Il fera chaud cet après-midi à San Pedro Sula. La pelouse sera longue et la foule cherchera à intimider tout ce qui porte du rouge...

D'accord, ça sent un peu le mauvais pastiche de la Chronique d'une mort annoncée, mais c'est essentiellement dans ce décor que se jouera l'avenir de l'équipe nationale canadienne.

Dans le jargon, c'est ce qu'on appelle un match sans lendemain. Je ne parle pas des séries de championnat au baseball. La Coupe du monde a beau ne pas commencer avant le mois de juin 2014, le Canada joue sa finale aujourd'hui. Une finale dans laquelle un match nul serait synonyme de victoire pour les rouges étant donné qu'il équivaudrait à une qualification au tour suivant.

Si on parle de finale, c'est aussi parce qu'il s'agit d'une fin de cycle pour une équipe nationale peuplée de vétérans qui risquent de ne plus y figurer longtemps. Une génération de joueurs au potentiel indéniable (Bernier, De Rosario, De Guzman, Hutchinson) dont le fait d'armes ensemble aura été une demi-finale à la Gold Cup de 2007. Une génération, comme tant d'autres dans l'histoire du soccer canadien, à laquelle il manque encore le trophée de chasse le plus convoité dans nos contrées: une qualification à la Coupe du monde.

Fatalisme et méthode Mourinho

Ne nous faisons pas d'illusion, le Honduras part favori pour l'emporter contre le Canada. Et je ne cherche pas à enlever du mérite à nos porte-couleurs en écrivant cela. Le Canada a actuellement une avance de deux points sur le Honduras au classement. Mais soyons francs, après le tirage au sort qui plaçait le Canada dans un groupe avec Cuba, le Panama et le Honduras pour le troisième tour de qualification en CONCACAF, c'est probablement sur le match à San Pedro Sula que l'entraîneur Stephen Hart faisait une croix dans ses calculs.

Ce n'est pas pour rien que les Catrachos - c'est leur surnom - ont participé à la dernière Coupe du monde ainsi qu'aux Jeux olympiques. D'ailleurs, les Mexicains avaient subi la loi des Honduriens à deux reprises lors de la qualification pour la Coupe de 2010. Alors, ne me sortez pas l'argument que si le Canada n'arrive pas à battre le Honduras, il ne mérite pas d'aller à la Coupe du monde! De toute façon, je vous l'ai déjà dit, il n'a qu'à faire match nul.

Seulement, les joueurs canadiens ont beau avoir leur sort en main et clamer qu'ils se battront comme si ce match allait être leur dernier - quel présage! - je n'ai pas l'impression qu'au moment du coup d'envoi, les joueurs en rouge seront ceux qui seront les plus confiants, ni ceux qui auront les meilleures chances de l'emporter. Il faut dire que côté destin, le sort favorise rarement le soccer canadien.

Le pessimisme est donc de rigueur. Ce qui, du même coup, est une forme de protection pour le spectateur meurtri par plusieurs années de déception.

De nature assez laconique, l'entraîneur Stephen Hart doit se demander comment provoquer une étincelle qui ferait que les Canadiens ne se présentent pas sur le terrain telles des chèvres livrées aux lions, comme cela avait été le cas au Panama. A-t-on pensé apporter quelques armures de gladiateurs?

Sinon, il reste toujours à jouer la carte Mourinho. Par exemple, décréter avant le match que l'arbitrage sera sans doute favorable au Honduras. Ou avancer que les penalties ne sont jamais sifflés dans la surface blanche et bleue. Voire dénoncer que la CONCACAF fait tout en son possible pour éviter une qualification unifoliée, ce serait un peu tiré par les cheveux, on s'entend. Mais il y aurait peut-être moyen de désamorcer la pression ressentie par ses joueurs et d'accentuer la nervosité des receveurs. En plus, on augmente la probabilité que l'arbitre veuille nous donner raison!

Mais tous n'ont pas l'aura du «Special One». Et les Honduriens sont trop occupés à aiguiser leurs couteaux pour l'écouter.