Veux-tu bien me dire qui est ce gars qui porte un col roulé sous son équipement?C'est la question que Scott Gomez s'est posée lorsqu'il a croisé Tomas Plekanec sur la patinoire pour la première fois. C'était en 2005-2006. Plekanec faisait alors le saut dans la LNH avec le Canadien.

Cette question, Gomez l'a aussi plusieurs fois entendue. Que ce soit sur le banc des Devils ou sur celui des Rangers de New York.

Mais voilà: aujourd'hui, après une saison de 25 buts et 70 points, sa meilleure en carrière dans la LNH, le petit joueur de centre au col roulé a un nom.

Sans soulever les mêmes passions que les Alexander Ovechkin ou Sidney Crosby, le nom de Tomas Plekanec est aujourd'hui reconnu et respecté par ses pairs des 30 équipes de la LNH.

Car c'est à force de travail et en raison des grandes qualités qu'il cache sous des dehors bien anonymes que Plekanec a su tailler cette réputation au sein de ses pairs.

«Il est un vrai poison. Quand on le croise pour la première fois, on se dit: bof! Il n'y a rien là. Mais aussitôt qu'on se retrouve contre lui, il ne nous lâche pas. Il patine, il travaille, il tombe carrément sur les nerfs. Et si on a le malheur de lui donner un pouce, il va en profiter pour nous faire mal paraître», assurait Scott Gomez, croisé par La Presse à l'extérieur du vestiaire du Canadien.

«Ce n'est pas pour rien qu'on voit souvent des gars lui passer le gant au visage après les sifflets. Ils sont frustrés. Frustrés parce que Plekie ne recule jamais, parce qu'il n'arrête jamais. C'est toujours Go! Go! Go! avec lui. C'est parfait aujourd'hui parce que je joue avec lui. Mais quand on doit composer avec une peste comme ça contre nous, ça finit par nous atteindre», a ajouté Gomez.

Réplique assassine

Tomas Plekanec s'est offert en cible, lundi, lorsqu'il a indiqué que les gardiens des Capitals, aussi bons soient-ils, ne sont pas de la trempe des Martin Brodeur et Ryan Miller. José Théodore a répliqué en demandant si ce commentaire venait de Tomas «Jagr» ou Plekanec...

Plekanec a eu le dernier mot lors du premier match alors que son but, marqué en prolongation aux dépens de Théodore, a propulsé le Canadien en avant 1-0 dans la série qui l'oppose aux Capitals de Washington.

À cause de ces échanges de commentaires, à cause du but vainqueur, à cause aussi du fait qu'il est devenu la pierre angulaire de l'attaque du Canadien, Plekanec se retrouve au centre de l'attention médiatique.

Comme il y a deux ans lorsqu'il avait indiqué, bien candidement, qu'il jouait comme une fillette lorsque les journalistes lui ont demandé d'expliquer ses difficultés dans la série qui opposait le Canadien aux Bruins de Boston.

«Je préfère rester dans l'ombre que d'être au centre de l'attention. Mais je comprends aussi que nous sommes en séries et que des fois, la moindre petite déclaration peut avoir une grande portée. Je considère toujours ne rien avoir dit de grave, mais je me rends compte que j'ai manqué de prudence.»

Plusieurs qualités, bien peu de défauts

S'il n'a pas hésité à se qualifier de fillette quand les choses allaient mal il y a deux ans, Tomas Plekanec déteste répondre aux questions liées à la grande qualité de son jeu. À son talent.

Ses coéquipiers sont toutefois beaucoup plus loquaces. «Je vous ai déjà dit qu'il était un travailleur infatigable, mais c'est aussi un gars vraiment intelligent avec la rondelle. Vous relèverez rarement une mauvaise décision de sa part. Pas seulement en attaque, mais aussi en défense», a lancé Scott Gomez.

«Comme plusieurs de nos attaquants, il n'est pas très gros. Mais il est très difficile à contenir. Il m'a souvent filé entre les pattes lorsque je jouais contre lui. Il échappe souvent à ceux qui croient que ce sera facile de le neutraliser dans un coin de patinoire ou devant le filet. Comme Brian (Gionta), comme Michael (Cammalleri), Tomas est presque arrogant dans sa façon de tenir tête aux gros défenseurs de la LNH», a témoigné le géant Hal Gill.

Le meilleur des deux mondes

Si Scott Gomez est d'abord et avant tout un passeur, Tomas Plekanec est plus difficile à confiner dans un rôle de passeur ou de marqueur.

«Il a le meilleur des deux mondes. C'est un passeur magnifique. Mais il est aussi doté d'un tir dangereux. Quand on voit Tomas arriver à deux contre un, on ne sait pas comment se préparer. Si on triche vers la passe, il va en profiter. Si on s'installe pour un tir, il va compléter une passe sans qu'on ait le temps de se déplacer», racontait Carey Price.

Price a aussi dévoilé un petit secret sur Plekanec. «Il vient souvent me voir pour me parler des autres gardiens, mais aussi pour comprendre quelles sont les situations qui compliquent le plus notre travail devant le but. Il a tiré à contre-courant sur le but de la victoire en se servant d'un défenseur (Joe Corvo) comme écran. Ce n'est pas pour rien.»

Tomas Plekanec s'est contenté d'esquisser un sourire timide lorsqu'on lui a défilé la liste des qualités déclinées par ses coéquipiers.

Il s'est toutefois rebiffé lorsqu'on lui a souligné que sa récolte de 70 points représentait un véritable exploit en raison des longs passages à vide de son ailier droit Andrei Kostitsyn, et de la blessure qui l'a privé de Michael Cammalleri durant 17 matchs sur le flanc gauche. «Je crois qu'il aurait pu atteindre les 90 points si moi et Andrei avions été en mesure de mieux l'épauler en étant plus constants», a insisté Cammalleri.

«C'est injuste de leur imputer cette responsabilité. J'ai profité de l'attaque à cinq pour récolter des points. J'ai récolté beaucoup de deuxièmes passes cette année alors que je ne pouvais en acheter une seule l'an dernier. Je voulais rebondir après une saison décevante (20 buts, 39 points), et je crois y être arrivé. Mais nous sommes en séries et ce sont les succès de l'équipe qui comptent maintenant.»

On veut bien. Mais ses succès personnels l'assurent d'un contrat très lucratif qui lui sera offert par le Canadien ou une autre équipe de la LNH, alors que Plekanec pourra profiter de son autonomie complète en juillet. «On parlera de ça en temps et lieu. Si l'équipe va loin en séries, ce sera mieux encore», a tenté de faire croire Plekanec lorsqu'on lui a demandé si un but gagnant en prolongation comme celui de jeudi faisait miroiter des millionsde dollars.

«Je ne peux pas te dire qu'il t'a menti», a lancé Michael Cammalleri lorsqu'on lui a demandé si Plekanec faisait preuve de fausse modestie avec sa situation contractuelle.

«Mais je peux t'assurer qu'il n'a jamais soulevé cette question avec nous. Il ne nous a jamais apostrophés en disant qu'on devait se réveiller parce qu'il était à sa dernière année de contrat. Il est bien trop concentré sur ce qu'il doit faire au niveau hockey pour se laisser étourdir par les facteurs extérieurs.»