Au terme d'une course enlevante, la Canadienne Kelsey Serwa, médaillée d'argent à Sotchi, a été la première, hier soir, à franchir la ligne d'arrivée de l'épreuve de ski cross féminin. Immédiatement, elle s'est retournée pour voir qui était derrière. Elle croisait les doigts. Le scénario longtemps espéré se concrétisait enfin : sa meilleure amie, Brittany Phelan de Mont-Tremblant, la suivait pour un doublé olympique. « C'est ce qui pouvait arriver de mieux », a dit Serwa, un unifolié sur les épaules.

Dans l'aire d'arrivée, les deux skieuses se sont précipitées dans les bras l'une de l'autre. « On l'a fait ! On l'a fait ! », répétaient-elles. « Je pense que j'ai pleuré plus aujourd'hui que dans les cinq dernières années, a dit plus tard Brittany Phelan, 26 ans. Gagner cette médaille est formidable. C'est une journée incroyable. J'ai fini quelques centièmes de seconde tout juste derrière ma meilleure amie, c'est quelqu'un qui m'a tout appris du sport, je ne pouvais demander plus. »

Ces deux nouvelles médailles ont permis au Canada d'égaler sa meilleure performance historique aux Jeux d'hiver, avec 26 médailles, réalisée à Vancouver en 2010. Le Canada a obtenu une 27e médaille plus tard en soirée, en patinage artistique. Il s'agit de la troisième victoire de suite d'une Canadienne en ski cross depuis 2010, année où l'épreuve a fait son entrée olympique. En 2010, Ashleigh McIvor a été sacrée championne olympique, et Marielle Thompson l'a été quatre ans plus tard à Sotchi. Hier, Thompson a néanmoins été arrêtée en quart de finale. Le bronze est allé à Fanny Smith, de la Suisse.

Après avoir participé aux Jeux de Sotchi en ski alpin, Phelan a décidé de faire le saut en ski cross dès 2015. « J'aime l'adrénaline. Je trouve excitant de skier avec trois autres concurrentes. En alpin, je m'ennuyais un peu. Je pensais que j'avais des espoirs en ski cross, mais je ne pensais pas alors monter sur le podium aux Olympiques.

« Quand j'ai fait le changement, je savais que j'avais beaucoup de choses à travailler pour avoir du succès en ski cross. Aujourd'hui, ça prouve que j'ai bien fait. »

Les deux skieuses, nouvelles médaillées, se connaissent depuis qu'elles ont 15 ans, alors qu'elles faisaient des compétitions de ski alpin, mais leur amitié s'est consolidée en 2015, quand Phelan a rejoint l'équipe de ski cross. « Kelsey, elle m'a tout montré. J'ai dû faire beaucoup de changements techniques, il y avait zéro secret, elle m'a tout appris. Depuis, on passe pas mal toutes nos journées ensemble. »

Confiance et trac

Lors de la finale hier, Phelan était quatrième au départ. Il lui fallait effectuer au moins un dépassement pour accéder au podium. « Dans la ronde finale, ça a bousculé. Ça fait quelques fois que je me rends en finale et que je finis quatrième. Mais aujourd'hui, je ne voulais vraiment pas finir quatrième, j'ai skié le plus fort que je pouvais. J'ai vraiment bien skié toute la journée. Je savais que j'avais beaucoup de vitesse. Je n'ai pas paniqué. Je savais que j'avais un peu de temps pour faire des dépassements. J'ai vu le chaos devant, j'ai saisi ma chance. »

Au portillon de départ, avant l'ultime descente, Kelsey Serwa, 28 ans, a eu un peu le trac. « En haut, on nous fait un décompte. Il restait deux minutes, et puis une, et 30 secondes. L'annonceur nous a présentées. Et, en attente du signal de départ, on entendait une musique qui reproduisait les battements cardiaques. » Ça l'a distraite, mais elle a fermé les yeux, s'est concentrée sur ses propres battements et sur le moment présent. Elle a foncé et personne n'a pu l'arrêter.

« On ne doit jamais sous-estimer les filles qui skient derrière soi. La pression est constante dans les virages, tu ne dois pas créer d'ouvertures, pas faire d'erreur. En haut, il fallait skier près du sol, être le plus petite et compacte possible et générer de la vitesse partout où on le pouvait. » Ce qu'elle a fait.

« Je me sens incroyablement bien actuellement, a dit la skieuse de Kelowna. Tout s'est déroulé parfaitement aujourd'hui. » Sauf peut-être la chute de sa coéquipière India Sherret qui a dû être conduite à l'hôpital. « C'est un sport risqué, tout peut arriver, mais on est préparées pour ça. On s'entraîne et on apprend à gérer ces risques. Aujourd'hui, pour nous, c'est une de ces journées. Nous sommes allées à fond, sans retenue, et on se sent si bien ! »