Ayant lui-même souffert d'au moins quatre commotions cérébrales, l'ancien attaquant Keith Primeau a une bonne idée de ce que vit le centre étoile Sidney Crosby des Penguins de Pittsburgh.

Des blessures à la tête ont éventuellement forcé Primeau à prendre sa retraite en 2006. Pendant plus d'un an, il a tenté de revenir dans l'alignement des Flyers de Philadelphie, mais on l'a convaincu qu'il serait préférable qu'il arrête de jouer.

Il a mis fin à sa carrière un mois plus tard.

«Si j'avais su ce que je sais maintenant, l'ultime décision aurait été d'annoncer ma retraite plus tôt, a admis Primeau mercredi. Mais il n'y avait aucune chance que je pose un tel geste. Comment faites-vous pour convaincre quelqu'un? Vous jouez un peu à la roulette russe.

Crosby a subi ce qui serait la quatrième commotion cérébrale de sa carrière lundi soir contre les Capitals de Washington. La date de son retour est incertaine.

Mais le temps est peut-être venu, selon ce que des médecins ont laissé entendre mercredi, que Crosby se demande s'il devrait retourner au jeu, et non pas à quel moment.

«Dans les cas de commotions cérébrales multiples, les chances de souffrir de symptômes persistants augmentent de façon considérable, affirme le docteur Charles Tator, du Centre canadien des commotions cérébrales au Toronto Western Hospital. Nous sommes donc très soucieux d'aider les gens à ne pas subir d'autres commotions.

«S'il était un amateur, nous lui dirions probablement d'accrocher ses patins.»

Crosby a été à l'écart du jeu pendant près d'un an après avoir été victime de deux blessures à la tête au début de 2011. Il a subi une autre commotion cérébrale en octobre dernier, mais n'a raté que deux semaines d'action.

«Chaque individu guérit de façon différente, et les commotions cérébrales ne sont pas toutes identiques, a expliqué Primeau en entrevue avec La Presse canadienne, de son domicile près de Philadelphie.

«Il y a tellement d'éléments variables qui entrent en ligne de compte dans la décision (de revenir au jeu). Lorsque je vois quelqu'un comme Sidney avec quatre commotions cérébrales, tout de suite, je me dis «Qu'attends-tu?'.»

Le docteur Paul Echlin, un spécialiste des soins de première ligne en médecine sportive, est d'avis qu'une quatrième commotion cérébrale est un moment très troublant. À ce stade, selon Echlin, il faut penser aux répercussions à long terme.

«Il s'agit de la vie d'un jeune homme... C'est une histoire à caractère humain. L'important n'est pas de savoir si les Penguins de Pittsburgh vont poursuivre leur route en séries éliminatoires, ou l'identité de leurs adversaires.»

Selon le docteur Tator, le temps de guérison qui a été nécessaire lors d'épisodes passés est un critère sur lequel un joueur doit s'arrêter avant de décider d'un retour au jeu ou non.

«Nous voulons que le retour se fasse quand la personne va mieux. Mais le fait qu'il lui a fallu un an pour se rétablir (en 2011) signifie qu'il y a eu d'importantes répercussions à son cerveau. Il y a eu un effet résiduel.»

Un autre problème important, selon le docteur Tator, vient du fait que bien des joueurs subissent des chocs à la tête à un plus jeune âge sans les compter comme étant des commotions cérébrales ou des blessures à la tête. Dans les sports où surviennent des collisions à grande vitesse, le médecin prendra le nombre de commotions que dit avoir subi le joueur et le multipliera par deux.

«Ce qui importe, c'est la probabilité de guérison parce que cette probabilité diminue si le nombre de commotions augmentent. Beaucoup d'athlètes ont dû prendre leur retraite parce qu'ils ne s'en sont jamais remis.»

Ce qui rend la décision encore plus difficile dans le cas de Crosby, c'est le fait que sa plus récente blessure est survenue pendant les séries éliminatoires et contre un grand rival.

Selon Primeau, la fierté personnelle peut parfois prendre le dessus et empêcher une prise de décision lucide. Il suggère à tout joueur d'écouter son corps et de penser à sa santé à long terme. Mais ça ne rend pas la décision plus facile.

«Vous prenez une partie de votre personnalité en vous disant que la fin est peut-être arrivée, a raconté Primeau au sujet des moments qui ont précédé sa décision de prendre sa retraite. C'est une expérience très éprouvante, il n'y a pas de doute.»

Âgé de 29 ans, Crosby a terminé au premier rang dans la Ligue nationale avec 44 buts cette saison, et a été nommé finaliste pour les trophées Hart et Ted-Lindsay au cours des derniers jours.

Avant sa blessure, il avait récolté 11 points en huit rencontres.

Photo archives AP

Des blessures à la tête ont éventuellement forcé Keith Primeau à prendre sa retraite en 2006.