Il a commencé à sourire dans l'eau avec 25 mètres à faire. Son premier vrai sourire des Jeux olympiques de Londres. Il savait que c'était pratiquement acquis. Que sa quête arrivait à son aboutissement. Ce ne fut peut-être pas le scénario dont il avait rêvé, mais Michael Phelps est devenu l'olympien le plus médaillé de l'histoire, mardi, au cours d'une soirée où il a été vaincu dans son épreuve fétiche.

Mis en orbite par ses trois coéquipiers du relais 4 X 200 m libre, Phelps a pu savourer la dernière longueur, confortablement en avance sur la France de son dauphin Yannick Agnel, avant de toucher au mur le premier.

Au bout de cette course sans suspense, les 17 500 spectateurs réunis au Centre aquatique savaient ce qui venait de se passer: l'Américain de 27 ans décrochait ainsi la 19e médaille olympique de sa carrière, ce qui lui a permis de devancer la gymnaste russe Larisa Latynina, qui détenait le record de 18 depuis 1964.

Avant de monter sur le podium, la 15e fois sur la plus haute marche, Phelps a prévenu ses partenaires Ryan Lochte - auteur d'un premier relais d'anthologie - Conor Dwyer et Ricky Berens qu'il ne chanterait pas l'hymne national. Trop ému. Dans les gradins, sa mère Debbie, sa fidèle supporter, ne pouvait plus se retenir de pleurer.

«Comme je l'ai toujours dit, tout est possible», a dit le nouveau roi de l'Olympe deux heures plus tard en conférence de presse. «J'ai toujours voulu être le premier à accomplir quelque chose. J'y ai mis tout mon coeur et rien n'allait se mettre dans mon chemin. Ça a été une aventure fantastique.»

Changement de la garde

Ironiquement, on retiendra surtout de cette soirée historique que le plus grand nageur de tous les temps peut être battu. On le savait depuis sa quatrième place de samedi au 400 m quatre nages, mais ce fut autre chose de le voir céder son trône au 200 mètres papillon, sa marque de commerce.

Son tombeur a pour nom Chad le Clos, un Sud-Africain de 20 ans qui idolâtre Phelps et dont l'unique ambition en arrivant à Londres était d'atteindre la finale.

Phelps a mené pendant toute la course jusqu'à ce que Le Clos ne le coiffe sur la touche par cinq centièmes, un scénario qui n'était pas sans rappeler la victoire de l'Américain sur le Serbe Milorad Cavic lors du 100 m papillon des JO de Pékin. Le Clos, qui détient une dizaine de photos de cet événement dans son ordinateur, n'en revenait tout simplement pas.

«Évidemment, je savais que Michael finirait fort avec sa dernière coulée, a raconté Le Clos. Ça peut paraître bizarre, mais au virage, je me suis pris pour Michael... Je l'ai vu et je m'en suis servi comme cible. J'ai juste essayé de faire quelque chose de spécial. Quand j'ai senti que je le rattrapais, je ne pouvais pas le croire. C'était comme un rêve qui se réalisait.

Médaillé d'argent, sa deuxième à Londres, Phelps a échoué dans sa tentative de devenir le premier nageur à remporter trois fois la même épreuve (l'Australienne Dawn Fraser et la Hongroise Krisztina Egerszegi l'ont réussi chez les femmes).

Durant le tour d'honneur, Phelps a pris Le Clos par le cou. Il a lui a dit de savourer le moment.

Photo: AFP

Le Sud-Africain Chad le Clos jubile après avoir remporté le 200 mètres papillon, devant son idole Michael Phelps.

Hayden, le premier depuis Dick Pound

Brent Hayden a dû reprendre son souffle et ravaler un sanglot. Un journaliste venait de lui demander ce qu'il ressentait à l'idée de participer à une finale aux Jeux olympiques.

«Ce sont mes troisièmes Jeux olympiques, ma première finale individuelle, j'en rêve depuis que je suis un petit garçon, vous savez... Ça veut tout dire pour moi.»

Après trois journées difficiles, Hayden a enfin donné de quoi sourire à ses coéquipiers de l'équipe canadienne de natation, se qualifiant pour la finale du 100 m libre.

Malgré une course qu'il a jugé techniquement pas très bonne - virage trop creux, eau dans les lunettes, mauvaise touche - Hayden a réussi le sixième temps des demi-finales (48,21).

Le vice-champion du monde est ainsi devenu le premier nageur canadien depuis Dick Pound, aux Jeux de Rome en 1960, à prendre part à la finale de l'épreuve reine de la natation. L'ancien vice-président du CIO avait fini sixième en 56,2. Hayden pourra-t-il faire mieux mercredi soir?

Photo: Bernard Brault, La Presse

Le Canadien Brent Hayden s'est qualifié pour la finale du 100 mètres libre.