Le programme de football de l'Université McGill est en crise après la démission, mardi matin, de l'entraîneur-chef Clint Uttley. Ce dernier a quitté son poste en réaction au traitement, par la direction de l'université, d'une affaire de violence conjugale impliquant l'un des joueurs de l'équipe, Luis Guimont-Mota.

Dans un communiqué, Uttley explique son profond désaccord avec un passage de la lettre du vice-recteur de McGill, Ollivier Dyens, où il annonce la suspension de Guimont-Mota. Après avoir rappelé que l'athlète-étudiant avait déjà plaidé coupable dans une affaire de voie de fait en 2010, Dyens insistait: «Cette personne n'aurait pas dû être invitée à se joindre à l'équipe.»

Uttley, qui a une maîtrise en «Inclusive Education» de l'Université Acadia, a répliqué: «Une telle affirmation n'est pas en accord avec mes valeurs en ce qui concerne le sport, le recrutement et la vie en général. Je crois en la réhabilitation. Cet athlète-étudiant (Guimont-Mota) a reconnu sa culpabilité et a purgé sa peine, des faits qu'il n'a pas cachés à l'Université.

«Quand il s'est joint à l'équipe, l'Université a toléré, puis accepté sa présence, avant de célébrer ses accomplissements par la suite. Affirmer maintenant que cet individu n'aurait pas dû être accepté avec l'équipe me trouble profondément et, en toute conscience, je ne peux travailler pour une organisation qui n'embrasse pas les valeurs d'équité et d'inclusion.»

Uttley, qui a annoncé son départ à ses joueurs tôt mardi, estime qu'une institution comme McGill devrait justement montrer l'exemple. «Comment quelqu'un peut-il aspirer à une véritable réhabilitation si les institutions de pointe du Québec et du Canada lui ferment leurs portes? Moi-même, je n'aurais pas mes études si des entraîneurs de football ne m'avaient pas offert de vraies occasions.

«Si offrir une deuxième chance à un jeune homme me coûte mon poste d'entraîneur-chef à McGill, alors j'accepte cette conséquence afin d'être fidèle à de plus hauts standards moraux que ceux qu'on applique.»

À 41 ans, Uttley en était à sa troisième saison à McGill; l'équipe présente un dossier de 6-15 sous ses ordres. Les Redmen ont perdu leurs quatre premiers matchs cette saison, accordant près de 50 points par match en moyenne.

La direction garde le cap

En milieu de journée, la direction de l'université a pris acte de la démission d'Uttley. «La présence de l'entraîneur-chef Uttley nous manquera sur le terrain et nous aimerions souligner le travail qu'il a accompli avec l'équipe de football et nos programmes sportifs», a indiqué le directeur des sports de McGill, Drew Love.

«Nous espérons pouvoir annoncer la nomination d'un entraîneur-chef intérimaire, choisi parmi notre personnel actuel, dans les deux prochains jours.»

De son côté, le vice-recteur Dyens a tenu à répéter: «L'Université tient à réaffirmer que la mission académique de l'institution doit primer. Nous souhaitons à M. Uttley du succès dans ses projets futurs.

«Nous avons annoncé la semaine dernière le lancement d'une révision en profondeur de la réglementation régissant la participation à des sports universitaires. Cette révision vise à nous assurer que notre réglementation reflète et renforce la transparence du mode de décision, ainsi que l'imputabilité et le respect de notre engagement envers les valeurs qui sous-tendent l'environnement académique de McGill.»

Ce n'est pas la première fois que le programme de football de McGill, l'un des plus anciens au Canada, fait les manchettes pour les mauvaises raisons. En 2005, le programme a été suspendu en pleine saison après des révélations et une enquête sur une affaire liée à des rituels d'initiation.

Le vice-recteur Dyens a aussi fait allusion la semaine dernière à d'autres situations survenues lors des dernières années, où des informations pertinentes sur des joueurs recrutés n'avaient pas été considérées adéquatement.

Le prochain entraîneur-chef des Redmen devra sûrement composer avec des critères de recrutement encore plus exigeants que ceux qui sont en place actuellement - des critères qui sont pourtant déjà beaucoup plus sévères que ceux des autres formations universitaires québécoises.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Luis-Andres Guimont-Mota