Ils étaient censés être les Jeux de la contestation. Des athlètes allaient sortir l'arc-en-ciel sur le podium. Ils allaient dénoncer le gouvernement, se montrer solidaires, crier et, surtout, ne pas rester silencieux devant la loi anti-gais en Russie.

Rien de tout cela ne s'est finalement produit.

Le cas de l'homme de hockey Brian Burke est peut-être la plus belle illustration de cette contestation avortée aux Jeux olympiques de Sotchi.

Burke est devenu un militant de la cause homosexuelle quand son fils Brendan lui a annoncé qu'il était gai, en 2007. La mort tragique de Brendan dans un accident de la route trois ans plus tard n'a fait qu'accentuer les sentiments de Burke. Il est devenu la plus forte voix pour la cause homosexuelle dans le monde plutôt conservateur du hockey.

Burke est à Sotchi dans le groupe de direction de l'équipe américaine. Dans une série d'entrevues à l'automne, il a vertement critiqué la loi anti-gais adoptée quelques mois plus tôt en Russie. «(À Sotchi), je serai publiquement pro-gais, et j'invite les athlètes à me suivre», a-t-il écrit dans une lettre publiée par Sports Illustrated.

Dans un entretien au Globe and Mail en octobre, il a affirmé qu'il porterait une épinglette aux couleurs de l'arc-en-ciel, signe de soutien à la cause homosexuelle. «Lorsqu'on me demandera mon avis, je le dirai. Un truc aussi répugnant ne devrait pas passer sous silence», a-t-il ajouté, parlant de cette loi qui interdit la promotion de l'homosexualité auprès des mineurs.

Alors, Brian Burke est-il le premier contestataire de ces Jeux de Sotchi? Pas du tout.

La Presse a croisé celui qui est aussi directeur général des Flames de Calgary hier dans l'aréna Shaïba, où les États-Unis affrontaient la Slovaquie.

Burke ne portait pas d'épinglette arc-en-ciel. Lorsque l'auteur de ces lignes lui a demandé ce qu'il entendait faire pour dénoncer la loi anti-gais, Burke a répondu sèchement: «Je ne veux pas parler de ça pendant que je suis en Russie.»

Mais n'avait-il pas affirmé dans son entretien au Globe and Mail qu'il ne reculerait pas si on lui demandait son avis? Dans les gradins de l'aréna, à ce moment précis, un journaliste lui demandait justement son avis.

«Non, a rétorqué Brian Burke. Ce que j'ai dit, c'est que je n'hésiterais pas à parler s'il se passait quelque chose. Il ne s'est rien passé.»

Puis Burke a ajouté, comme pour mettre fin à la conversation: «Je veux me concentrer sur les matchs de hockey qu'on a à gagner.»

«Nous aider»

Le silence de Brian Burke à Sotchi n'est pas unique. La contestation tant attendue n'est pas venue. Jusqu'à maintenant, aucun athlète n'a fait de geste pour dénoncer la situation des gais et des lesbiennes en Russie.

En novembre, une militante russe des droits homosexuels a dit à La Presse espérer que des athlètes prennent position. «Ils pourraient vraiment nous aider car nous, nous avons de moins en moins le droit de nous exprimer», a alors avancé Anastasia Smirnova, porte-parole de la Coalition russe LGBT.

Smirnova a été arrêtée vendredi dernier avec trois autres militants. Selon plusieurs médias, ils voulaient dérouler une bannière sur laquelle se lisait un passage de la Charte olympique contre la discrimination.

Elle a été libérée et est en attente de son procès. La Presse a tenté hier de la joindre, sans succès.