Conçue à l'origine pour accueillir les meilleurs skieurs canadiens à l'entraînement et servir d'atout à une candidature olympique de Québec, la piste La Charlevoix du Massif restera fermée cet hiver.

Cette situation, temporaire selon la direction de la station, préoccupe les fédérations québécoise et canadienne de ski alpin, qui espéraient y tenir des compétitions d'envergure, dont les finales de la Coupe du monde en 2017.

Le directeur général de Ski Québec alpin, Daniel Lavallée, est tombé des nues quand Le Massif a annoncé la fermeture du haut de La Charlevoix. Cette décision s'inscrit dans un plan de rationalisation des activités du Groupe Le Massif, annoncé en juillet. Pour l'heure, l'achalandage ne justifiait pas l'ouverture de cette piste, dont l'inclinaison rend l'enneigement et l'entretien compliqués et coûteux, fait valoir Kim Martel, directrice des communications du Groupe.

Dans la foulée des Mondiaux juniors 2013, dont les épreuves de vitesse se sont déroulées sur La Charlevoix, M. Lavallée a lancé l'idée d'organiser une Coupe du monde féminine en 2015, encouragé en ce sens par des dirigeants de la fédération internationale (FIS), impressionnés par la qualité de la piste. Cela impliquait au préalable la présentation d'une épreuve du circuit continental Nor-Am, l'hiver prochain.

Après évaluation du projet, dont les budgets des Coupes du monde récentes tenues au Canada, le comité d'organisation des Mondiaux juniors a préféré passer son tour, car il a jugé les délais trop courts et l'entreprise trop risquée financièrement. «Ça nous est apparu très, très difficile de faire un succès avec ça», résume Henrick Simard, coprésident du comité.

Du coup, l'idée de tenir une série de courses Nor-Am n'est jamais allée de l'avant. Prises de court, les fédérations québécoise et canadienne se sont tournées vers le mont Sainte-Anne, où les épreuves auront finalement lieu en février 2014. «On en a entendu parler, mais on n'a reçu aucune demande officielle pour tenir une course Nor-Am», précise Kim Martel, directrice des communications du Groupe Le Massif.

Aux yeux de Daniel Lavallée, de Ski Québec alpin, la fermeture de La Charlevoix condamne pratiquement les projets de Coupe du monde, dont celui d'accueillir les finales en 2017, pour lesquelles le Canada a soumis une proposition officielle à la FIS, dit-il. Aucune piste n'est comparable dans l'est du Canada. «C'est clair que ça vient limiter grandement le potentiel de tenir des événements de haut niveau ici, déplore le directeur général, qui se dit sensible aux difficultés du Massif. C'est comme si Plongeon Québec venait de perdre le Stade olympique pour tenir ses compétitions.»

«Vraiment décevant»

Ces préoccupations sont partagées par le vice-président sports de Canada Alpin. «À l'origine, cet endroit avait été désigné comme centre national d'entraînement», rappelle Paul Kristofic, qui est aussi président du comité Nor-Am à la FIS. «Ne pas être en mesure d'y tenir une course Nor-Am, et ce qui ressemble davantage à plus de courses du tout, est vraiment décevant.»

Kristofic estime que La Charlevoix a un «grand potentiel», mais qu'elle doit faire l'objet d'une attention constante, été comme hiver, pour demeurer une piste «viable».

La directrice des communications Kim Martel insiste pour dire que la fermeture de La Charlevoix n'est «pas définitive» et que la station est toujours ouverte à accueillir de grands événements «comme une Coupe du monde ou des X Games».

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Une piste mal née

«Quelle chance pour nos jeunes athlètes d'être les meilleurs au monde chez eux!» Cette phrase a été prononcée par le Dr Fernand Labrie, à titre de président de l'Association de Québec pour le développement olympique, lors de l'inauguration du centre national d'entraînement au Massif de Charlevoix, en février 2002.

Les gouvernements provincial et fédéral ont investi chacun 10 millions de dollars dans la réalisation de ce projet articulé autour de la nouvelle piste La Charlevoix.

À l'époque, Québec rêvait toujours de Jeux olympiques et la piste, technique et exigeante, devait servir au développement des meilleurs skieurs canadiens. Le rêve s'est étiolé quand les dirigeants de la Fédération internationale de ski (FIS) ont jugé insuffisant le dénivelé de La Charlevoix pour une descente olympique masculine. Les conditions météo particulières à la proximité du fleuve et le versant plein sud ont aussi compromis la possibilité d'y tenir des entraînements de qualité à l'automne et au printemps.

Le centre n'a jamais été utilisé, sinon de façon épisodique, voire symbolique. «On avait des plans pour l'utiliser mais, pour différentes raisons, ça n'a jamais fonctionné», constate Paul Kristofic, vice-président sports à Canada Alpin.

Il restait le potentiel compétitif, qui a été exploité à quelques reprises avec des championnats canadiens (2012) et deux Championnats du monde juniors (2006 et 2013). Y aura-t-il une suite?