Le Canadien a trouvé une façon de composer avec l'absence de plusieurs défenseurs et l'utilisation d'une recrue à la ligne bleue soir après soir.

En réunissant P.K. Subban et Andrei Markov au sein d'un même duo pendant le voyage dans l'Ouest, Michel Therrien a peut-être mis ses oeufs dans le même panier, mais il est allé chercher les résultats escomptés.

Subban joue en digne gagnant du trophée Norris, tandis que Markov, profitant de la mobilité de son partenaire, étonne par son rendement à forces égales. En 93,5 minutes de jeu à cinq contre cinq, Markov n'a pas encore été sur la glace pour un seul but de l'adversaire.

«Une belle chimie est en train de s'installer entre eux», a fait valoir Therrien avant le match contre les Jets de Winnipeg.

Sans surtaxer ses deux généraux, Therrien a pu éviter de trop solliciter son troisième duo défensif. Le vétéran Francis Bouillon est utilisé à peine 16:04 par match - c'est deux minutes de moins que l'an dernier - et son partenaire, qu'il soit Jarred Tinordi (13:43) ou Nathan Beaulieu (11:07), l'est encore moins.

Il y a belle lurette qu'un troisième duo avait aussi peu joué. Cette répartition du temps d'utilisation peut-elle durer?

Emelin: fin novembre

L'absence d'Alexei Emelin cette saison a changé la donne à la ligne bleue. Non seulement à cause de son profil de joueur, mais aussi parce qu'il pouvait jouer 20 minutes par match, être un homme de confiance en infériorité numérique et proposer une solution durable du côté droit.

Therrien assure qu'il ne gère pas ses effectifs en attendant son retour.

«C'est sûr qu'on a tous hâte de le revoir, mais on ne le reverra pas avant un bon bout - on parle de la fin novembre, a confié l'entraîneur. Alors on fait alterner nos jeunes pour qu'ils aillent chercher le plus d'expérience possible.»

Cela dit, l'utilisation parcimonieuse du troisième duo ajoute un certain fardeau sur les épaules de Markov. Fardeau dont il s'est bien acquitté jusqu'ici, mais qui pourrait finir par le rattraper si les choses restent telles quelles.

«Ça dépend de l'allure des matchs, de la quantité de travail sur les unités spéciales et du type de minutes qui leur sont demandées, explique Therrien. Subban et Markov passent plus de temps sur l'avantage numérique, où c'est moins demandant. Mais on essaie de gérer ça le plus possible.»

Dans le cas de Subban, plusieurs souhaiteraient qu'il joue encore davantage. Mais malgré ses airs de lapin Energizer, le CH ne veut pas étirer l'élastique.

«Les défenseurs qu'on peut employer 30 minutes dans un match sans qu'ils s'épuisent sont rares, nous a confié le directeur général Marc Bergevin pendant le séjour dans l'Ouest. Il y avait Chris Pronger et Nicklas Lidstrom, mais ils contrôlaient le tempo sur la glace.

«On peut demander à un défenseur de jouer 27 ou 28 minutes de temps à autre, mais à la longue, ça va finir par le rattraper. Il va se mettre à tricher et ne sera plus aussi efficace. Il va chercher à compenser.»

Bergevin: «On va donner une chance aux kids»

Le portrait actuel de la défense, embelli durant le voyage par les performances de Carey Price, laisse croire que la situation n'est pas au beau fixe.

À Vancouver, Marc Bergevin n'a pas réfuté les rumeurs selon lesquelles il avait tenté sans succès d'obtenir de l'aide à la ligne bleue.

«Pour le moment, on va donner une chance aux kids», a-t-il plutôt répondu en faisant allusion à Tinordi et Beaulieu.

Qu'il s'agisse d'un équilibre entre les vétérans et les jeunes, les gauchers et les droitiers, ou les joueurs plus offensifs et plus défensifs, Bergevin a expliqué qu'il visait toujours à améliorer son groupe de défenseurs.

«C'est important d'avoir un bon mélange, a-t-il dit. On ne peut pas avoir seulement des défenseurs qui déplacent la rondelle ou seulement des gros.

«Mais une chose est certaine, il faut que la rondelle sorte de la zone. Un jeune comme Beaulieu, même s'il est encore en évaluation, montre qu'il est bon là-dedans. Tinner (Tinordi), c'est autre chose. Moins il a la rondelle sur son bâton, meilleur il est.»

Des options limitées

L'absence de plusieurs défenseurs réduit les options du CH par rapport à ses deux recrues.

Le grand Tinordi, qui est appelé à devenir un élément important de la brigade défensive, laisse parfois croire que les choses vont un peu vite pour lui. Or, dans la situation actuelle, le renvoyer à Hamilton pour jouer 22 ou 23 minutes par match est difficilement envisageable.

«Idéalement, on veut qu'un joueur domine un niveau à sa manière avant de le faire passer au niveau suivant, a mentionné Bergevin. Pour toutes sortes de raisons, ce n'est pas toujours comme ça que ça se passe.»

Le DG se dit prêt à faire confiance aux jeunes et à vivre avec leurs erreurs. Mais encore faut-il qu'eux-mêmes le soient.

«Quand on voit un jeune commettre une erreur et, lors des présences suivantes, se mettre à tenir son bâton serré et juste tenter de survivre, c'est un signe qu'il n'est pas prêt. Un joueur qui joue pour ne pas faire d'erreurs va finir par en faire.»

On n'a qu'à penser à la façon dont le camp d'entraînement de Greg Pateryn s'est terminé...

Emelin absent, Bouillon à droite

À défaut d'avoir sous la main un autre joueur habitué d'évoluer à droite, le Tricolore juge que Francis Bouillon est sa meilleure option.

Bon soldat, le Québécois qui fête ses 38 ans aujourd'hui, accepte la responsabilité. Mais il reconnaît ne pas avoir la même aisance que du côté gauche.

«Travailler de façon contraire fait en sorte que mon corps est moins ouvert et ma vision du jeu n'est plus la même», expliquait Bouillon au camp d'entraînement.

«Je suis aussi moins agressif à droite. J'ai l'habitude de refermer l'espace face à l'attaquant adverse en l'amenant à un-contre-un contre la bande. Mais vu que je suis moins à l'aise à droite, je vais avoir tendance à être moins agressif et plus patient.»

On le voit: le dossier de la ligne bleue est à multiples facettes et il sera à suivre.

Ce qui est clair, en tout cas, c'est que le retour d'Emelin ne saurait arriver trop vite.