Après avoir mené la finale presque de bout en bout, Samuel Girard ne sentait plus ses jambes dans le dernier tour. Dans l'ultime virage, il a entendu un bruit de freinage et un gros « boum » dans les matelas. Rendu là, il ne pensait déjà plus qu'à une chose : lever les bras pour célébrer l'exploit qu'il venait d'accomplir.

À 21 ans, Girard est devenu le nouveau champion olympique du 1000 m en patinage de vitesse courte piste, hier matin (heure de l'Est), au Palais des glaces de Gangneung. L'athlète de Ferland-et-Boilleau affirmait pourtant être venu à ses premiers Jeux olympiques « pour apprendre ».

« Je pense que la médaille démontre que ce que j'ai appris était bon », a simplement dit Girard, décrit par sa conjointe et coéquipière Kasandra Bradette comme l'homme le plus humble de la terre.

Au terme d'une demi-finale où il s'est frotté à son coéquipier Charles Hamelin, Girard a bénéficié de la faveur des arbitres pour être repêché pour la finale.

À partir de là, son plan était clair : courir à l'avant, éviter les ennuis et profiter de jambes plus fraîches qu'il avait pu économiser dans la vague précédente. 

« Même si ça demande un peu plus d'énergie de me mettre en avant, c'est la dernière course de la journée, on y va pour une médaille. »

Girard était largement premier, avec l'Américain John-Henry Krueger à ses trousses, quand l'hécatombe est survenue dans le dernier virage. Le Hongrois Liu Shaolin Sándor a trébuché et entraîné les Sud-Coréens Lim Hyo-jun et Seo  Yi-ra avec lui.

À l'image de Kim Boutin, médaillée de bronze quelques minutes plus tôt, Girard a sauté dans les bras de son entraîneur Derrick Campbell. À ses côtés, Krueger se prosternait sur la glace, ébahi d'avoir remporté cette médaille d'argent. Seo a été le plus rapide à se relever pour cueillir le bronze. Shaolin a été pénalisé.

Après un tour d'honneur avec le drapeau unifolié, Girard est monté sur les coussins de protection pour recevoir une étreinte d'Hamelin, son mentor et ami.

« Il m'a dit : "Good job, tu l'as eue !", a relaté le nouveau champion. Il aurait aimé avoir cette médaille d'or là. Il est content que moi je l'aie. Ça a été vraiment un beau moment qu'il soit là. C'est un peu, comme on dit, passer le flambeau. C'est un peu l'image de lui et moi dans ses bras. »

« Charles m'a tellement appris, il m'en a tellement donné. »

Des propos corroborés par Campbell, selon qui Hamelin a été d'une « aide monumentale » pour son jeune coéquipier.

« Charles est super professionnel, a souligné l'entraîneur. Il est le modèle idéal, le coéquipier idéal. Ils ont bataillé ferme. Et Charles avait besoin de lui, en fait. Charles était dominant ces dernières années et peu de gens le mettaient au défi. Charles avait besoin de Sam autant que Sam avait besoin de lui comme d'un mentor. [...] Je pense que Sam lui apprend certaines choses dans le sport aussi. Ça a été une saine rivalité. »

Troisième champion olympique masculin québécois en courte piste après Hamelin et Marc Gagnon, Samuel Girard a témoigné de son immense respect pour le vétéran en affirmant qu'il saurait rebondir au 500 m et au relais jeudi. Avec trois médailles en poche et deux autres soirées de compétition à venir, le Canada a déjà égalé son total de Sotchi en 2014. Girard et compagnie ont bien l'intention de ne pas s'arrêter là.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Charles Hamelin était aux premières loges pour féliciter Samuel Girard à l'issue de la course.