»

L'occasion est aussi belle de s'inscrire dans l'histoire. Car comme l'a souligné Yvon Michel, un seul Québécois a réussi à gagner deux titres mondiaux différents dans sa carrière, un certain Arturo Gatti.



«On est deux pitbulls»


Tavoris Cloud s'était aussi déplacé pour la conférence de presse. Le boxeur invaincu a accepté de quitter la Floride pour venir mettre sa ceinture en jeu à Montréal car «c'est ce que font les vrais champions».

Mais c'est aussi parce que ce combat sera le plus lucratif de sa carrière. Cloud touchera une bourse de moins de 500 000 $, qui reste tout de même inférieure à celle qu'empochera Jean Pascal, autour de 1,2 million $ selon nos informations.

«Oui, ça va être ma plus grosse paye. C'est excitant, a admis Tavoris Cloud. L'argent est excitant. Je ne vendrais pas mon âme pour lui, mais c'est excitant... »

Cloud est reconnu comme un boxeur offensif qui traque son adversaire dans l'attente du coup mortel. Jean Pascal est aussi enclin à se battre à l'intérieur. Les recettes ne sont pas infaillibles en boxe, mais tout porte à croire que celle-ci produira des étincelles.

«Le combat ne va pas se rendre à la limite, mais je ne dis pas que c'est assurément moi qui va knocker Cloud. C'est soit moi, soit lui, a lancé Jean Pascal. Mais il y en a un de nous deux qui va se retrouver les bottines en l'air. On est deux pitbulls, et quand deux pitbulls se battent, il y en a toujours un qui meurt à la fin. Bon, personne ne va mourir le 11 août, mais il va y en a un qui va finir sur les fesses.»



On a par ailleurs appris qu'une clause revanche serait en vigueur dans le cas où Pascal battait le champion. La revanche ne serait pas immédiate: l'IBF exige que le vainqueur affronte l'aspirant obligatoire, Karo Murat. Si Pascal l'emportait, il devrait donc se mesurer à Murat puis ensuite offrir une revanche à Cloud.