«Nos bras meurtris vous tendent le flambeau, à vous toujours de le porter bien haut».

Si cette maxime est écrite dans le vestiaire du Canadien de Montréal, elle peut aussi inspirer l'équipe canadienne de patinage de vitesse courte piste. Après tout, elle s'entraîne à l'aréna Maurice-Richard!

Charles Hamelin et Marianne St-Gelais représentent le visage de leur sport au Canada depuis une décennie. On annonçait un changement de garde aux Jeux de PyeongChang et Samuel Girard et Kim Boutin ont confirmé que la relève était en place au sein de l'équipe.

Hamelin, 33 ans, et St-Gelais, 28 ans, prendront leur retraite dans quelques semaines, après la présentation des Championnats mondiaux à l'aréna Maurice-Richard. Malgré leur palmarès impressionnant, les deux membres du couple chéri des Québécois ont connu des Jeux en-deçà des attentes. St-Gelais n'a pas été en mesure d'ajouter une dernière médaille à sa collection de trois médailles d'argent. De son côté, Hamelin s'est contenté du bronze au relais 5000 m.

Ce sont plutôt Girard et Boutin qui ont brillé, eux qui avaient d'ailleurs eu plus de succès que leur mentor respectif lors des Coupes du monde de l'automne dernier.

Girard a décroché l'or au 1000 m, en plus d'ajouter le bronze au relais, tandis que Boutin est devenue seulement la deuxième patineuse courte piste de l'histoire à gagner une médaille dans chaque épreuve individuelle lors des mêmes Jeux, après la Chinoise Wang Meng en 2006, à Turin. La patineuse de Sherbrooke a gagné le bronze au 500 m et au 1500 m, ainsi que l'argent au 1000 m.

Pourtant, ni l'une ni l'autre des deux nouvelles étoiles canadiennes n'étaient arrivées en Corée du Sud avec de grosses attentes.

«Cette médaille-là, c'est un peu un bonus, a dit Girard vendredi, en pointant vers la médaille d'or autour de son cou. Pendant l'ensemble des Jeux, l'ambiance dans l'équipe, de vivre ça en gang, ç'a été une belle expérience. Au niveau individuel, je suis vraiment content de mes performances.»

«Chaque fois que je saute sur la glace, j'ai une envie de gagner. C'est en moi et je ne peux pas l'enlever, a raconté Boutin, qui est âgée de 23 ans. Pour m'enlever de la pression, je me dis que j'y vais pour apprendre et j'essaie de voir ce que je peux retenir de chaque course. Je ne pense pas au résultat et ça me permet de rester calme. Ensuite, je laisse mon instinct parler sur la glace et c'est payant.»

Si Hamelin n'a pas connu les Jeux qu'il espérait au niveau individuel, il avait quand même le sourire large en faisant le bilan de sa carrière olympique.

«D'avoir pu vivre les Jeux olympiques quatre fois, dont trois fois avec mon frère [François Hamelin] et Marianne, ç'a été quelque chose d'incroyable, a dit celui qui est surnommé la 'locomotive de Sainte-Julie'. Les médailles, c'est un plus. Cinq médailles sur quatre Jeux, c'est exceptionnel, mais ça n'a jamais été un objectif de carrière. Je voulais bien faire, m'amuser et démontrer ce que je pouvais faire sur la scène internationale aux Olympiques. Je voulais faire apprécier le courte piste au monde entier.»

Hamelin termine sa carrière olympique avec cinq médailles (trois d'or, une d'argent et une de bronze), ce qui le classe à égalité avec Marc Gagnon et François-Louis Tremblay en tant que patineurs de vitesse courte piste les plus décorés de l'histoire du Canada.

«C'est vraiment spécial, a-t-il reconnu. Marc Gagnon, c'était mon idole de jeunesse, c'est lui qui m'a donné le goût de patiner et de devenir un olympien. François-Louis, il est devenu mon idole lors des Jeux de Salt Lake City en 2002, quand il était le plus jeune à se classer dans l'équipe et qu'il a gagné une médaille d'or [au relais]. On a aussi été coéquipier pendant longtemps. [...] Ça me fait très chaud au coeur de me retrouver en leur compagnie. On va certainement célébrer ça ensemble dans un avenir rapproché.»

Le rôle de Hamelin a évolué entre les Jeux de Sotchi en 2014 et ceux de PyeongChang. Il est devenu le mentor de la nouvelle génération de patineurs, dont font partie Girard, 21 ans, et Pascal Dion, 23 ans, qui a participé à la conquête du bronze au relais.

«D'être uni, de ne pas avoir peur de se critiquer l'un l'autre et de vouloir apprendre de l'un l'autre, a énuméré Hamelin en expliquant ce qu'il souhaitait voir la nouvelle génération retenir de ses conseils. J'ai appris de Samuel et il a appris de moi, même chose avec Pascal. C'est un travail d'équipe, même si c'est un sport individuel.»

Girard, de Ferland-et-Boilleau, s'est dit impressionné par le calme et la maturité affichés par Hamelin au cours de la quinzaine sud-coréenne malgré les déceptions de son mentor lors des épreuves individuelles. Il se dit prêt à prendre le flambeau et à devenir le nouveau leader de l'équipe.

Chez les femmes, ce sera à Boutin de guider la nouvelle génération de patineuses courte piste.

«Marianne me disait qu'elle avait eu des craintes après les Jeux de Sotchi en se demandant qui sera de retour pour l'aider à l'entraînement et dans l'équipe de relais, a raconté Boutin. J'ai ces questions-là présentement, mais je ne suis pas inquiète parce que la génération qui s'en vient est aussi forte. Je pense qu'on a un beau bassin chez les femmes - et aussi chez les hommes -, un bassin qui est puissant, avec des filles très solidaires. Ça devrait permettre de garder une énergie positive.»

Le flambeau des patineurs courte piste canadiens devrait donc continuer à rayonner pendant de nombreuses années.