Dimanche dernier, ils étaient quelque 3000 ou 4000 spectateurs - selon les estimations - à acclamer les Canadiennes de Montréal, nouvelles championnes de la Coupe Clarkson, en Ligue canadienne de hockey féminin (LCHF).

À la télévision, ils étaient 134 000 à syntoniser Sportsnet pour la diffusion en direct de la finale, opposant les Montréalaises à l'Inferno de Calgary.

Mais tous ont dû écouter la rencontre en anglais. Même chez les Rougeau, les Poulin et les Ouellette...

«Je viens de la Beauce, l'anglais n'est pas super là-bas! Ç'aurait été très apprécié de pouvoir regarder ça en français, et il y a un petit manque de ce côté», a déploré Marie-Philip Poulin, hier, lors d'une rencontre avec les médias à Brossard.

«Chaque fois que ma grand-mère veut regarder un match, elle doit s'abonner à Sportsnet, ajoute la défenseure Lauriane Rougeau. Pour mon entourage qui est tout francophone, j'aimerais qu'un diffuseur vienne à nos matchs, comme Sportsnet le fait, même si c'est seulement avec une caméra et un analyste, pour promouvoir le sport au Québec.»

Les histoires de famille, c'est une chose. Mais l'attaquante Caroline Ouellette a souligné l'importance plus globale d'un diffuseur francophone pour le hockey féminin canadien.

« Chaque occasion qu'on a d'être à la télévision nous permet de faire connaître la ligue à travers le pays. Ça nous permet de démontrer la qualité de notre produit à davantage de personnes qui ne l'ont peut-être jamais vu, a expliqué Ouellette.

«Il y avait peut-être aussi un petit pincement au coeur de se demander pourquoi TVA, qui est partenaire de Sportsnet, n'était pas là. Parfois, on a l'impression d'avancer. Mais pourquoi, à valeur égale, ne peut-on pas présenter les Canadiennes de Montréal en français? On est fières d'être francophones, québécoises. On aurait aimé présenter cette finale-là à nos familles, à nos amis ici au Québec.»



L'effet de la victoire

C'est la quatrième fois de leur histoire que les Canadiennes gagnent la Coupe Clarkson. L'équipe s'appelait les Stars de Montréal lors des trois premières conquêtes (2009, 2011, 2012).

«Quand tu la gagnes trois fois en peu d'années, tu ne réalises pas à quel point c'est difficile de gagner», rappelle Ouellette, les yeux pétillants en parlant de ce triomphe.

L'éminence grise du hockey féminin au Canada souhaite évidemment que ce championnat ait des répercussions positives sur son sport, qu'elle juge en retard au Québec par rapport à l'Ontario. Déjà, c'est plutôt bien parti. L'équipe sera reçue par le Canadien au Centre Bell, mardi prochain, avant le match contre les Blackhawks de Chicago. Il ne faudrait pas non plus s'étonner de voir les visages les plus connus de l'équipe débarquer sur quelques plateaux de télévision.

«Ça grandit d'année en année, souligne Ouellette. Nos foules grossissent. On a joué devant 6000 personnes au Centre Bell, je vais toujours m'en souvenir.»

«Mais c'est un cercle vicieux. On a besoin des médias pour attirer des spectateurs et on a besoin de spectateurs pour attirer les médias. C'est la même chose avec les commanditaires et c'est ce qui fera la différence entre le succès ou l'échec de notre ligue.»

L'enjeu demeure toujours le même: la ligue se veut professionnelle, mais les joueuses ne peuvent pas vivre de leur sport, car les revenus sont insuffisants. Elles doivent donc travailler de jour en semaine, trouver du temps les soirs pour s'entraîner, et consacrer leurs fins de semaine aux matchs.

«On tombe entre les craques pour le financement, car on n'est pas des athlètes amateurs, donc on ne peut pas toujours aller chercher les subventions. On est une business, mais on est aussi sans but lucratif», souligne Meg Hewings, directrice générale des Canadiennes.

Quel avenir pour Ouellette?

Ce triomphe sera-t-il le chant du cygne de Caroline Ouellette ? Après quatre médailles d'or olympiques et quatre titres professionnels, à 37 ans, la fin est évidemment plus proche que le début...

«Je ne sais pas ce que je vais faire. En ce moment, je veux savourer cette Coupe avec mes coéquipières et notre personnel. [...] Je pense que mon avenir est dans le coaching. On verra si c'est l'an prochain ou dans quelques années. »

Comme joueuse ou comme entraîneuse, Ouellette sera assurément aux premières loges pour permettre au hockey féminin d'obtenir la visibilité qui lui revient.

Photo André Pichette, La Presse

Comme joueuse ou comme entraîneuse, Caroline Ouellette sera assurément aux premières loges pour permettre au hockey féminin d'obtenir la visibilité qui lui revient.

Qui a les droits?

Caroline Ouellette a souligné avec raison le partenariat entre Sportsnet et TVA Sports lorsqu'elle a déploré l'absence de la LCHF des ondes francophones. Cela dit, les droits de télédiffusion francophones n'appartiennent pas à TVA Sports, mais bien à Sportsnet, a confirmé la LCHF à La Presse. Cela dit, ce n'est pas un automatisme que toutes les propriétés de Sportsnet appartiennent à TVA Sports. Au soccer, la Premier League, par exemple, est diffusée en français au Québec par RDS, mais à Sportsnet et TSN en anglais.