Dans l'échelle de l'évolution du soccer, Louis van Gaal et Felix Magath font figure de dinosaures. Congédiés par le Bayern Munich et Schalke 04 à quelques jours d'intervalle cette saison, les deux hommes sont parmi les derniers représentants de la classe des entraîneurs autoritaires.

Au fil des années, ce type de gestion a laissé place au dialogue dans le vestiaire. Plutôt que de brandir le bâton, la très grande majorité des entraîneurs privilégient aujourd'hui la carotte. Le symbole est évidemment Jose Mourinho dont le charisme et les méthodes «à l'affection» lui permettent de ressortir le meilleur de ses joueurs.

Comment expliquer cette évolution? Le soccer est tout simplement le reflet de la société, croit Mauro Biello. L'assistant-entraîneur chez l'Impact, qui a amorcé sa carrière professionnelle au début des années 1990, a pu constater ce changement de ton.

«Quand j'ai commencé, il y avait davantage cette autorité chez les entraîneurs. Avec les années, cela a beaucoup changé à cause de la mentalité différente des jeunes joueurs», indique-t-il en faisant le parallèle avec l'évolution des relations parentales au fil des générations.

«Il y a quelques entraîneurs pour qui cela marche encore quand ils crient et piquent les joueurs alors que les autres sont capables de transmettre cette même information de façon un peu plus calme.»

La clé de voute de ce changement réside donc dans la communication. Certains anciens joueurs de Magath déploraient l'absence totale de rapports humains. Comme l'expliquait l'ex-gardien de but du Bayern Munich, Oliver Kahn, Magath «mise tout sur la peur et la pression. Sur le long terme, ça ne peut pas fonctionner.»

En moyenne, l'actuel entraîneur de Wolfsburg ne dépasse d'ailleurs pas la barre des deux saisons au sein d'une même équipe. Dès que des difficultés apparaissent, sa gestion autoritaire n'est pas propice à la recherche de solutions et ne fait qu'envenimer la situation.

«Comme joueur, c'est sûr que l'on préfère un entraîneur qui est facile d'approche et avec qui l'on peut parler, confirme Nevio Pizzolitto. Qu'il ne soit pas juste un entraîneur, mais aussi un ami.

«Quand la communication est meilleure, on peut régler plus facilement les choses qui ne fonctionnent pas sur le terrain», ajoute le capitaine de l'Impact, qui avoue avoir évolué sous les ordres d'un entraîneur difficile à Montréal.

S'adapter sans trop s'approcher

Lors de récentes entrevues, Unai Emery (Valence) et Christophe Galtier (Saint-Étienne) - tous deux âgés de moins de 45 ans -, expliquaient qu'ils cherchaient à savoir quel individu se cachait derrière chaque joueur. Qu'ils voulaient connaître le parcours de chacun pour mieux anticiper et comprendre les réactions.

Car avec autant de cultures et de personnalités au sein d'une même équipe, la communication individuelle joue un rôle prépondérant. C'est lors de ces occasions que les entraîneurs peuvent se montrer plus sévères, souligne Biello. «C'est sûr que chaque joueur possède un caractère différent. Pour certains, il faut y aller gentiment alors que pour d'autres, il faut donner une petite claque sur les fesses», image-t-il.

Si Van Gaal et Magath - déjà surnommé le dernier dictateur d'Europe par un ancien joueur -, sont situés à une extrémité dans les palettes des entraîneurs, il n'est également pas conseillé de se retrouver à l'opposé. En devenant trop intimes avec ses joueurs, l'entraîneur peut non seulement voir son jugement altéré, mais également perdre toute autorité dans le vestiaire.

«Je n'ai jamais vu un entraîneur qui était trop proche, affirme Biello avec 19 saisons d'expérience en tant qu'athlète. Il y a toujours cette ligne qu'il ne faut pas dépasser. Dès qu'un entraîneur devient ami avec le joueur, cela devient difficile de continuer. Il faut qu'il garde ses distances pour conserver le respect.»