Dans l'ombre de Steve Yzerman, à Tampa Bay, se trouve un Québécois auquel les succès du Lightning appartiennent en partie.

L'ancien bras droit de Bob Gainey à Montréal, Julien BriseBois, a eu, il y a quelques années, la délicate tâche de bâtir un club-école potable pour le Lightning à titre de DG des Admirals de Norfolk, aujourd'hui devenu le Crunch de Syracuse.

Au cours des neuf années précédant son arrivée, en 2010, l'équipe de ligue mineure du Lightning avait été exclue des séries éliminatoires de la Ligue américaine six fois en sept saisons et produisait très peu de joueurs pour la formation de la LNH.

Un peu moins de trois ans, une Coupe Calder et une finale de Ligue américaine plus tard, 11 anciens joueurs des Admirals de Norfolk, et leur ancien entraîneur-chef Jon Cooper, sont désormais en voie de mener l'équipe à une participation aux séries éliminatoires contre le Canadien!

Julien BriseBois, que plusieurs dans le milieu considèrent comme l'un des plus brillants jeunes hommes de hockey de la LNH, s'inspire-t-il des principes de Moneyball?

Toujours est-il qu'il n'hésite pas à sortir des sentiers battus: trois des six premiers compteurs du Lightning sont des joueurs qui ont été boudés dans les premières rondes du repêchage, tandis que des choix de première ronde comme Brett Connolly, Jonathan Drouin et Vladislav Namestinov doivent encore faire leurs classes dans les mineures.

Ondrej Palat, 23 ans, 51 points cette saison, est un modeste choix de septième ronde en 2011. Tyler Johnson, 22 buts, n'a jamais été repêché. Alex Killorn, 16 buts, a dû attendre la troisième ronde en 2007.

Trois autres réguliers, Radko Guas, J.T. Brown et Mark Barberio, n'ont pas été repêchés dans les deux premières rondes eux non plus.

Ils ont tous contribué à la conquête du Championnat à Norfolk sous la direction de l'entraîneur Jon Cooper, il y a deux ans.

Cooper est une trouvaille de Julien BriseBois. Dans ce cas-ci également, le Québécois n'a pas suivi les convenances.

«Nous étions en juillet (2010), il se faisait tard pour trouver un remplaçant à notre entraîneur dans la Ligue américaine, a confié BriseBois hier à La Presse. La plupart de nos candidats avaient déjà trouvé un emploi ou encore les équipes ne nous donnaient pas la permission de discuter avec les candidats que nous avions ciblés.»

BriseBois cherchait un entraîneur selon ses critères précis à lui. «Quand nous avions embauché Guy Boucher à Hamilton à l'époque, nous avions un plan et il avait bien fonctionné. Je cherchais un candidat en fonction de trois critères prioritaires: premièrement, être un excellent communicateur; deuxièmement, avoir une approche pédagogique; et troisièmement, être capable de bâtir avec ses joueurs une relation plus forte qu'une simple relation entre joueur et entraîneur.»

Le camp d'entraînement allait s'ouvrir dans deux mois, et l'adjoint au DG Steve Yzerman n'avait toujours pas trouvé sa perle rare. Puis, la chance lui a souri.

«J'avais cherché partout, dans la NCAA, la Ligue de hockey junior majeur du Québec, de l'Ontario, de l'Ouest, la Ligue de la Côte Est, j'avais encore les mains vides. Puis, au hasard d'une conversation avec un agent de joueurs, je lui ai mentionné quels critères je recherchais. Sans hésiter, il m'a dit qu'il avait l'homme tout indiqué pour moi.»

Mais voilà, Jon Cooper dirigeait un club de la modeste USHL à Green Bay et il n'avait pas nécessairement l'expérience qui correspondait à un poste comme celui-là.

«J'en ai parlé à Steve (Yzerman). Il avait connu beaucoup de succès à Green Bay et j'aimais son approche. Nous l'avons rencontré, il était très charismatique, très intelligent. C'était le candidat parfait malgré son inexpérience.»

L'ascension a été fulgurante. Dès sa deuxième saison à Norfolk, Cooper a remporté la Coupe Calder en juin 2012. Dix mois plus tard, le 25 mars 2013, il succédait à Guy Boucher.

Onze joueurs de cette équipe championne sont dans la LNH actuellement.

«Une de ses plus grandes forces, c'est sa relation avec ses joueurs, dit Julien BriseBois. Nous avons une nouvelle équipe cette saison à Tampa et la plupart des joueurs ont grandi avec "Coop". La relation était déjà bâtie, ç'a facilité son travail. Si on a pu intégrer autant de joueurs des mineures en si peu de temps, c'est aussi grâce au formidable travail de nos recruteurs, dont Tom Kurvers, qui a ratissé la NCAA, et ceux qui ont pu mettre Tyler Johnson sous contrat à sa sortie des rangs juniors, alors qu'il n'avait jamais été repêché.»

Le Lightning, c'est Steven Stamkos, Ben Bishop et Victor Hedman, mais apprenez aussi à connaître les autres, vous les verrez probablement souvent en première ronde ce printemps...