Ça fait drôle à dire pour un DG qui a échangé P.K. Subban et un choix top 10 qui avait encore 18 ans, mais Marc Bergevin vivra probablement, vendredi, une des journées les plus importantes de son règne de directeur général. Parce que des décisions cruciales, le DG devra en prendre plus d'une.

Avant même de parler du repêchage, ça commence par son groupe actuel de joueurs. Que faire de Max Pacioretty, qui écoulera en 2018-2019 la dernière année de son contrat? Le sol de Dallas gronde, tant il y a de rumeurs qui circulent au sujet du numéro 67.

Certains le voient quitter la métropole dès vendredi. Les Sabres - parce qu'ils ont un excellent centre à échanger en Ryan O'Reilly et que le Canadien en cherche un - et les Kings sont les équipes qui reviennent constamment dans les bruits de corridor. Le plus récent, en provenance du collègue Martin McGuire, du 98,5: le Tricolore aurait permis aux Kings de discuter d'une prolongation de contrat avec Pacioretty. L'agent de Pacioretty, Pat Brisson, a toutefois nié cette information au site The Fourth Period. Bergevin, lui, s'est refusé à tout commentaire, même lors d'un entretien informel après sa mêlée de presse.

Quoi qu'il en soit, un tel dénouement (transaction suivie d'une prolongation de contrat) permettrait à Bergevin de soutirer davantage pour son marqueur de 30 buts.

Dans tous les cas, échanger un capitaine, à Montréal, n'a rien de banal. On s'y était presque habitués, il y a 20 ans, quand Kirk Muller, Mike Keane, Pierre Turgeon et Vincent Damphousse avaient à peine eu le temps de coudre le «C» sur leur chandail qu'ils faisaient leurs valises. Mais justement, le dernier capitaine du CH à avoir été échangé pendant son règne a eu le temps de prendre sa retraite, codiriger l'Association des joueurs, postuler pour le poste de DG du Canadien et ouvrir des spas. Quand on dit que ça fait longtemps que ce n'est pas arrivé...

Les autres

Les yeux sont tournés vers Pacioretty, mais s'il y a une chose à laquelle Bergevin nous a habitués, c'est de nous attendre à l'inattendu. Ça peut vouloir dire une transaction qui implique un autre joueur que son capitaine.

Ça peut aussi vouloir dire obtenir un atout à la condition d'accepter un mauvais contrat, soit ce que les Hurricanes ont fait il y a deux ans en gobant le contrat de Bryan Bickell afin de soutirer aux Blackhawks le prometteur Teuvo Teravainen. «Si on a de l'espace et qu'il y a une possibilité, oui, on se pencherait là-dessus», a admis Bergevin, lors de sa rencontre avec les médias, jeudi soir.

Bergevin dispose de la marge de manoeuvre salariale pour le faire, et les développements des dernières heures vont en ce sens aussi. D'une part, la LNH a annoncé une hausse du plafond salarial à 79,5 millions de dollars, si bien que Montréal aura environ 14 millions d'espace une fois que Phillip Danault, Jacob De La Rose et Daniel Carr auront signé de nouvelles ententes.

D'autre part, l'idée - déjà peu réaliste - d'économiser dans le but de faire une offre mirobolante à John Tavares semble s'essouffler. Avec l'arrivée de Lou Lamoriello comme DG et de Barry Trotz comme entraîneur, les Islanders sont plus sérieux que jamais dans leur campagne pour convaincre Tavares de renoncer à l'autonomie et rester à New York.

Cinq choix cruciaux

Et puis, il y a bien ce fameux repêchage, raison pour laquelle la planète hockey est installée dans la chaleur étouffante de Dallas cette semaine.

Le Canadien y détient le troisième choix. « En ce moment, je penche vers la patience plus que vers une solution à court terme. [...] Je serais très, très surpris qu'on échange ce choix-là», a dit Bergevin.

Alors, une fois que c'est dit, il y a une autre décision cruciale à prendre : qui choisir, selon quelles priorités? En point de presse jeudi, Trevor Timmins a ouvert toutes les portes. Un centre? Un défenseur offensif ? Un ailier marqueur naturel? Si on se fie au responsable du recrutement amateur, ces trois types de joueurs sont susceptibles d'être repêchés vendredi soir.

Il a tantôt louangé Filip Zadina, l'ailier tchèque en qui plusieurs voient le troisième joueur disponible cette année. Il a aussi rappelé que l'équipe ne jouissait pas d'une grande banque de défenseurs offensifs. Et il n'a pas manqué de parler de Jesperi Kotkaniemi, que certains considèrent comme le meilleur centre de la cuvée. «Un vrai centre», a-t-il dit à son sujet.

«Nous cherchons de bons joueurs de hockey, peu importe leur origine, a expliqué Timmins. De bons joueurs qui aideront le Canadien à devenir une équipe compétitive en séries chaque année et qui nous aideront un jour à gagner la Coupe Stanley.»

La dernière fois que le Canadien a repêché au troisième rang, l'équipe avait opté pour Alex Galchenyuk, qui apparaissait alors comme le choix consensuel. Le nouveau porte-couleurs des Coyotes de l'Arizona a certainement constitué un bon choix parmi les joueurs repêchés en 2012, mais Filip Forsberg, Shayne Gostisbehere, Morgan Rielly, Jacob Trouba, Matt Murray, Andrei Vasilevskiy et Connor Hellebuyck ont tous plus d'impact que lui. Dans une organisation qui n'a pas la meilleure relève, un «bon» choix ne suffira pas. Ça prendra un des meilleurs.

Et puis, il y a les quatre choix de deuxième tour du CH (35, 38, 56 et 62). Même si les tours 2 à 7 se déroulent samedi, ces choix pourraient entrer en jeu dès vendredi soir, comme monnaie d'échange. «À cause des quatre choix, on va recevoir beaucoup d'appels», a admis Bergevin, sans s'avancer sur le rang qu'il peut viser au premier tour s'il offrait à un collègue les choix 35 et 38.

«Si certaines équipes sont prêtes à reculer, on a des munitions pour grimper, si un joueur qu'on a dans nos 15 premiers glisse après le 20e rang», a pour sa part dit Timmins.

Aucun des 31 DG ne s'ennuiera vendredi soir sur le plancher de l'American Airlines Center. Mais c'est particulièrement vrai pour Bergevin.