Les Maple Leafs de Toronto ont fait sursauter quelques observateurs, mardi matin, en annonçant l'embauche de Kyle Dubas au poste d'assistant au directeur général de l'équipe, Dave Nonis.

C'est qu'on a confié à un jeune de 28 ans le rôle de bras droit du DG et qu'on a remercié deux vieux routiers du hockey en Claude Loiselle et Dave Poulin, respectivement DG adjoint et vice-président des opérations hockey. Tout ça dans un des marchés les plus explosifs de la LNH...

«Je crois qu'il y a des gens dans notre organisation qui ont peur de certains mots et de certaines informations, mais une fois que Kyle leur parle, on dirait qu'il rend (ces mots et ces informations) plus faciles à appliquer», a déclaré le président des Leafs, Brendan Shanahan, aux médias torontois.

Ces mots et informations, ce sont les indices Corsi, Fenwick et tout le jargon des statistiques avancées, qui servent à calculer l'efficacité des joueurs selon le nombre de tirs tentés quand ils sont sur la patinoire ou la localisation des mises au jeu.

Même dans les rangs juniors, où la collecte d'informations peut être laborieuse, Dubas a appliqué ces principes, en tant que directeur général des Greyhounds de Sault-Sainte-Marie, dans la Ligue de l'Ontario. Un poste qu'il a obtenu à... 25 ans!

«Nos joueurs blessés et retranchés récoltaient des données pour nous, raconte Sheldon Keefe, entraîneur-chef des Greyhounds. La plupart des équipes ont des joueurs qui le font, mais nos joueurs prenaient d'autres statistiques. Pas seulement les mises en échec ou les tirs bloqués, mais aussi les entrées de zone, la situation des mises au jeu.»

Mais de là à parler d'un Billy Beane (directeur général des A's d'Oakland qui a inspiré le livre et le film Moneyball) du hockey, il y a un pas que Keefe n'ose pas franchir.

«Je ne crois pas que le hockey ait atteint le point où c'est aussi absolu, croit Keefe. Kyle n'est pas seulement un gourou des chiffres, il comprend bien les facteurs intangibles qui composent une équipe. Les statistiques sont un outil qu'il utilise bien, mais je ne parlerais pas du Moneyball du hockey.»

Pour Dubas, c'est l'aboutissement d'un parcours où il a toujours fait tomber les barrières d'âge. D'abord employé par les Greyhounds à l'âge de 14 ans (!) comme assistant aux opérations hockey, il est devenu le plus jeune agent de joueurs de l'histoire de la LNH, embauché à 20 ans par Uptown Sports Management.

«Il avait de bonnes références, il était très bon à l'école et il connaissait le hockey ontarien, raconte Don Reynolds, président de la firme, qui l'a engagé à l'époque. L'âge ne me dérangeait pas vraiment. Dès qu'il a ouvert la bouche, j'ai compris que ce n'était pas un jeune homme.»

Reste maintenant à voir comment se fera l'intégration de Dubas dans une organisation encore peuplée de quelques membres de la vieille garde, à commencer par l'entraîneur-chef Randy Carlyle.

«J'ai hâte à la première discussion hockey entre Kyle Dubas et Randy Carlyle», écrivait sur Twitter, un brin ironiquement, l'influent chroniqueur torontois Bruce Arthur. À entendre les propos de Shanahan, Carlyle a intérêt à ne pas faire partie de ces gens qui ont peur «des mots et des informations»...