Pamela Ware est loin d'être nouvelle dans l'équipe canadienne de plongeon, mais ce seront ses premiers Jeux olympiques. En 2012, elle chauffait Émilie Heymans avant de fléchir lors des essais, rongée par le stress.

Avec le recul, cet échec relatif s'est avéré un mal pour un bien. À 19 ans, elle ne se sentait pas prête à affronter le cirque olympique de Londres.

«En fait, je suis vraiment contente de ne pas y être allée, avoue-t-elle franchement. Je n'avais pas l'expérience nécessaire. Là, j'ai hâte d'aller aux Olympiques. Je sais que c'est à mon tour.»

Depuis son quatrième rang surprise à la Coupe du monde de 2012, Ware a confirmé sa place parmi les meilleures spécialistes de la planète au tremplin de 3 m, tant à l'épreuve individuelle (bronze aux Mondiaux 2013) qu'en synchro avec Jennifer Abel (bronze en 2013, argent en 2015). Elle voit sa 16e position à la dernière Coupe du monde de Rio, en février, comme un simple accident de parcours. Aux Jeux, elle peut prétendre à deux podiums.

Ware peut paraître plus difficile d'approche que ses coéquipières Roseline Filion, Meaghan Benfeito et Jennifer Abel.

«Elle est un peu plus réservée», acquiesce Aaron Dziver, son entraîneur depuis 10 ans au club CAMO. «Elle me rappelle Émilie [Heymans]. Elle est aussi indépendante, pugnace et stimulée par l'environnement de la compétition.»

Et elle n'a peur de rien. Pamela a commencé le plongeon à 7 ans, en même temps que sa grande soeur Carol-Ann. Mises au défi par leur père, elles avaient exécuté des sauts périlleux sur un petit tremplin dans une piscine publique de Brossard. Une sauveteuse les avait remarquées et dirigées vers son club de plongeon.

Un an plus tard, l'entraîneuse Andrée Pouliot-Deschamps, qui fait aujourd'hui partie de l'équipe de Plongeon Canada, les a prises sous son aile avant qu'elles n'aboutissent à CAMO, où la majorité des grands plongeurs canadiens sont passés dans les deux dernières décennies (Heymans, Abel, Alexandre Despatie). Roseline Filion a été un modèle particulièrement inspirant.

Le talent de Pamela Ware a été vite remarqué. «Sa capacité à sauter, à tourner et à identifier ses repères dans les airs était spéciale par rapport aux autres enfants», note Dziver, qui est devenu comme un deuxième père.

Une carrière junior fructueuse

À 12 ans, Pamela a remporté un premier titre national junior à la tour. Trois ans plus tard, elle a gagné trois médailles d'or aux Jeux du Canada, dont une en synchro avec Carol-Ann, qui a deux ans de plus. Ces succès se sont transposés sur la scène internationale senior.

Après la retraite d'Heymans, Pamela lui a succédé comme partenaire d'Abel au tremplin. En 2013, elle a cessé de s'élancer à la plateforme. Cela signifiait aussi la fin de son association avec Carol-Ann, un moment déchirant.

«Depuis qu'on est jeunes, notre rêve était d'aller aux Olympiques ensemble au 10 m synchro.»

«C'était difficile pour les deux, mais un peu plus pour elle, raconte Pamela. Elle aimait vraiment faire du synchro avec moi. Je pense qu'elle s'est dit: moi, mon rêve est fini.»

Carol-Ann a pris sa retraite l'automne dernier à l'âge de 25 ans. Artiste dans l'âme, elle a obtenu un contrat pour faire des spectacles de plongeon aux États-Unis.

Pendant ce temps, Pamela bataillera pour deux médailles à Rio. Sa faculté d'utiliser le rebond du tremplin lui permet d'atteindre des hauteurs que seules Abel et l'Australienne Maddison Keeney peuvent égaler. À l'entraînement, elle réussit un triple périlleux et demi renversé, du jamais vu chez les femmes. Elle devrait l'ajouter à son arsenal d'ici les JO de Tokyo en 2020. Rendu là, tout le monde la connaîtra.

Marquer sa différence

Pamela Ware était particulièrement fatiguée le jour de l'entrevue, qui s'est déroulée en mai à la fin d'une dure semaine d'entraînement. «Elle aura besoin de 10 minutes pour retrouver ses esprits. Elle est un peu frustrée», avait prévenu son entraîneur Aaron Dziver.

«Ça va durer combien de temps?», a demandé la plongeuse en s'assoyant. Le ton était donné, mais il ne faut pas se laisser tromper par les apparences.

Elle l'a d'ailleurs elle-même fait remarquer lorsqu'il a été question de ses nombreux tatouages. «Quand je suis habillée, on ne les voit pas. On ne pourrait pas dire que je suis le genre de personne à avoir beaucoup de tatouages.»

Depuis l'âge de 18 ans, elle s'est fait tatouer 12 fois, au grand dam de ses parents, mais aussi de certains entraîneurs d'expérience, inquiets que ça contrarie les juges. «Moi, ça ne me dérange pas», indique Dziver, qui y voit une façon d'exprimer son unicité. «Si tu engages une bataille avec ça, tu vas avoir des problèmes!»

«Je trouve ça beau et ça me représente bien», souligne Ware, dont le plus grand tatouage, dans le milieu du dos, est inspiré d'un dessin de sa soeur Carol-Ann. «Dans ma façon de penser et ma personnalité, je suis vraiment différente.» Un 13e tatouage est déjà prévu: les anneaux olympiques.