La vie est bonne pour Érik Guay. Il est arrivé au gala de Ski Québec alpin au volant d'une Audi, nouveau partenaire de la fédération québécoise et de Canada Alpin. Si la peinture avait été sèche, il aurait dévoilé son nouveau casque aux couleurs de Red Bull, commanditaire de longue date avec qui il vient de signer un lucratif contrat de trois ans. Sans compter le lunettier Oakley, qui investit pour la première fois le marché du ski alpin aux côtés du descendeur de Mont-Tremblant et de la grande vedette américaine Lindsey Vonn.

Ce sont là les privilèges d'un champion du monde, qui a bien sûr été couronné athlète international de l'année à la 17e Rencontre au sommet Telus, jeudi soir à Laval. «On est chanceux», a candidement glissé Guay à l'issue de la rencontre de presse matinale qui a précédé le gala-bénéfice.

Sur le plan personnel, l'athlète de 30 ans admet s'être libéré d'une certaine pression en s'entendant à long terme avec des commanditaires majeurs. Car la saison 2011-12 s'annonce particulière. Guay l'aborde sur la pointe des pieds. Sans ambition autre que de la compléter en santé, libéré des problèmes de dos qui le ralentissent depuis cinq ans.

«Si les résultats ne sont pas là cette année, ce n'est pas plus grave que ça», a juré Guay, un athlète très compétitif qui n'aurait jamais prononcé une telle phrase il y a six mois.

Assez, les maux de dos

Le dernier hiver a été très difficile. Avant cette médaille d'or à Garmisch-Partenkirchen, mi-février, le Québécois a été arrêté trois semaines pour des maux de dos. Il a complété la saison sur les genoux, avalant les anti-inflammatoires en se réveillant pour pouvoir se rendre sur les pentes. Son accablement était tel qu'il s'est demandé s'il était réaliste de penser pouvoir skier jusqu'aux Jeux olympiques de Sotchi, à l'hiver 2014. «Je me suis dit qu'il fallait absolument que je fasse quelque chose.»

Après quelques mois de tergiversations, le chemin de Guay a croisé celui de Dominick Gauthier, Scott Livingston et J.D. Miller, les trois manitous de B2Dix. Ils l'ont écouté avant de lui raconter comment la skieuse acrobatique Jennifer Heil s'est reconstruite physiquement avant la conquête de son titre olympique en 2006. Le descendeur a jugé la formule taillée sur mesure pour lui: «J'ai trouvé ça très intéressant et très intelligent.»

Contrairement à Calgary, où il était entouré d'une vingtaine de coéquipiers, Guay profiterait d'un suivi beaucoup plus personnalisé et mieux adapté à sa condition. Il craignait un peu la réaction de l'équipe canadienne, qui n'a pas l'habitude de «sous-traiter» la préparation de ses athlètes. Il a finalement reçu le feu vert et même l'appui total de ses entraîneurs et du président de Canada Alpin, Max Gartner.

Un an à peine après s'être acheté une maison dans la capitale albertaine, Guay a donc redéménagé au Québec avec femme et enfant. Il s'est installé chez un ami à Verdun, non loin du studio où, chaque matin à partir de 7h45, il s'est entraîné sous la supervision de Livingston, l'ancien préparateur du Canadien de Montréal.

Après deux mois de travail en salle, Guay se sent «1000 fois mieux». «Mais on ne peut quand même pas régler cinq ans de problèmes en un mois», a-t-il prévenu.

Le moral est bon

Ce travail de reconstruction avait aussi un coût: Guay a dû rater le camp sur neige du mois d'août au Chili, une période cruciale pour tester l'équipement. Il a aussi perdu une quinzaine de livres de muscle, ce qui risque de lui coûter de la puissance sur les planches.

Libéré de ses maux, Guay se sent cependant beaucoup mieux sur le plan mental. C'est ce qu'il a compris lors d'un camp récent en Autriche. «Je ne pensais pas que ça m'affectait autant que ça. C'est le fun quand le corps va bien.»

Sans référence vis-à-vis de la concurrence autrichienne ou norvégienne, Guay ne sait pas où il se situe à un mois de l'ouverture de la saison de vitesse à la Coupe du monde de Lake Louise. Il sent qu'il a du «rattrapage à faire».

Il préfère penser à l'horizon 2014 et à la piste olympique de Sotchi, que les skieurs de la Coupe du monde découvriront pour la première fois en février. Après le titre mondial et le globe de super-G en 2010, Guay rêve de compléter le triplé avec une médaille olympique. Si sa santé le lui permet...