Alors qu'un neurologue appelle à la disparition des mises en échec dans le hockey scolaire, Québec refuse de prendre position. Le gouvernement libéral dit vouloir attendre le dépôt d'un rapport très attendu sur les commotions cérébrales avant de s'avancer.

Samedi, dans une entrevue parue dans La Presse, le chef du service de neurologie du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM) soutenait que les mises en échec n'avaient pas leur place à l'école. «Le mandat de l'école est de former des cerveaux, pas des joueurs de la LNH», faisait valoir le Dr Patrick Cossette, ajoutant que les commotions cérébrales entraînaient des jours d'absence en classe pour plusieurs élèves.

La Presse rapportait le cas d'Alexandre Nasra, un jeune de 15 ans qui a dû s'absenter de l'école pendant quatre mois après avoir subi une commotion cérébrale alors qu'il était en deuxième secondaire.

Le neurologue - qui a lui-même évolué jusque dans la catégorie midget espoir - pense que le retrait des mises en échec permettrait d'éviter «les trois quarts des commotions cérébrales» sans dénaturer le hockey.

Mais Québec ne veut pas prendre position sur la pertinence des mises en échec à l'école pour l'instant. Le ministre Yves Bolduc, par le truchement d'une porte-parole, dit vouloir attendre le rapport du Groupe de travail sur les commotions cérébrales avant de prendre position. Ce rapport est attendu avant Noël.

«Nous sommes très interpellés par le dossier des commotions cérébrales. On attend avec impatience le rapport et les recommandations du Groupe de travail sur les commotions cérébrales, indique Yasmine Abdelfadel, porte-parole du ministre. On espère par le biais de ses travaux être en mesure de développer des outils qui permettront [...] de repérer plus facilement ceux et celles qui subissent une commotion cérébrale.»

Mais au-delà de la gestion des commotions, Québec entend-il mettre de l'avant la prévention en limitant par exemple les mises en échec dans le hockey mineur? «Nous attendons le rapport», a réitéré Mme Abdelfadel.

Ce groupe de travail a été créé par le gouvernement du Parti québécois en janvier dernier et jouit d'une grande autonomie. Parmi ses cinq membres se trouvent le neuropsychologue Dave Ellemberg et l'ancien joueur des Alouettes Matthieu Proulx, qui a déjà déclaré en entrevue avoir subi cinq commotions cérébrales dans sa carrière.

Dans le noir



À l'heure actuelle, Québec patauge dans la noirceur la plus complète dans ce dossier que l'Association des neurologues du Québec considère comme «un problème de santé publique».

Le gouvernement provincial n'a aucune idée du nombre de commotions induites dans ses programmes de sport-études. Il ne dispose d'aucun registre. Pis encore, Québec ne semble même pas savoir combien de jeunes sont soumis aux mises en échec dans le hockey scolaire.

Le Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ) ne sait pas lui-même combien de ses quelque 7400 patineurs de 13 à 16 ans sont soumis aux plaquages. La question a été relayée au ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport (MELS). Celui-ci a été incapable de répondre hier. «Je ne pense pas que nous soyons en mesure de quantifier les joueurs qui jouent avec mises en échec», a expliqué une porte-parole du Ministère dans un courriel.

Hockey Québec, la fédération chargée de chapeauter le sport dans la province, est elle aussi dans le noir. Elle dépend du RSEQ pour avoir le portrait du hockey scolaire.

«Le RSEQ n'a pas le portrait de son propre réseau. On essaye d'avoir les données car on veut faire un portrait de la situation au Québec, expliquait récemment Yvan Dallaire, responsable du hockey scolaire à Hockey Québec. On doit pouvoir mettre les pièces du casse-tête ensemble.»

Résultat? Ni le ministère de l'Éducation, ni Hockey Québec ne savent à l'heure actuelle combien de jeunes donnent et reçoivent des mises en échec dans le hockey scolaire.