Un bain de glace attendait Alex Harvey à son retour à l'hôtel Soria Moria d'Holmenkollen, hier soir. Le cocktail glacé était destiné à stopper l'inflammation musculaire après les efforts intenses de la journée. Peut-être l'immersion lui a-t-elle aussi permis de se refroidir les esprits.

«Il était vraiment choqué après la course...» Louis Bouchard, l'entraîneur d'Harvey, était occupé à préparer le bassin quand il a répondu à son cellulaire. Il comprenait très bien la réaction de son protégé.

Harvey a été éliminé en demi-finale du sprint style libre aux Championnats du monde de ski nordique d'Oslo. Il était pourtant parfaitement positionné à mi-course quand un malheureux accrochage avec un adversaire suisse l'a stoppé dans sa progression.

Le temps qu'il repique ses bâtons dans la neige, il était trop tard. Les Suédois Marcus Hellner et Emil Jönsson avaient pris quatre ou cinq longueurs d'avance. Harvey les a rattrapés dans le stade, mais au prix d'un effort qui ne lui permettait plus d'espérer quoi que ce soit dans la dernière ligne droite.

Sans grande conviction, il a lancé son ski sur la ligne pour assurer sa troisième place. Il se doutait que son chrono ne lui permettrait pas d'être repêché pour la finale.

Il a mis son manteau, enfilé son sac à dos, avant de traverser la longue zone où attendent les journalistes. En arrivant devant le représentant de La Presse, il a haussé les épaules. «C'est ça le sprint. C'est de la chance», a-t-il simplement souligné.

Pas d'amertume. Juste le sentiment d'avoir raté une belle occasion pour cette première épreuve des Mondiaux.

Car il sentait qu'il avait des jambes en or. Enfin, des jambes qui lui auraient à tout le moins permis de se battre pour une médaille. Encore meilleures que celles l'ayant propulsé vers le deuxième rang à la Coupe du monde de Drammen, quatre jours plus tôt.

«Je me sentais vraiment bien, j'avais du punch, a dit Harvey, qualifié neuvième. C'était facile. À Drammen, je skiais à l'arrière du peloton jusqu'à 300 mètres de l'arrivée. Ici, j'étais en avant. Et j'aurais eu encore du jus pour la finale.»

Un immense cri de joie

Ce sont plutôt les Norvégiens et les Suédois qui se sont disputé les médailles devant un public enflammé. Des vieux, des jeunes, des familles, des travailleurs, la majorité agitant le drapeau rouge à la croix bleue. Ils étaient des dizaines de milliers, massés partout sur le parcours.

Quand l'impériale Marit Bjoergen a survolé la finale féminine, c'est comme si tout le Royaume de Norvège avait poussé un immense cri de joie. De quoi rappeler les Jeux de Lillehammer.

Il ne manquait plus que le triomphe du très confiant Petter Northug Jr. ou d'Ola Vigen Hattestad pour couronner une journée parfaite. Hélas, le Suédois Hellner a laissé tout le monde pantois avec une accélération foudroyante à mi-chemin de la finale. Son allure était telle que personne ne doutait qu'il tiendrait le coup jusqu'à la fin.

Le roi Northug, à qui certains prédisaient cinq médailles d'or, a dû se contenter de l'argent. Dépité, il s'est mis la tête entre les deux mains après avoir devancé Jönsson. «Je n'aime pas perdre contre les Suédois, mais Marcus (Hellner) était tellement fort aujourd'hui, a dit Northug. Il méritait la victoire.»

«C'est extrêmement bon»

Harvey a obtenu le septième rang. Le jeune homme de 22 ans égale ainsi le meilleur résultat canadien masculin de l'histoire aux Championnats du monde. Un certain Al Pilcher avait aussi fini septième du 50 km style libre à Lahti, en Finlande, en 1989.

«Septième en sprint, pour Alex, c'est extrêmement bon, s'enthousiasmait le coach Bouchard. On s'attendrait à ce qu'il performe avant tout sur les longues distances.»

La poursuite de 30 km - 15 km classique + 15 km libre - est d'ailleurs la prochaine course à l'horaire pour Harvey, dimanche.

Bouchard n'est pas du genre à modérer les attentes. «Les signaux sont tellement bons. Sa forme est excellente en ce moment. Tant qu'il ne tombe pas malade ou qu'il n'attrape pas une grippe, Alex est certainement l'un des candidats à surveiller pour monter sur le podium.»

Ce serait une autre occasion pour les partisans norvégiens de crier: «Heia Harvey...»

«Allez» en norvégien