Au terme d'une extraordinaire journée où les athlètes québécois ont remporté trois médailles de bronze, les héros du jour ont dressé le même constat: le modèle sportif en vigueur au Québec n'a pas son pareil dans le reste du Canada.

«J'ai goûté aux deux systèmes, a expliqué Christine Girard. Et je peux dire que les athlètes sont beaucoup mieux encadrés et servis au Québec. Cet investissement dans les sportifs fait une grosse différence.»

Originaire d'Abitibi et désormais établie en Colombie-Britannique, Christine Girard est devenue la première haltérophile canadienne à remporter une médaille olympique. Elle a réussi l'exploit dans la catégorie des moins de 63 kilogrammes.

«Après avoir raté ma dernière barre à l'épaulé-jeté, j'étais convaincue de terminer quatrième, a-t-elle dit. J'étais dévastée. Mais en quittant la plate-forme, j'ai aperçu mon mari. Il m'a indiqué que j'étais troisième. J'avais réussi!»

Le succès de Christine Girard a suivi de peu celui d'Antoine Valois-Fortier en judo. Le jeune homme a réalisé un tour de force en montant sur le podium dans la catégorie des moins de 81 kilos.

«Mon entraîneur Nicolas Gill et moi, on avait un plan de match, a-t-il dit. Et lorsque j'ai gagné mon premier combat de la journée, je savais que j'étais sur une lancée.»

Plus tôt en journée, au Centre aquatique, Roseline Filion et Meaghan Benfeito ont terminé troisièmes au tremplin de 10 mètres, en synchro. C'était la deuxième médaille pour les plongeuses québécoises en 48 heures, après celle du duo Heymans-Abel au 3 mètres. La joie des deux jeunes femmes était belle à voir.

Résultat, le Canada a remporté quatre médailles durant les quatre premiers jours des Jeux de Londres. Ces succès ont tous été signés par des athlètes québécois. Leurs performances permettent au pays de connaître un début olympique inespéré.

Un modèle qui intrigue

Historiquement, aux Jeux d'été, il a souvent fallu plusieurs jours avant qu'un athlète canadien ne monte sur le podium. Cette incapacité à briser rapidement la glace entraînait son lot de déceptions et d'interrogations.

Or, cette fois, c'est plutôt le succès du modèle québécois qui intrigue les journalistes du Canada anglais. En conférence de presse, hier, des questions ont été posées à ce sujet.

«C'est parce que nous sommes si cool!» a lancé, rieuse, Roseline Filion.

Plus sérieusement, elle a ajouté: «Les plongeurs sont privilégiés au Stade olympique. Les installations sont fantastiques. Nous sommes appuyés par des spécialistes de plusieurs disciplines: nutrition, physiothérapie, massothérapie, préparation physique et mentale... Nos succès démontrent que le Québec prend bien soin de ses athlètes.»

Christine Girard, qui s'est installée dans l'Ouest en janvier 2010 pour des raisons familiales - «Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour un homme...» -, a ajouté: «Financièrement parlant, j'ai perdu environ 15 000$ par année en quittant le Québec. C'est beaucoup d'argent pour une athlète.

«Il y a aussi plusieurs services gratuits au Québec, mais qu'il faut payer ailleurs au pays: physio, massage... Les centres sportifs dans l'Ouest n'ont pas nécessairement les mêmes services. Ça n'a pas été facile de m'habituer.»

Antoine Valois-Fortier a ajouté: «Dans le monde du judo, nous sommes encadrés très tôt au Québec. Ça nous permet de développer la passion pour ce sport. Judo Québec m'a pris en charge très jeune, et ça m'a donné le goût de faire des compétitions.»

En raison de son brevet canadien, Valois-Fortier reçoit une prime du Québec, un avantage dont rêvent ses camarades des autres provinces.

La réussite dans le sport d'élite nécessite des investissements importants. Les succès en plongeon et en judo s'expliquent aussi par le soutien d'À nous le podium, un organisme financé par le Comité olympique canadien et le gouvernement du Canada.

Plus de 8,6 millions ont ainsi été versés au programme de plongeon au cours des quatre dernières années. Le judo a obtenu 1,8 million durant la même période.

À n'en pas douter, le sport canadien est en train de changer. Les succès des Jeux d'hiver de 2010, à Vancouver, ont constitué un tournant. Et le Québec est à l'avant-plan de cette petite révolution.