Le sempiternel débat sur l'assistance vidéo au soccer a repris une incroyable vigueur au cours des derniers jours, la faute d'une discussion animée entre deux grosses pointures, des excuses d'un officiel désolé et d'un but fantôme.

La plus récente controverse dans le monde de l'arbitrage est survenue samedi quand un penalty a été accordé à Manchester United à la suite d'un tacle pourtant légal du défenseur de Bolton Jlloyd Samuel sur Cristiano Ronaldo. Le bon placement de l'arbitre Rob Styles ne l'a pas empêché de tomber dans le panneau du plongeon de Ronaldo, qui n'avait cependant même pas réclamé le tir de réparation qu'il allait éventuellement convertir. Deux jours après l'incident, Styles a courageusement présenté ses excuses à l'état-major de Bolton, irrité par sa décision préjudiciable dans la défaite de 2-0.

 

Une semaine plus tôt, la deuxième division anglaise a été ébranlée par une autre erreur de jugement quand le juge de touche Nigel Bannister a accordé un but à Reading même si le ballon était passé près d'un mètre à l'extérieur du poteau. L'officiel sur le terrain Stuart Attwell n'avait eu d'autre choix que de s'en remettre à son partenaire, nonobstant le fait que personne sur la pelouse n'avait manifesté ou même stoppé le jeu. Watford a dû se contenter d'un match nul de 2-2 après 90 minutes, privé des trois points de la victoire par un but qualifié de « fantôme « dans la presse anglaise.

Et comme trame de fond de ces incidents, le président de l'UEFA, Michel Platini, et le manager d'Arsenal, Arsène Wenger, ont publiquement étalé leurs divergences d'opinion sur l'utilisation de la technologie, et plus particulièrement de la vidéo, pour aider les arbitres à accomplir leur boulot aussi noble qu'ingrat. « Je suis pour la justice sportive et l'UEFA doit en être le garant «, a remarqué Wenger, apôtre de l'arrêt sur images pour couper court aux litiges. «Je me bats pour l'avenir du jeu et du football «, a ajouté le technicien dans les pages du Dauphiné libéré.

Platini, lui, à l'image de Sepp Blatter, le patron de la FIFA, ne veut rien entendre pour le moment. « Je pense aux hommes, pas à la technologie. Dès qu'il y aura la vidéo, il n'y aura plus d'arbitres «, a exposé l'ex-meneur de jeu des Bleus au même quotidien. Il appuie d'ailleurs les tests à cinq officiels effectués au cours du prochain mois lors de tournois de moins de 19 ans.

Qu'on soit en faveur ou non de la vidéo dans le soccer, il importe de trouver des solutions rapides pour protéger les hommes en noir des critiques toujours plus virulentes, des ralentis incriminants disponibles sous une dizaine d'angles, du nombre croissant de caméras dans les stades - plus de 30 pour chacun des matchs du dernier Euro -, et même de la théâtralité trompeuse des footballeurs. La plupart des ligues professionnelles, joueurs et entraîneurs compris, voient d'un bon oeil l'utilisation de la technologie. Sa future application, elle, suscite bien des interrogations.

Faudra-t-il se limiter aux franchissements de ligne de but ou risquer sinon de mettre le crampon dans un terrible engrenage qui mènera à la révision des fautes, des cartons, des hors-jeux, des remises en touche, des coups de pied de coin et quoi encore pour finalement accroître la durée des matchs ? Comment justifier le hachement du jeu pour revoir des actions alors qu'on vante le mouvement perpétuel dans le soccer ? Et dire que les deux méthodes testées dans la simple validation de but - le ballon à micropuce et le système Hawk Eye - n'ont pas donné la précision escomptée...

L'avènement de la vidéo déshumanisera inévitablement les arbitres, dixit le président de la Ligue de football professionnel, Frédéric Thiriez, et nuira au principe d'universalité du football par ses coûts considérés exorbitants par les championnats moins fortunés.

Mais la racine du débat se trouve dans le droit à l'erreur, qui distingue le ballon rond de la majorité des autres disciplines et qui en fait toute la beauté. Après tout, qui influe davantage sur l'issue d'un match : l'arbitre dans le tort ou l'attaquant incapable de marquer dans un filet béant ?