Des décennies avant les jeux ultraréalistes d'EA Sports, il y avait sur Nintendo un jeu de hockey fort rigolo, du nom de Ice Hockey.

Avant d'amorcer un match, il fallait sélectionner ses joueurs, classés en trois catégories: un grand mince rapide, un joueur de taille moyenne bon dans tout et un colosse, format Sergio Momesso, moins rapide, mais plus solide sur ses patins que les autres. La formule «un mince, deux moyens, un costaud» était évidemment souvent priorisée.

Ce qui nous mène au Canadien de 2018-2019, une équipe qui ressemble à un format «trois minces et un moyen». Au camp et dans les deux premiers matchs de la saison, ç'a donné du hockey rapide, excitant, basé sur une rapidité d'exécution en relance. Mais cette équipe a forcément les défauts de ses qualités. On en a eu un exemple éloquent dans la défaite de 3-0 contre les Kings de Los Angeles, hier soir.

«On savait qu'ils allaient jouer un gros match physique et on savait qu'on allait devoir gagner le centre de la patinoire. Mais on a joué en périphérie, a tranché Andrew Shaw. On a eu des chances, mais personne n'était là pour prendre les retours ou pour empêcher le gardien de voir.»

Quand les entraîneurs décortiqueront la vidéo du match, ce matin, ils pourront isoler une séquence en particulier qui illustre à merveille la soirée. Le Tricolore s'installe en zone des Kings et Jonathan Drouin prend le contrôle du jeu. Il en vient à faire le tour de la zone offensive, du côté de son revers. La foule se lève, les Kings sont sous pression. La séquence se termine par une passe à Noah Juulsen, posté le long de la rampe, à la hauteur du cercle des mises en jeu. Son tir ne donne aucun mal à Jack Campbell, qui contrôle le retour et provoque l'arrêt de jeu.

Une autre séquence? Cette montée de Brendan Gallagher en troisième période. Le teigneux ailier droit se retrouve devant Dion Phaneuf, à qui Gallagher concède... 41 lb! L'espace se referme, Gallagher est déporté sur la rampe et tire d'un angle mince. Un autre arrêt facile pour Campbell.

«On a donné au gardien adverse une soirée facile, a estimé Gallagher. Il a fait les arrêts qu'il avait à faire, je ne veux rien lui enlever. Mais il y a toujours une manière de marquer et nous ne l'avons pas fait. Nous n'avons pas été assez durs, nous ne sommes pas entrés entre les défenseurs.»

Si Julien souhaite plutôt faire voir des séquences plus positives, il pourra montrer le tir de Tomas Tatar sur le poteau. Joel Armia passait alors devant Campbell. Sans oublier le but d'Andrew Shaw, justement refusé parce que le numéro 65 était dans la bulle du gardien. Ou cette autre occasion de Shaw en fin de deuxième période, obtenue à un bras de distance de la peinture bleue.

Un défi prévisible

Le poids lourd du CH hier était Armia. À 210 lb, le Finlandais serait toutefois... au neuvième rang chez les Kings! Au Nintendo, c'était une équipe «trois costauds et un moyen».

Les autres poids lourds de l'équipe - Shea Weber, Nicolas Deslauriers et Jacob De La Rose - sont sur la liste des blessés. Cela dit, aucun de ces trois joueurs n'a la capacité de régler les problèmes qui affligeaient les Montréalais hier.

«Si on avait été à point, ç'aurait été mieux, a dit Julien. Les Kings ont mieux joué leur style que nous ce soir. Quand j'ai regardé leur dernier match, les défenseurs laissaient beaucoup d'espace. Ce soir, ils n'ont pas donné autant d'espace.»

Saluer le travail de l'autre équipe, c'est bien noble, et c'est tout à fait mérité dans ce cas-ci. D'autant plus qu'après avoir permis quelques envolées à Tomas Tatar et à Mike Reilly en début de match, les Californiens ont empêché les rapides patineurs montréalais de prendre leur envol.

Mais il n'y a pas de secret: les équipes costaudes, pour peu qu'elles soient aussi responsables que les Kings hier, poseront ce type de défi au Canadien toute la saison.

L'état-major a fait son lit au fil du camp. Le Canadien sera une équipe rapide et acharnée. Le coût: des effectifs moins costauds, plus vifs. Comme la majorité des équipes pesantes sont, depuis plusieurs années, dans l'Ouest, voilà un choix qui se défend.

Les défis de cette équipe sont donc prévisibles. Il revient maintenant aux joueurs de faire comme Shaw et de s'aventurer davantage dans l'enclave, et aux entraîneurs de trouver des solutions plus systémiques. Un beau défi pour le nouveau groupe d'adjoints.

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En hausse: Andrew Shaw

Dans un match où le Canadien a eu de la difficulté à s'installer dans l'enclave, Shaw est un des rares à y être parvenu. Ça lui a valu une chance en deuxième période et un but refusé en fin de match.

En baisse: Phillip Danault

Une rare soirée difficile pour l'homme de confiance de Claude Julien au centre. Une seule mise au jeu gagnée en 13 tentatives. Anze Kopitar a eu l'avantage toute la soirée.

Le chiffre du match: 5

Il faudra commencer à parler d'Adrian Kempe comme d'une bête noire du Canadien. Le voici avec cinq buts et sept points en trois matchs contre le CH.