Qu'on l'accueille avec consternation ou avec soulagement, la nouvelle du départ de Nick De Santis de son poste de directeur sportif signale, sinon la fin de l'histoire, la conclusion d'un chapitre important dans l'existence du club. Figure emblématique du bleu-blanc-noir depuis sa fondation, De Santis incarnait la fameuse passion qui caractérise le club montréalais.

À tel point que d'aucuns le considéraient comme indissociable d'une organisation dont il aura occupé les postes névralgiques de capitaine, d'entraîneur et de directeur sportif. Il faut savoir que l'ex-numéro 4 de l'Impact - un maillot que personne n'a d'ailleurs endossé depuis - a le logo de l'organisation tatoué non pas sur le coeur, mais dans le dos. L'héritage d'un pacte conclu avec son ami le président Joey Saputo à l'aube de la conquête du championnat, en 2004...

Ce changement était nécessaire. Les résultats sont désastreux. La gestion de l'effectif comporte toujours un élément de panique. N'empêche, l'annonce faite par Saputo provoque à la fois des émotions dignes d'un deuil et d'une libération pour tous ceux qui ont fait partie du club ou en ont suivi les aléas au cours des 20 dernières années.

On peut penser que le départ de De Santis donnera plus de latitude au personnel d'entraîneurs, qu'il procurera une bouffée d'air frais aux joueurs. Reste qu'en dépit des critiques, on ne sait pas trop à quoi s'attendre en l'absence de celui qui traçait la voie, parfois sinueuse, qu'empruntait l'équipe. On n'a jamais eu à naviguer sans ce membre de l'équipage.

Bilan

Avec le recul, on constate que c'est l'inaction de la direction après la glissade au classement entreprise en milieu de saison, l'an dernier, qui aura finalement eu raison de De Santis. Alors qu'il donnait l'impression de lui vouer une confiance aveugle, Saputo n'aura pas accepté qu'on néglige d'apporter du sang neuf à un effectif qui devait composer avec les départs d'Alessandro Nesta et Davy Arnaud après la saison 2013.

Ce refus de bouger - et cet entêtement à miser sur les retours hypothétiques de Nelson Rivas et d'Adrian Lopez - semblait pourtant à l'opposé des méthodes employées par De Santis avant l'entrée en MLS lorsque le club faisait mine de s'en aller à la dérive. Peut-être gagnait-il en maturité?

Mais il y a tout de même lieu de se demander si l'ex-directeur sportif n'a pas cherché à combattre ses propres instincts cette année. Après tout, on parle d'un dirigeant qui menaçait régulièrement son vestiaire de procéder à des transactions si le rendement n'était pas à la hauteur de ses attentes.

À vrai dire, dans certains cas, la solution n'était pas si mauvaise. L'échange de Zé Roberto pour Joey Gertsen et David Testo, en 2007, n'était pas loin du coup de maître.

Le niveau d'exigence auquel De Santis soumettait ses ouailles avait tendance à provoquer une baisse de rendement à moyen et à long terme. La plupart du temps, la pression qu'il imposait ne permettait pas aux joueurs de maximiser véritablement leur potentiel. L'équipe stagnait ou régressait en attendant la transaction subséquente.

Or, le passage en Ligue majeure - et la vague de mouvements de personnel l'accompagnant - n'aura pas changé une culture répandue à plusieurs échelons de l'organisation.

Au-delà de la langue, des impôts et de la météo, on peut même supposer que ce climat de travail joue contre la cote de popularité de l'Impact auprès des joueurs de la MLS. En effet, les critiques envers le club, même lorsqu'elles sont constructives, sont malheureusement souvent rejetées comme un vulgaire manque de loyauté.

Il faut bien reconnaître le pouvoir de séduction de De Santis auprès de certains joueurs de renom. Après tout, ses efforts auront contribué à amener à Montréal Marco Di Vaio, Alessandro Nesta et Ignacio Piatti - un joueur qu'on aimerait bien voir arriver de San Lorenzo avant la fin de la période de transferts, question de rassurer ceux qui craignent un fiasco. J'en suis.

Mais à la fin, force est de constater que De Santis aura mené l'Impact à sa manière, aussi loin qu'il aura pu, avec ce mélange d'autorité et de passion. Il n'y a pas de honte à cela, au contraire. Si seulement on avait mieux réussi à transmettre son courage à ceux qui portent les couleurs aujourd'hui...