Quoi de mieux pour l'Halloween qu'une conférence de presse avec un revenant ? Pas grand-chose. Les journalistes sont arrivés à l'heure. Ils balayaient la salle du regard, à la recherche de l'ancien champion du monde disparu dans la brume.

Mais Joachim Alcine n'était pas là. Il a répondu aux questions grâce à Skype, à partir de la Floride où il vit et s'entraîne en vue de son prochain combat contre David Lemieux.

Alcine doit faire son retour au Centre Bell le 10 décembre, près de deux ans jour pour jour après son dernier combat à Montréal. Depuis ce jour et depuis son exil américain, Alcine se cherche. En Californie, il a perdu un combat par arrêt de l'arbitre au premier round contre le cogneur Alfredo Angulo. Il a ensuite fait match nul contre Jose Medina au Massachusetts.

L'ancien champion du monde WBA des super mi-moyens a déjà connu des heures plus joyeuses. Mais le boxeur et chrétien dévot a gardé la même philosophie: si Dieu voulait qu'il tombe si bas, c'est sûrement pour une raison.

«Pour arriver jusqu'au sommet d'une montagne, il faut passer dans une vallée, a illustré Alcine, lundi. Je suis passé dans une vallée et je suis convaincu que j'avais besoin de ça pour remonter au sommet. C'était une bénédiction que ces choses se soient produites.»

Celui qui, il y a quelques années encore, faisait la pluie le beau temps sur les rings de Montréal a donc déménagé en Floride. Il a un nouveau promoteur, le bouillant Lou DiBella, et un nouvel entraîneur, Anthony «Chill» Wilson. Selon lui, tous les ingrédients sont réunis pour qu'il l'emporte le 10 décembre et rebondisse enfin de ses défaites. Si Dieu le veut, bien sûr.

«Je sais que j'ai encore beaucoup à accomplir. Je ne suis pas un boxeur qui plafonne, j'ai encore beaucoup à apprendre. Vous ne verrez pas le même boxeur que vous avez vu avant, mais un boxeur plus complet», explique Alcine, 35 ans.

«Je m'entraîne très bien. Je ne sous-estime pas David Lemieux, c'est un très bon boxeur et je pense qu'il a le nécessaire pour devenir champion du monde, reconnaît-il. C'est dommage, parce que moi aussi, je veux redevenir champion du monde et je vais tout faire pour y arriver.»

Son épouse et ses enfants sont aussi en Floride avec lui. «Ma femme, c'est ma force; mes enfants, c'est ma force, lance-t-il. Pour avoir l'esprit clair, il faut que ma femme et mes enfants soient là. Toute la famille est en Floride.»

Il explique que son épouse l'a épaulé dans les moments difficiles des dernières années. Elle l'a aidé à trouver un nouvel entraîneur, un nouveau promoteur. «On dit souvent que la femme est derrière les petites choses négatives, mais au contraire, une bonne femme, c'est une bénédiction de Dieu», explique Alcine.

La force contre la science

Sans livrer sa stratégie contre Lemieux (25-1, 24 K.-O.), Alcine (32-2-1, 19 K.-O.) s'attend à ce que le cogneur tente de l'abattre rapidement. Il s'apprête donc à l'observer pendant les deux premiers rounds. Le combat en compte douze et Alcine espère sûrement l'étirer à sa limite. David Lemieux, 22 ans, n'a encore jamais livré un duel au-delà du 10e round.

«Si le combat se rend au 10e, au 11e round, comment David va réagir? se demande le vice-président du Groupe Yvon Michel, Bernard Barré. Personne ne le sait. C'est ce qui fait la beauté de la boxe. En bout de ligne, on ne sait pas comment ça va finir, cette histoire-là.»

Barré a déjà un narratif pour l'affrontement: «C'est un cogneur contre un boxeur scientifique.»

Car malgré les défaites, Alcine a encore la réputation d'être un esthète de la boxe. Sa technique est à point. Il a déjà gagné des combats avec son jab pour seule arme. Rien de tout cela n'a changé. Il jure qu'il est encore meilleur: «Plus on vieillit, plus on devient mature.»

Le jab n'a peut-être pas changé, mais tout le reste, oui. Alcine ne sera vraisemblablement pas le favori de la foule lorsqu'il va monter sur le ring en décembre. Les amateurs de boxe ont une nouvelle coqueluche, plus jeune, plus forte. Alors que lui est maintenant en Floride, David Lemieux vit à Montréal. Est-il même encore un boxeur local?

«J'ai encore des partisans à Montréal. Moi, je suis né québécois et je serai québécois jusqu'à la fin de mes jours, dit-il. Je ne vais pas abandonner mes partisans. Je suis encore un Québécois.»