Ça se passait mercredi soir à Tampa Bay. Dans le vestiaire du Lightning, il y avait de la bonne humeur dans l'air; le club venait de sortir les puissants Capitals de Washington en quatre parties rapides, et à peu près tout le monde s'amusait dans la place. Tout le monde... sauf Steve Yzerman.

Oui, la musique d'Iron Maiden était dans le tapis et les sourires étaient nombreux, mais Yzerman, lui, était en grande discussion avec le gardien Dwayne Roloson. Sérieux, le directeur général du club n'avait pas l'air d'un dirigeant satisfait. Au contraire, il avait même l'air un peu fâché.

Il s'agit, dit-on, de sa principale qualité. Car Steve Yzerman, à ce qu'il paraît, n'est jamais satisfait.

«Je dirais qu'il a amené une nouvelle culture au sein de cette organisation, affirme Vincent Lecavalier. Depuis qu'il est ici, il a imposé aux joueurs une façon de se comporter, autant sur la glace qu'à l'extérieur. Il fonctionne d'une certaine manière, et c'est la bonne manière.»

Ça semble être la bonne manière, en effet. Le Lightning a probablement écrit l'histoire la plus étonnante dans le grand livre du hockey cette saison, et c'est beaucoup grâce à l'ancien joueur devenu DG. Ce club, qui avait conclu les trois dernières saisons au 15e rang dans l'Est, au 14e, puis au 12e rang l'an passé, se retrouve en finale d'association. Qui aurait pu prévoir ce scénario un peu fou en septembre?

En deux temps

Selon plusieurs vétérans du Lightning interrogés par La Presse, cette transformation s'est amorcée en deux temps: tout d'abord avec l'arrivée d'un nouveau proprio en mars 2010, Jeff Vinik. Un type qui a mis de l'ordre dans la cabane, et qui a mis aux poubelles l'ambiance de cirque installée par l'administration précédente.

Ensuite, Yzerman est arrivé. Et l'ancienne vedette des Red Wings de Detroit n'a pas mis de temps à se faire remarquer. «Il a apporté une crédibilité instantanée à l'équipe, note Dave Andreychuk, ancien joueur du Lightning devenu analyste à la télévision. Il était le meilleur candidat pour faire ce travail.»

Bien installé dans la chaise du DG, Yzerman s'est rapidement mis au boulot.

«Je dois dire que l'été dernier fut un été très occupé, a-t-il reconnu après la victoire sur Washington. En partant, j'ai embauché Guy Boucher et Julien Brisebois, et ce fut, je le crois, deux décisions très importantes.»

En Boucher, Yzerman a mis la main sur un jeune entraîneur convoité. En Brisebois, il s'est offert un assistant qui avait acquis une solide réputation chez le Canadien.

Changer la culture

Ensuite, il fallait changer cette culture de perdants.

«Mais pour changer une culture, ça prend du temps, d'ajouter Yzerman. Je savais qu'il y avait ici plusieurs bons éléments avec lesquels je pouvais travailler. Je savais que les joueurs de l'équipe avaient la bonne attitude, qu'ils étaient prêts à penser à l'équipe en premier. À mon avis, c'est pourquoi on se retrouve dans cette position aujourd'hui.»

Yzerman est un peu modeste, car il oublie de préciser un détail: les nombreux changements apportés à la formation expliquent, en grande partie, l'étonnante progression du Lightning cette saison.  Et ces nombreux changements, ces bonnes décisions, c'est lui avant tout.

Dominic Moore et Sean Bergenheim, des joueurs d'impact ce printemps, ont tous deux été acquis à petit prix sur le marché des joueurs autonomes. Le vétéran défenseur Pavel Kubina a lui aussi été embauché à titre de joueur autonome cet été. Un autre défenseur, Eric Brewer, a été acquis des Blues de St.Louis avant la date limite des échanges. Il est le joueur le plus utilisé par Guy Boucher depuis le début des séries.

Un gardien d'expérience

Enfin, Yzerman a fait le pari d'aller chercher Dwayne Roloson, un gardien de 41 ans que les Islanders ont expédié avec plaisir à Tampa en retour du défenseur Ty Wishart, un ancien premier choix qui tarde à devenir le défenseur que l'on croyait.

Sur le coup, l'acquisition de Roloson a certes fait jaser; on disait le Lightning intéressé à Evgeni Nabokov, et de toute façon, Dan Ellis ne devait-il pas être le numéro un de cette équipe? Ellis a finalement été échangé, Nabokov n'est jamais arrivé, et aujourd'hui, Roloson se donne des airs de Patrick Roy. C'est bien pour dire.

Les sceptiques parleront de chance, mais de toute évidence, Yzerman savait très bien ce qu'il faisait en allant chercher tout ce beau monde. Il n'a pas eu à sacrifier son noyau, il n'a pas eu à hypothéquer le futur du club, et aujourd'hui, le Lightning est à quatre victoires de la grande finale.

Changer une culture, ça ressemble sans doute un peu à tout ça.



Patrice Bergeron hors de combat

Les Bruins n'avaient certes pas besoin de ça au moment d'amorcer leur série face au Lightning. Mais tout indique que Patrice Bergeron devra rater le début de la finale de l'Association de l'Est, en raison d'une autre commotion cérébrale.

C'est bien ça. Une autre.

