Quand il était le grand manitou des Redskins de Washington, Joe Gibbs avait l'habitude de dormir au bureau. On raconte que Gibbs était tellement absorbé par son boulot qu'il ne savait même pas qui était Madonna lors des années 1980. Je ne sais pas si Stan Bowman connaît Madonna, mais je sais ceci: ses vacances d'été, Bowman les a passées au bureau.

«On a gagné la Coupe Stanley un mercredi soir, et le lundi suivant, j'étais de retour au bureau» racontait dimanche le directeur général des Blackhawks de Chicago, dans les gradins du United Center.

Les Blackhawks ont remporté leur première Coupe Stanley depuis 1961 en juin dernier. Trois mois plus tard au United Center, on jurerait que rien n'a changé. Les fans sont toujours là, même pour un match intra-équipe. Les haut-parleurs crachent la même chanson des Fratellis quand il y a un but. Les Jonathan Toews, Patrick Kane et autres Duncan Keith patinent avec le même entrain.

Mais ces Hawks sont bien différents des Hawks de juin dernier.

La raison? Le plafond salarial. Coincé, Stan Bowman a dû laisser aller huit membres de son équipe championne. Parmi ces joueurs, il y a le gros Dustin Byfuglien, qui avait été immense en séries, sans oublier les Andrew Ladd, Kris Versteeg et autres Antti Niemi.

Dur été, en somme.

«Mais je savais très bien que j'allais avoir à faire ça, a-t-il expliqué. En fait, je le savais il y a un an. Je ne savais pas qui, mais c'était évident que j'allais devoir échanger des gars. Pour moi, c'était clair qu'il y allait avoir des changements. J'ai choisi de ne pas en parler aux joueurs la saison dernière, parce que je ne voulais pas que ce soit une source de distraction. Alors oui, les célébrations ont été courtes pour moi. Je n'ai pas vraiment eu le temps de m'asseoir pour savourer notre victoire.»

Ainsi va la vie pour un DG dans la LNH d'aujourd'hui. Les confettis ne sont pas encore ramassés que déjà, il faut se remettre au travail. Optimiste, Bowman estime que ses gars vont être dans la course cette saison. Au lieu de pleurer ceux qui sont partis, il préfère jaser des jeunes qui poussent, tel l'ailier droit Jack Skille, le choix de première ronde des Hawks, septième au total, en 2005. «Un gars qui aurait déjà beaucoup joué dans cette ligue s'il avait été avec une autre équipe», croit-il.

Il aime aussi parler de Marty Turco, celui qui devra faire oublier Antti Niemi. Après avoir placé quelques appels cet été, dont un appel à l'agent de José Théodore, Stan Bowman a finalement choisi Turco, le vétéran de 35 ans.

«Je ne savais pas si Antti allait revenir avec nous ou non, alors j'ai dû préparer un plan B. J'ai parlé à deux ou trois gars, dont Théodore. À la fin, j'ai choisi Marty. Il est super motivé, il cadre très bien avec nous, et en plus, sa façon de jouer la rondelle va aider nos défenseurs et nos attaquants. Il va relancer l'attaque et apporter une nouvelle dimension à notre équipe.

«C'est ça, le hockey d'aujourd'hui. Il faut prendre des décisions, et parfois, ces décisions sont difficiles. J'ai parlé avec Pierre Gauthier après l'échange de Jaroslav Halak, et je comprenais très bien ce qu'il pouvait ressentir.»

Ça explique un peu pourquoi les dynasties sont une espèce en voie de disparition dans cette ligue. Les derniers à avoir gagné la Coupe Stanley deux saisons de suite sont les Red Wings de Detroit, qui avaient réussi l'exploit il y a 12 ans.

«J'ai demandé à notre entraîneur (Joel Quenneville) comment les dirigeants de l'Avalanche avaient fait pour remettre les bagues de championnat aux joueurs en 1996, après leur première Coupe Stanley. Joel m'a répondu que ça n'avait pas été un problème, parce que tous les gars de l'Avalanche étaient de retour avec l'équipe la saison suivante! Tu te rends compte? Ça fait seulement 14 ans. Les choses ont bien changé.» Les choses ont bien changé, en effet. Et maintenant, Stan Bowman devra peut-être apporter son oreiller au bureau.

L'occasion de Corey Crawford

C'est un gardien montréalais qui devrait seconder Marty Turco chez les Blackhawks cette saison. Son nom? Corey Crawford, jeune homme de 25 ans qui a passé les cinq dernières saisons dans la Ligue américaine. «Il a grimpé les échelons, c'est à lui de faire sa place avec nous», m'a expliqué Stan Bowman à Chicago. En d'autres mots, ce poste de gardien réserviste chez les Hawks, c'est celui de Crawford.

Il y a un an à peine, au camp des Hawks, le poste de second à Cristobal Huet se jouait entre Crawford et un certain Antti Niemi. On connaît tous la suite. «Malheureusement pour moi, c'est Niemi qui a été choisi, mais ce fut une bonne expérience quand même, m'a expliqué Crawford, devant son petit casier du United Center. J'étais dans l'entourage de l'équipe en fin de saison, et j'ai eu l'occasion de voir les gars gagner la Coupe Stanley. Ça me pousse à être meilleur, parce que je veux gagner un championnat moi aussi.» Crawford m'a dit qu'il ne connaissait rien des plans des Hawks à son endroit. Mais dans l'entourage du club, on s'accorde pour dire que le poste de numéro deux est à lui, à moins de performances désastreuses au camp.

