Après une année blanche où il n'a pas été sélectionné pour les Mondiaux, le slalomeur de Lachute veut rebondir.

Julien Cousineau n'a pas poussé les hauts cris quand il n'a pas été sélectionné pour les Championnats du monde de Schladming, l'hiver dernier. Sa fierté en a pris certes un coup, mais les critères étaient clairs et il ne les avait pas remplis. Le silence qui a suivi a été plus difficile à négocier qu'une enfilade de piquets.

À 32 ans, remis d'une autre blessure à un genou, sans résultats comme le reste d'un groupe technique masculin en déroute, Cousineau s'est demandé s'il avait un avenir au sein de l'équipe canadienne de ski alpin. L'absence de nouvelles de la part des dirigeants ne faisait qu'accentuer son incertitude.

«Je ne savais pas où je m'en allais, ce qui se passait, raconte-t-il au téléphone. Il n'y a plus juste moi. J'ai maintenant un enfant, une femme. Il a aussi fallu que je me pose des questions: si ça me tentait encore, si j'avais encore le désir de gagner.»

Les réponses sont venues le mois dernier quand il a pris le troisième rang dans une Coupe Nor-Am et aux Championnats canadiens de Whistler. Le slalomeur de Lachute n'a pas aimé se faire faire la barbe par des skieurs 10 ans plus jeunes que lui. «Je n'étais pas content. Je voulais gagner.»

Il restait à connaître les intentions des patrons de Canada Alpin, sous pression après une saison pré-olympique pas loin d'être catastrophique. Après s'être enquis de la force de son engagement, Paul Kristofic, le vice-président aux sports, a vite rassuré son vétéran. «Il m'a dit: "Je te connais, ce n'est pas ton style d'y aller à moitié", relate Cousineau. Finir comme ça l'an dernier, ç'a été trop dur à accepter.»

À Whistler, Cousineau a aussi été emballé par sa rencontre avec Martin Rufener, le nouvel entraîneur-chef de l'équipe masculine. Le Suisse, qui a fait des miracles à la barre de son équipe nationale, avait «fait ses devoirs» et connaissait le parcours du Québécois. «Juste la façon dont il parle, on voit son leadership.»

L'un des premiers gestes de Rufener a été l'embauche de l'entraîneur italien Max Carca, qui dirigera l'équipe technique masculine. Le coach de 40 ans a connu beaucoup de succès dans son pays, menant entre autres Giuliano Razzoli à l'or olympique du slalom à Vancouver.

Cousineau se réjouit de l'arrivée de Carca, qu'il rencontrera pour la première fois la semaine prochaine dans le cadre d'un stage sur neige à Nakiska. «Je ne le connais pas personnellement, mais je l'ai déjà croisé en Coupe du monde. Il m'a envoyé un courriel et j'ai bien aimé son approche. Je pense qu'il travaille vraiment bien. Il tiendra compte des besoins individuels de chacun.»

Huitième aux JO de Vancouver, cinquième aux Mondiaux de Garmisch-Partenkirchen en 2011, Cousineau a été stoppé dans son élan un an plus tard par une rupture du ligament croisé antérieur gauche.

Déchirure ligamentaire et retour précipité

Avec le recul, il regrette son retour précipité en novembre dans l'espoir de retrouver rapidement des places de départ favorables. Non seulement a-t-il raté la naissance de son fils Benjamin, il a également pâti d'un manque de volume sur les planches. L'incertitude s'est installée. Il s'est demandé s'il avait toujours cette capacité de revenir plus fort après une blessure sérieuse (il a été opéré cinq fois en huit ans).

Son ex-entraîneur Kip Harrington, un «ami qui avait de bonnes intentions», a voulu remodeler et rajeunir son style. Ce changement technique radical s'est avéré plus nuisible qu'autre chose.

«Ce que j'ai appris jeune est ancré en moi, fait valoir Cousineau. On ne peut pas changer ça. C'est comme si on demandait (au golfeur) Jim Furyk d'enlever la loop dans son élan... Il ne sera jamais capable. Il a frappé des millions de balles comme ça.»

Cousineau est convaincu qu'un retour à la base, une augmentation du millage sur neige et l'oeil frais de Carca lui permettront de renouer avec le succès. «Je sais exactement ce que j'ai à faire. À moi de livrer la marchandise. Pour moi, c'est clair: si je ne suis pas dans les 30 premiers ou mieux à la fin de la saison, ce sera le temps de laisser ma place à un autre.»

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LA FICHE DE JULIEN COUSINEAU

Âge: 32 ans

Ville d'origine: Lachute

Club: Mont-Tremblant

Spécialité: Slalom

Départs en Coupe du monde: 94

Meilleur résultat: 5e (à deux reprises: Schladming, 26 janvier 2010; Val-d'Isère, 12 décembre 2010)

Championnats du monde: 5e, Garmisch-Partenkirchen 2011

Jeux olympiques: 8e, Vancouver 2010

5 opérations: 1 au genou droit,, 3 au genou gauche, 1 à une épaule

Personnel: Son père Alain a fait partie de l'équipe nationale de 1970 à 1973. Il est le père d'un garçon de cinq mois, Benjamin. Il a été formé par Conrad Guay, le père d'Erik.