Mauvaise nouvelle, donc, parce que le Québécois est le meilleur compteur des Bruins depuis l'ouverture des séries, mais mauvaise nouvelle aussi parce qu'il n'en est pas à son premier coup à la tête. C'est justement le problème avec les commotions cérébrales; la prochaine est toujours pire que la précédente.

En attendant que Bergeron retrouve la forme, les Bruins devront lui trouver un remplaçant. Pourquoi pas l'étonnant Chris Kelly, qui joue de façon plutôt solide depuis l'ouverture des séries?

La blessure à Bergeron pourrait aussi permettre au jeune Tyler Séguin de disputer un premier match en séries. Séguin, le premier choix des Bruins au dernier repêchage, était l'un des favoris au trophée Calder en début de saison, mais sa faible récolte de 22 points en 74 matchs ne lui a pas permis de faire partie de cette conversation.

Séguin n'a pas joué une seule fois depuis le 10 avril. Au moins, il est frais et dispos...



Photo: AP

Patrice Bergeron

Rumeurs et entraîneurs

Todd Richards congédié, on s'attendait à ce que Michel Therrien soit le candidat numéro un comme entraîneur chez le Wild du Minnesota. Mais, surprise, la direction du Wild a récemment rencontré Craig MacTavish, l'ancien entraîneur des Oilers, et le dernier humain, comme on le sait, à avoir osé jouer «avec pas de casque».

Tout indique donc que ça se corse au Minnesota; pourtant, on chuchotait en coulisses que Therrien était seul dans cette course... Ce n'est plus vrai, il faut croire.

Ce qui ne règle en rien le cas du prochain entraîneur à Dallas, au New Jersey, à Ottawa et en Floride. Kirk Muller, un bon ami du DG des Stars Joe Nieuwendyk, serait un sérieux candidat à Dallas, tout comme Ken Hitchcock au New Jersey.

Bruce Boudreau, lui, a reçu le traditionnel vote de confiance de la part de son DG à Washington, suite à la sortie hâtive de son club. Mais les Caps, le meilleur club dans l'Est au cours des deux dernières saisons, ont vécu des éliminations (trop) rapides cette fois et il y a un an aussi. Souvent, c'est le coach qui paie pour ça.

Pendant ce temps, Jacques Martin, qui avait supposément «perdu» son vestiaire, est bien en selle. On en profite pour rappeler qu'il faut toujours vérifier la source avant de croire les rumeurs les plus folles...



Photo: Reuters

La direction du Wild a récemment rencontré Craig MacTavish, l'ancien entraîneur des Oilers.

Une autre année pour le hockey en Arizona?

En tout cas, ça semble parti pour ça. Mardi, le conseil municipal de la Ville de Glendale doit voter sur la possibilité de renouveler pour une autre année l'entente qui est présentement en place avec la LNH. On raconte que la Ville de Glendale serait déjà prête à essuyer une autre perte de 25 millions de dollars pour la saison 2010-11.

Cette stratégie, évidemment, n'est pas une solution à long terme. La stratégie vise avant tout à acheter du temps, ce qui permettrait de trouver (essayer de trouver, à tout le moins) de nouveaux investisseurs pour garder le club en Arizona. On raconte maintenant que Matthew Hulsizer, l'homme d'affaires de Chicago qui devait sauver le club, en aurait soupé de cette périlleuse situation.

Ce n'est pas tout.

Selon TSN, et ceci ne manque pas d'ironie, la Ville de Glendale aurait déjà identifié un autre sauveur à la place de Matthew Hulsizer: ni plus ni moins que Monsieur BlackBerry lui-même, Jim Balsillie.

Celle-là, vraiment, je ne l'ai pas vu venir.

Balsillie, on le sait, a déjà tenté de se lancer à la poursuite d'un club de hockey, mais le commissaire Gary Bettman n'est pas un fan de l'homme et de son style un brin cow-boy. C'est connu, la LNH préfère des proprios discrets qui ne brassent pas trop la cage. Et Balsillie n'est pas du genre à faire dans la dentelle. Rappelons-nous de sa photo parue dans La Presse, avec le logo du CH sur son BlackBerry, au sujet de la vente du club montréalais... Notre ami Gary ne l'avait pas trouvée drôle. Pas plus que George Gillett.

Le problème pour les gens de Glendale, c'est que Jim Balsillie n'a jamais caché ses intentions: prendre un club américain et le déménager à Hamilton au plus sacrant.

Et maintenant, c'est cet homme qui sauverait le hockey en Arizona?

Ça ne s'invente pas, mesdames et messieurs.

Le chiffre de la semaine

6

Le nombre de fois qu'un gardien partant des Flyers de Philadelphie a été sorti d'un match au cours des séries.

La statistique qui mérite qu'on s'y attarde

Cette saison, les gardiens des Flyers n'ont pu réussir un seul blanchissage.

La citation de la semaine

«Quand ils ont obtenu Dwayne Roloson, ils sont devenus un club complètement différent»

Bruce Boudreau, l'entraîneur des Capitals de Washington, quelques minutes après l'élimination de son club face au Lightning.

L'autre citation de la semaine

«Je m'attends à ce qu'il soit de retour la saison prochaine»

George McPhee, le DG des Capitals, cité par le Washington Post à propos de Bruce Boudreau.

Photo: Reuters

Jim Balsillie