Pour Clément Jodoin, à l'âge de 65 ans, l'heure de la retraite... de la Ligue nationale de hockey et du Canadien de Montréal vient de sonner. Mais n'allez pas croire que cet enseignant du hockey dans l'âme va rentrer dans ses quartiers, s'asseoir dans son fauteuil préféré et ne plus en bouger. Car l'homme natif de Saint-Césaire a encore la bougeotte.

Lors de sa rencontre avec l'entraîneur-chef Claude Julien mardi, Jodoin a fait part de son désir de prendre une nouvelle avenue. Si l'on se fie au communiqué de presse du Canadien, la décision de Jodoin a surpris et déçu Julien, puisque le Tricolore lui avait proposé de demeurer au sein de l'organisation.

D'ailleurs, Julien a dit avoir accepté la décision de son adjoint avec tristesse, mais respect.

Toutefois, Jodoin savait que le temps était venu de tourner la page sur ce chapitre de sa longue carrière dans le monde du hockey.

«C'est une décision que j'ai prise vers la fin de la saison, a déclaré Jodoin en entrevue avec La Presse canadienne. C'est une décision mûrie et pleine de sérénité.

«C'est une décision personnelle, et qui ne vise personne. Le Canadien a été bon pour moi, et j'ai essayé d'être bon pour le Canadien. Ç'a été de belles années et j'aurais pu continuer. Mais je veux vivre autre chose, à un autre rythme», ajoute Jodoin, dont le deuxième séjour dans l'environnement immédiat du Canadien a coïncidé avec l'embauche de Michel Therrien, à l'été de 2012.

Formule 1, Broadway, Harvard

Jodoin gardera de précieux souvenirs de toutes ses années passées avec l'organisation du Canadien et dans la Ligue nationale de hockey, un circuit dans lequel il a effectué ses premiers pas avec les Penguins de Pittsburgh à la fin des années 80, avant d'oeuvrer avec les Nordiques de Québec au début des années 90.

Il n'hésite pas à employer des figures de style pour décrire ce qu'il a vécu.

«La Ligue nationale de hockey, c'est la Formule 1, et le Canadien, une grosse Formule 1, image-t-il. Il y a un côté "glamour", avec les hôtels, les avions... Tout est de première classe. Et quand tu arrives dans la Ligue nationale, il y a un langage qui existe: celui de gagner. Tu es sur Broadway et "the show must go on". Tu te dois de performer, et il n'y a jamais de demi-mesure.

«J'ai eu la chance de travailler avec des gens comme Alain Vigneault, Dave King, Michel (Therrien) et Claude (Julien), note-t-il aussi. Pour moi, c'est comme aller à Harvard. Tu travailles avec les meilleurs, tu es entouré de connaissance, tu peux partager. Tu es toujours à l'affût.»

Jodoin, qui a commencé derrière les bancs d'équipes de hockey il y a presque 40 ans, à une époque où on parlait presque uniquement de buts et de points, a bien vécu l'innovation que sont les statistiques avancées. Sans rejeter ce phénomène, il se garde une certaine réserve.

«Il faut s'en servir, mais ça ne doit pas devenir une béquille. Si tu t'en sers comme une béquille, tu vas être dans le trouble. Ce qui est important selon moi, c'est le flair. Ce que tu ressens. C'est un élément qui ne doit pas disparaître.»

Ce flair dont parle Jodoin est la qualité qui a le plus impressionné son bon ami Dany Dubé lorsque celui-ci l'a côtoyé pour la première fois au milieu des années 80. Ce flair, mais aussi un insatiable besoin de se ressourcer.

«Quand j'ai commencé, je ne savais pas comment bâtir un club de hockey. C'est ce que j'ai le plus appris de lui, son flair, comment mettre en place une équipe.

«Clément, c'est aussi un gars très curieux, qui aime fouiller, qui est toujours à la recherche de nouvelles recettes. Il va se rendre régulièrement en Europe, trouver de nouvelles idées ailleurs et essayer de les appliquer. Il cherche toujours à s'améliorer», ajoute Dubé, qui ne s'étonnerait nullement de voir Jodoin aboutir derrière le banc d'une équipe de hockey dans le Vieux continent.

Justement, Jodoin prendra la direction de l'Europe, plus précisément Moscou, en juin, pour participer à un camp de hockey avec des joueurs de la KHL pour une troisième année de suite. En juillet, il s'envolera vers la Slovaquie pour un autre camp de hockey. Mais en septembre, lorsque s'ouvriront les camps de la LNH, Jodoin ne sait pas encore où il sera.

«J'ai encore beaucoup d'énergie, sinon je ne retournerais pas en Russie et en Slovaquie. Pour le reste, j'ai des projets, j'ai des amis. Peut-être que ça ne marchera pas. Je ne m'attends à pas grand-chose. S'il y a quelque chose, tant mieux. Mais je ne suis nullement inquiet.»