Dans les semaines précédant la Coupe du monde, le slogan du football brésilien, «jogo bonito»: le beau jeu, s'est retrouvé noyé dans le bruit des travaux de dernière minute et les cris des manifestants en colère. Ce n'est plus le cas.

Maintenant, c'est le football qui est sur toutes les lèvres. Et depuis le début du tournoi, il a offert du jeu ouvert, axé sur l'attaque et rempli de buts et de grands moments.

Neymar a lancé le Brésil, Robin van Persie s'est envolé pour marquer d'une des têtes les plus spectaculaires que vous verrez, et le magicien argentin Lionel Messi y est allé d'un petit tour de magie du pied gauche en plein Maracana. C'était sans compter sur le tour du chapeau de Thomas Müller. Et la phase préliminaire n'est même pas complétée!

Ce n'est pas seulement chez les suspects de convenance que ça se passe: il y a eu l'incroyable retour du Costa Rica pour devancer l'Uruguay et la but in extremis de la Suisse contre l'Équateur.

«Dans tous les matchs que nous avons vus, le jeu y été ouvert et on a vu un paquet de beaux buts», a déclaré le partisan des Pays-Bas Paul Rolleman, qui prenait une marche sur la plage Copacabana de Rio pour, c'est lui qui le dit, faire passer sa gueule de bois après une mémorable soirée.

Des stades rafistolés à moitié et d'importantes manifestations: plusieurs ont craint que le retour du plus grand tournoi de football dans sa demeure spirituelle après une absence de 64 ans ne donne lieu à l'édition la plus perturbée de son histoire. Mais avec une pluie de buts - 41 en 13 matchs après le match Iran-Nigeria de lundi - et aucune anicroche avec les manifestants jusqu'à présent laissent croire qu'il pourrait être le plus mémorable des 50 dernières années.

«Des matchs à haut pointage, c'est ce que les partisans veulent voir, a indiqué le sélectionneur américain, Jürgen Klinsmann. Ils veulent voir des buts.»

Et ils en ont vu. De Sao Paulo à Salvador, de Cuibaba, à l'intérieur des terres, jusqu'au plages de Rio de Janeiro, il y a eu des buts à profusion. La moyenne est de trois buts par match jusqu'ici. À ce rythme, le tournoi sera le plus productif à ce chapitre depuis que le Brésil, mené par un jeune Pelé de 17 ans, ne commence son histoire d'amour avec le sport et ne remporte le premier de ses cinq sacres en Suède, en 1958.

Le premier match nul du tournoi est survenu au 13e match, un 0-0 entre le Nigeria et l'Iran. Seulement six des 26 équipes qui ont joué ne se sont pas inscrites à la marque. Personne n'a «stationné l'autobus», comme le disent les Européens, ni n'a joué défensivement.

«On n'en voit pas. Il n'y a pas eu de match ennuyant», a dit Andre Lien, un partisan allemand, qui a dû regagner la maison après le premier match des siens pour retourner au travail.

L'entraîneur-chef du Brésil, Luiz Felipe Scolari, qui avait auparavant une approche plutôt défensive- au grand déplaisir de plusieurs partisans -, joue maintenant avec trois attaquants en Coupe du monde. Les Pays-Bas se sont moqués des critiques qui lui ont été adressées avant le tournoi en disputant un match ultra-rapide, avec une attaque dévastatrice pour écraser les champions en titre de l'Espagne 5-1. Même la Bosnie-Herzégovine, à ses débuts au Mondial, a utilisé une approche agressive contre Messi et l'Argentine, comme l'avait promis son sélectionneur, Safet Susic.

«C'est de cette façon qu'on joue au football, a-t-il précisé. On ne sait pas faire autrement. Et je ne veux pas que mes joueurs jouent d'une autre façon.»

Les amateurs ont répondu en remplissant les stades et les zones dédiées aux partisans aux abords de ceux-ci. Mais bien sûr, il ne s'agit que des premiers jours du tournoi. Les organisateurs ne peuvent pas baisser leur garde. Il y a eu un moment au stade Itaquero de Sao Paulo, jeudi dernier, où tout n'a semblé tenir qu'à un fil électrique: une section d'éclairage s'est éteinte, rallumée, puis éteinte encore avant de revenir en fonction, laissant craindre le pire. Mais Neymar a répliqué avec un doublé et les favoris locaux ont comblé un déficit de 1-0 pour vaincre la Croatie 3-1.

Il y a aussi eu quelques manifestations sporadiques - des manifestants et des policiers se sont affrontés à quelques pâtés du Maracana, dimanche - et quelques problèmes de logistique. À Natal, au nord-est du pays, des pluies torrentielles et des inondations ont failli gâcher la fête dans cette région.

Mais sur le terrain, au moins, le tournoi a relevé les premiers défis qu'il a rencontrés. Le seul souci du Brésil est de savoir si le tournoi pourra maintenant garder ce rythme.