Dale Weise l'a décrit comme un «spécimen physique». Maxim Lapierre a dit de lui qu'il n'avait «pas une once de gras».

Quand vous avez pratiquement raté une saison complète, comme l'a fait Manny Malhotra en 2013 en raison d'une blessure à un oeil subie deux ans plus tôt, vous devez être dans une forme physique impeccable pour revenir au jeu à 33 ans.

Heureusement pour Malhotra, il a appris ses leçons à un jeune âge. Sa condition physique n'a jamais été un problème.

«Un soir, à mon premier camp avec les Rangers, en 1998, je soupais à l'Olive Garden avec des joueurs de 25-26 ans, raconte Malhotra, en français, au cours d'un long entretien à Brossard. Ils ont tous commandé des légumes vapeur, du poisson et faisaient attention au gras. Moi, j'ai commandé des fettucine Alfredo, une salade César et un gâteau au chocolat comme dessert. Je me disais que je n'allais jamais être comme ça. Mais deux ans plus tard, je voulais perdre un peu de poids avant le camp, j'ai donc arrêté de boire de la "liqueur" et j'ai vraiment senti la différence. Tout a commencé là.»

Au fil des années, il a tenté toutes sortes de choses, et a même brièvement suivi un régime recommandé par son beau-frère, un certain Steve Nash, qui se débrouille plutôt bien au basketball, dit-on.

«Lui, il est fou avec son régime, lance-t-il. C'est un régime cru et végane. Je l'ai essayé, mais c'était trop compliqué, avec ma femme et mes enfants. Mais j'ai aimé les résultats. J'ai retenu de ce régime d'éliminer le sucre raffiné et le pain.»

Parcours tortueux

Si Malhotra est si soucieux de sa santé, c'est qu'il sait que l'aventure de la LNH est éphémère. Et pas seulement en raison de sa blessure à un oeil de 2011. L'aventure a bien failli prendre fin il y a 11 ans.

C'est avec le septième choix universel que les Rangers ont réclamé le gaillard de Mississauga au repêchage de 1998. À Manhattan, les attentes étaient grandiloquentes.

«Il pourrait être un choix de rêve, écrivait alors le New York Daily News. (...) Un joueur des grandes occasions.»

En 1999, les Rangers ont tenté d'obtenir Pavel Bure, de Vancouver, contre des joueurs et un choix, mais les discussions ont achoppé quand le DG des Canucks, Brian Burke, a demandé... Malhotra.

Malhotra n'a jamais compris ces attentes.

«Dans le junior, j'étais le centre défensif de mon équipe. J'ai compté 16 buts à mes deux premières saisons. Je ne sais pas pourquoi des gens ont pensé que j'en compterais 30 dans la Ligue nationale! Je n'ai jamais pensé que je serais Jarome Iginla. C'était drôle d'entendre les gens dire que je ne répondais pas aux attentes offensivement.»

Barouetté des Rangers à la Ligue américaine, en passant par Équipe Canada junior et même par un retour avec le Storm de Guelph, Malhotra n'a jamais fait sa niche à New York. Échangé aux Stars de Dallas en mars 2002, il n'y a pas plus trouvé sa place.

Gallant, le tournant

En novembre 2003, les Stars le soumettent au ballottage. Humiliante expérience, finalement salvatrice. Les Blue Jackets de Columbus le réclament.

«Pour la première fois, on me donnait une vraie chance et un rôle. On m'a dit: "Tu seras notre centre de troisième trio. Soit bon défensivement, en désavantage numérique, gagne tes mises en jeu." C'était une bouffée d'air frais. Je jouais alors pour Gerard Gallant, qui a été formidable pour moi. J'ai aussi beaucoup appris de Ken Hitchcock.»

«C'était aussi un gros signal d'alarme. Tu réalises que tu es très près de ne plus jouer dans la LNH, de ne plus être payé à faire ce que tu aimes. Si tu ne fais pas ton travail, quelqu'un d'autre va le faire.»

C'est là qu'il est devenu spécialiste des missions défensives, qui finit, bon an mal an, dans le top 5 de la Ligue nationale pour les mises en jeu. C'est ce joueur qui a obtenu des contrats de trois ans des Blue Jackets, puis des Canucks. Et c'est ce joueur que le Canadien a embauché le 1er juillet.

Montréal, la priorité

Le marché des joueurs autonomes était ouvert depuis environ 300 secondes quand on a su que le Tricolore avait mis la main sur Malhotra. La fenêtre de négociations qui précède l'ouverture du marché lui a permis d'identifier le CH comme l'équipe de choix parmi celles qui le courtisaient.

«Un contrat d'un an, avec la chance de me prouver et de prolonger mon entente ici, était une meilleure option que de prendre deux ans ailleurs et être moins heureux, dans une moins bonne équipe.»

À 34 ans, à sa troisième organisation en 18 mois, Malhotra souhaite trouver la stabilité au Québec, idéalement jusqu'à la retraite.

«Je ne veux pas penser à la fin de ma carrière! Mais sept équipes, je crois que c'est assez. Ici, les équipements pour les joueurs, la nourriture, tout est la crème de la crème. J'aimerais rester aussi longtemps que possible.»

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Fier de ses origines

Manny Malhotra est un des très rares joueurs d'origine indienne dans la LNH, une réalité qui l'a frappé quand il a joué pour les Canucks.

«Il y a une grande population indienne à Vancouver, donc c'était un gros sujet là-bas, raconte-t-il. Mais à Mississauga, où j'ai grandi, et de la façon dont on a été élevés, on ne regardait pas la couleur de la peau. Donc je ne me suis jamais vu comme le joueur de hockey indien. Mais quand on m'a dit que plusieurs Indiens regardaient le hockey grâce à moi, ça m'a rendu fier.»

Né au Pakistan, élevé en Inde, son père a migré en Amérique du Nord à 27 ans, pour marier Lise Carrier, une Québécoise grâce à qui Manny Malhotra parle un très bon français. Manny n'a toujours pas eu la chance de visiter le pays de ses ancêtres.

«J'aimerais y aller avec mon père un jour. Il m'a dit que le seul moment où je pourrais y aller, c'est en hiver, sinon il fait trop chaud. Disons que le travail m'en empêche pour l'instant!»