La vasque olympique a beau être allumée, certains Londoniens maudissent encore le jour où leur ville a remporté la tenue des Jeux. Commanditaires malhonnêtes, militarisation de la ville, disparition d'espaces verts: les griefs des protestataires sont multiples, mais leur colère est commune. Tour d'horizon de la campagne anti-olympique.

Ils ont leur propre flamme et leur propre drapeau olympique. Mais en s'approchant de plus près, on constate que ce sont des menottes qui s'entrelacent, et non des anneaux. Et la torche en question s'appelle «la flamme de la pauvreté».

Environ 200 militants de tous les horizons ont scandé «Les Jeux commerciaux doivent partir!» dans le quartier Mile End, dans l'est de Londres, samedi après-midi. Sous la bannière du Réseau anti-olympique (Counter Olympics Network), ils ont accusé le CIO de sacrifier l'esprit olympique sur l'autel des McDonald's, BP et autres commanditaires officiels.

«Ces Jeux sont une imposture, explique l'organisateur de la marche, Julian Cheyne. Ils servent de tribune aux grandes entreprises.»

Claire Glasman s'était déplacée en fauteuil roulant pour dénoncer le fait de Dow Chemical soit partenaire des Jeux olympiques. Le géant des produits chimiques a acheté en 2001 Union Carbide, la compagnie responsable de la catastrophe environnementale de Bhopal, en Inde, en 1984.

«Dow Chemical n'a toujours pas nettoyé le lieu du désastre. Ses valeurs n'ont rien à voir avec celles des Jeux», dit la militante, déçue qu'aucun athlète paralympique n'appuie publiquement sa cause.

Le 20 juillet dernier, à Trafalgar Square, des protestataires ont remis des médailles symboliques à Dow Chemical, Rio Tinto et BP à titre de pires partenaires des Jeux de Londres. Une pétition de 80 000 noms remise au Comité organisateur des jeux (Locog) est restée lettre morte.

Militarisation

La plupart des manifestants disent qu'ils ne sont pas contre le sport ni même contre les Jeux olympiques. Ils dénoncent les sacrifices imposés aux Londoniens. Par exemple, l'installation de lance-missiles sur des toits résidentiels. Des résidants opposés à cette initiative du ministère de l'Intérieur ont été déboutés en cour au début du mois.

«Même à Pékin, il n'y avait pas cette paranoïa sécuritaire», a déclaré Chris Nineham, cofondateur de Stop The War, devant des «indignés», des syndicalistes et des travailleurs du secteur public.

«Il y a maintenant plus de soldats dans les rues de Londres qu'en Afghanistan», a-t-il ajouté, en référence aux 18 000 militaires qui ont été appelés en renfort pour protéger les installations olympiques.

La construction d'un aréna de basketball sur une réserve naturelle prisée par les habitants de l'est de Londres, Leyton Marsh, provoque aussi beaucoup d'amertume. «C'est difficile d'être joyeux à propos des Jeux quand on nous enlève nos jardins communautaires», dit Elke Heckel, sage-femme d'origine allemande.

Canular et arrestations

Les autorités britanniques démontrent une faible tolérance face à ces trouble-fête depuis quelques mois. En mai dernier, Twitter a fermé le compte du groupe militant Space Hijackers, qui se faisait passer pour Locog.

Les pirates informatiques avaient publié des gazouillis irrévérencieux et cyniques tels que celui-ci: «Nous ne pouvons passer la journée sur Twitter parce que nous avons des missiles à installer, des locataires à évincer et du béton à couler sur des déchets nucléaires.»

«Nous étions étonnés que Twitter, ce bastion de la liberté d'expression, cède sous la pression du comité des Jeux», affirme Agent Papa Razzo, le pseudonyme d'un des membres de Space Hijackers.

Enfin, des dizaines d'arrestations ont marqué diverses manifestations depuis le printemps.

Vendredi, une centaine de cyclistes ont été arrêtés à proximité du Stade olympique lors de la cérémonie d'ouverture. Le groupe Critical Mass, qui organise des randonnées nocturnes depuis 1996, avait enfreint l'interdiction de circuler au nord de la Tamise, où se trouve le parc olympique.