Sa (courte) nuit de sommeil n'a pas changé l'opinion de Stéphan Larouche sur la performance exceptionnelle de son protégé Lucian Bute, vendredi soir au Centre Bell. Sa victoire par knock-out technique sur Fulgencio Zuniga, au quatrième round, occupera une place de choix dans le palmarès du champion IBF des super moyens.

«Lucian a livré une des belles performances de sa carrière, dit Larouche. Il a maîtrisé tous les aspects du combat. On espérait qu'il soit trop rapide pour Zuniga; c'est ce qui s'est passé. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas terminé un combat aussi tôt, qu'il avait dominé autant. Il a pu faire plaisir à ses fans.»

Le ring du Centre Bell était à peine démonté que déjà, certains observateurs mettaient en doute la qualité de l'adversaire de Bute. Comme si les lacunes du Colombien diminuaient la valeur de la victoire (la destruction serait plus juste) du Québécois d'origine roumaine.

Une perception normale, estime l'entraîneur de Bute. «Malheureusement, quand un boxeur domine un combat, les gens ont l'impression que son adversaire n'était pas assez fort pour lui. La vérité, c'est que ce n'est pas Zuniga qui était trop faible, mais Lucian qui était trop fort. J'en ai déjà parlé, mais son sens inné des distances fait mal paraître ses rivaux. Les autres boxeurs ont l'air plus faibles, ils frappent dans le vide. Bute met leurs faiblesses en évidence. C'est un avantage difficile à contrer, surtout pour un adversaire qui a peu de vitesse, comme Zuniga.»

«Chose certaine, personne, incluant Kelly Pavlik, Daniel Santos ou Denis Inkin, n'a donné une raclée à Zuniga comme Lucian l'a fait.»

Stéphan Larouche a célébré modestement la victoire de son boxeur: un tour à la Cage aux Sports, un souper... Et Bute? «Je ne sais pas, il est allé manger avec sa gang de la Roumanie.»

Pour les prochaines semaines, Bute pourra manger ce qu'il souhaite, sans trop se soucier de faire grimper la balance au-delà des 168 livres. Il est en congé... possiblement jusqu'en juin. «Le prochain combat sera une défense optionnelle de sa ceinture ou un combat d'unification, explique Larouche. Notre date butoir pour une défense optionnelle est le 19 mai, mais nous allons faire une demande à l'IBF pour repousser cette date.» La défense obligatoire, possiblement contre Librado Andrade si ce dernier bat Vitali Tsypko le 4 avril au Centre Bell, sera présentée à l'automne.

Sitôt le combat terminé, le téléphone s'est mis à sonner chez Interbox. «Les gens de Showtime ont mis la main sur Jermain Taylor, qui était avant chez HBO. Ils aimeraient beaucoup le voir affronter Lucian. Seulement, il se bat contre Carl Froch le 25 avril. Il faudrait d'abord qu'il gagne, puis qu'on attende trois ou quatre mois... On perdrait le contrôle de notre calendrier, ce qu'on n'aime pas trop. Mais on va écouter toutes les offres.»

«L'important pour Lucian est de faire des statements. Pour grimper dans l'élite, tu dois te battre contre les meilleurs; pas seulement dans ta ville. Il n'y a pas d'autre chemin possible.»

Reste qu'une belle histoire d'amour est en train de s'écrire entre Bute et sa ville, sa province d'adoption. «Vendredi soir, on a vu que les gens ont acheté des billets pour voir Lucian. Ils achètent le boxeur, pas le combat et c'est beau à voir. Il y a très peu de boxeurs dans le monde qui ont cette chance: Oscar de la Hoya, Ricky Hatton... Même Miguel Cotto a vendu moins de billets que Lucian pour son combat au Madison Square Garden à New York en février! Zuniga est un boxeur peu connu et les spectateurs sont venus. Ça prouve à quel point Lucian est aimé du public.»

Et, ça ne nuit pas quand vient le temps de négocier pour attirer un combat au Québec, conclut Larouche.