«Ça fait cinq ans que je joue dans la Ligue américaine, alors c'est le temps, a-t-il ajouté. J'étais nez à nez avec Niemi la saison dernière, on avait les mêmes statistiques dans la LAH. Je n'ai pas été choisi, mais j'ai travaillé encore plus fort. Je suis prêt.»

Le cas Huet

Le camp des Hawks est ouvert depuis samedi, ici à Chicago, et non, je n'ai pas croisé notre ami Cristobal Huet. En gros, les Hawks lui ont dit de rester chez lui en attendant que l'entente avec un club de la ligue suisse ne soit finalisée. Le pire, c'est que l'ancien gardien du Canadien serait le numéro un à Chicago cette saison, s'il n'avait pas en poche cette énorme entente de 5,6 millions pour l'année.

«C'est drôle, parce qu'il va faire beaucoup d'argent, mais il ne jouera pas dans la Ligue nationale», a remarqué Stéphane Waite, l'entraîneur des gardiens à Chicago.

On ne va pas se mettre à pleurer pour Huet, remarquez; les Hawks vont aussi devoir lui verser 5,6 millions en 2011-12, à moins de pouvoir l'échanger d'ici là.

Et quelles sont les chances que ça arrive, me demandez-vous? À peu près aussi bonnes que les chances d'un trophée Norris pour Paul Mara.

Populaires, les Hawks

Grâce au boulot, ça doit bien faire 10 ans que je viens faire un tour à Chicago de temps à autre. Je me souviens qu'en 2000, lors d'un match du CH, le United Center était plutôt désert. Je me souviens aussi qu'il y avait zéro ambiance dans la place, et que les Hawks passaient loin derrière les Bulls, les Cubs, les Bears et les Sox par ici. S'il y avait eu une ligue de mini-putt, probablement que les Hawks auraient été moins populaires que ça aussi.

Mais tout cela est loin derrière. Même si les Bears ont battu les Cowboys dimanche, c'est surtout des chandails des Hawks qu'on pouvait apercevoir en fin de journée sur Michigan Avenue. Samedi, pour l'ouverture du camp d'entraînement, le United Center était presque plein, et la foule était en feu comme si c'était les séries.

«On ne voit pas ça nulle part ailleurs dans la LNH, a commenté le défenseur Duncan Keith. Non seulement Chicago est une ville formidable, mais en plus, les partisans y sont formidables aussi. Ils apprécient une équipe qui travaille fort.» Léger détail, tout de même: là, les Hawks sont champions. C'est cool, un club champion. C'est facile de se ranger derrière un club champion. Mais si jamais ça se met à aller un peu moins bien cette saison, les fans vont-ils quitter le navire? Je pose la question! En attendant, en tout cas, c'est fabuleux de voir cette ville appuyer ses Hawks de cette façon. En passant, juste de même, plusieurs Hawks m'ont dit que c'est ici qu'on retrouve les meilleurs fans de la LNH.

Vous pouvez vous indigner dans trois, deux, un.

La manchette de la semaine

«Pat Burns nie les rumeurs concernant son décès» Bandeau qui défilait au bas de l'écran d'une chaîne de nouvelles au Québec, vendredi.

La citation de la semaine

«Il y a des postes qui sont disponibles» Pierre Gauthier, en marge de l'ouverture du camp d'entraînement du CH, jeudi à Laval-sur-le-lac.

Des postes disponibles? Où ça, dans les cuisines du Centre Bell? Parce que sur la glace, franchement, je ne vois pas.

La statistique de la semaine qui n'ntéresse personne, sauf moi, et encore

En 2009-10, José Théodore a conclu la saison régulière avec une fiche de 30 victoires et sept défaites. C'est clair que ça n'intéresse que moi, puisque Théodore est toujours sans contrat pour la prochaine saison. Son agent Don Meehan a récemment déclaré que l'ancien du CH pourrait mettre le cap sur l'Europe.

Comme dirait Benoît Brunet: oyoyoye.

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Ça n'a rien à voir avec le hockey, mais permettez que j'insiste quand même.

J'ai eu l'occasion de voir un peu le match Steelers-Titans dans un pub de Chicago, et franchement, la défense des Steelers me rappelle celle de 2008. Et vous savez ce qu'ils ont fait il y a deux ans, les Steelers? En plein ça. Mon sympathique collègue Miguel Bujold, qui me succède sur la couverture NFL (et qui a de TRÈS GROS souliers à chausser), ne se peut déjà plus, j'en suis certain.

Les Cowboys, l'équipe de l'Amérique (et du Mile-End) se retrouve donc avec une fiche de 0-2, comme Brett et ses Vikings. Pendant ce temps, les Bucs et les Chiefs ont une fiche de 2-0. C'est pour ça qu'il ne faut jamais, jamais, jamais mettre l'argent de l'épicerie sur ces affaires-là.