L'ambiance était électrique à l'ovale de Gangneung. Le Sud-Coréen Cha Min-kyu et le Norvégien Havard Lorentzen venaient de faire tomber le record olympique coup sur coup quand Alex Boisvert-Lacroix s'est présenté à la ligne. Dernière paire avec le vétéran Mika Poutala, il savait qu'il aurait besoin d'une «course du siècle» pour monter sur le podium du 500 m, lundi soir (heure locale).

Déçu de s'élancer du couloir intérieur, Boisvert-Lacroix a bien démarré, mais une erreur technique à l'entrée du deuxième virage a tout bousillé. Il s'est crispé et a perdu sa vitesse. Il a bien tenté de garder la «tête froide» dans la dernière ligne droite, mais il n'a pu s'empêcher de jeter un oeil au Finlandais (4e) qui passait «à toute vitesse».

Son temps de 34,93 s le plaçait 11e. Classé deuxième au monde, il visait le podium. «Je ne ressentais pas la pression de l'extérieur, a-t-il dit en se présentant devant les journalistes. C'était vraiment moi qui voulais monter sur le podium. [...] J'ai fait une course moyenne; 34,9 au niveau de la mer, ce n'est quand même pas mauvais, ce n'est pas une course atroce. Mais ça prenait beaucoup plus aujourd'hui pour rivaliser avec des 34,4 au niveau de la mer. C'est vraiment incroyable comme temps.»

Le Sherbrookois faisait référence à Lorentzen, numéro un mondial qui a confirmé son statut de favori en remportant la médaille d'or en 34,41 s. Deux paires plus tôt, Cha avait enflammé son public en arrêtant le chrono à 34,42 s. Le Chinois Gao Tingyu a causé la surprise en gagnant le bronze en 34,65 s.

Malgré tout, Boisvert-Lacroix gardait la tête haute. À 30 ans, il disputait ses premiers JO après un premier essai raté en courte piste et un autre en longue piste. «J'ai fait preuve de persévérance après avoir manqué 2010 et 2014, a souligné le double vainqueur en Coupe du monde. Je suis resté et j'ai continué à foncer.»

Trente-deuxième à Sotchi, Lorentzen permet à son entraîneur Jeremy Wotherspoon de goûter à l'or par procuration. Le titre olympique a toujours échappé au grand champion canadien, médaillé d'argent à Nagano. Sa chute dès son départ à Salt Lake City en 2002 est passée dans les annales.

«Si quelqu'un aurait mérité une médaille d'or, c'est bien lui, a souligné l'entraîneur canadien Gregor Jelonek. Et que l'un de ses athlètes le réussit, je lui lève mon chapeau. Il le mérite.»

Photo Bernard Brault, La Presse

Le Norvégien Havard Lorentzen a triomphé grâce à un chrono de 34,41 secondes, un record olympique.

Dubreuil 18e

Vainqueur d'une Coupe du monde en novembre, Laurent Dubreuil n'a cessé de décliner depuis. Ralenti par des soucis physiques, il a touché le fond du baril quand son coéquipier William Dutton a contesté sa sélection pour le 500 m devant un arbitre. Rongé par le stress pendant presque tout le mois de janvier, il ne se faisait pas d'illusions sur ses chances à PyeongChang. Il a terminé 18e en 35,16, tout juste derrière son compatriote William Dutton (35,15).

Devant ses parents Ariane Loignon et Robert Dubreuil, deux athlètes olympiques en patinage de vitesse, l'athlète de Lévis a simplement cherché à profiter du moment.

«Il y a tellement eu de rebondissements dans le dernier mois que je me demandais si j'allais la faire, la course, a-t-il dit. Je suis content de l'avoir faite de mon mieux. Ç'a été une super belle expérience d'avoir été jumelé à un Coréen [Kim Jon-ho]. J'aurais aimé faire une meilleure course, mais c'est ça le sport. Parfois, ça va de notre côté, parfois non. J'ai toujours fait du mieux que je pouvais et je suis encore fier de mon effort.»

L'entraîneur Jelonek a souligné que ses patineurs avaient été «super pros». «Je suis déçu pour les gars, pour Alex, qui voulait une médaille. Lorsqu'on regarde tout le cheminement qu'il a fait depuis les huit dernières années, et qu'il arrive aux Jeux à 30 ans, on va prendre la 11e place. Après sa course, je lui ai dit de garder la tête haute et d'être fier de lui.»

Si Boisvert-Lacroix est en fin de carrière - il veut disputer au moins une autre saison - Dubreuil se voit patiner encore longtemps, surtout avec l'ouverture prévue en 2020 d'un anneau couvert à Québec. Pour l'heure, il pense aux Mondiaux sprints dans une semaine et demie en Chine, mais surtout à prendre une très longue pause après une année éprouvante.

Seul moment de réjouissance pour l'équipe canadienne, la qualification des femmes pour les demi-finales de la poursuite. Ivanie Blondin, Josie Morrison et Isabelle Weidemann ont enregistré le troisième temps (2 min 59,02 s). Elles se mesureront donc au Japon (deuxième en 2 min 56,09 s) mercredi et surtout éviteront les Pays-Bas (premier en 2 min 55,61 s) avant une finale potentielle. En compagnie des entraîneurs Marcel Lacroix et Bart Schouten, elles se sont sautées dans les bras à la manière de joueurs de football avant de quitter l'anneau. Ça disait tout.

Photo Bernard Brault, La Presse

Laurent Dubreuil s'est contenté du 18e rang.