Des caméras et des micros, il devait bien y en avoir une cinquantaine autour de la table de Jonathan Toews. Même genre d'accueil médiatique pour Patrick Kane. À la table de Corey Crawford, par contre, c'était plus tranquille, moins encombré, moins tassé. Comme si Corey Crawford n'était qu'un joueur de second plan, qu'un simple réserviste parmi tant d'autres.

Ça se passait hier midi au United Center de Chicago et ça résumait assez bien le mystère Crawford sur la planète LNH: un gardien connu, mais pas trop, qui rame encore dans l'ombre des deux autres vedettes à Chicago.

Un gardien qui était réserviste il n'y a pas si longtemps, mais qui est en passe de se faire un nom. Qui essaie de se faire un nom.

Ce printemps, Crawford s'y prend assez bien. Fiche de 12-5 en séries, taux d'arrêts de ,935 - juste un peu moins bon que celui du rival chez les Bruins Tuukka Rask.

Mais ça prend du temps, se faire un nom. Hier, en entendant des questions en français pour Crawford, plusieurs collègues des médias américains et canadiens ont été surpris d'apprendre que le jeune homme parle très bien cette langue.

Oui, le gardien des Blackhawks parle français. Il a grandi dans la région de Montréal avec le CH tatoué sur le coeur, comme bien d'autres. «C'est spécial d'être ici et de se rendre aussi loin, en grande finale... C'était un rêve pour moi depuis que je regardais les matchs du Canadien quand j'étais plus jeune», a-t-il admis.

La grande finale de la Coupe Stanley entre les Blackhawks et les Bruins de Boston commence ce soir à Chicago, et la formidable ascension de Corey Crawford se poursuit.

Hier, c'est Jonathan Toews qui a rappelé toute l'importance de Crawford pour la formation de Chicago, ce printemps. «Je pense qu'il est le meilleur joueur de notre équipe depuis le début des séries, sans aucun doute, a déclaré l'attaquant-vedette. Si on a du succès, surtout en désavantage numérique, c'est grâce à lui.»

Ce qui est un peu drôle, parce que la direction des Hawks, pour une foule de raisons, a mis du temps avant de croire en Corey Crawford. Le gardien de 28 ans a dû sécher pendant cinq ans dans la Ligue américaine avant d'obtenir sa chance, en 2010. Et encore, les Hawks avaient choisi d'embaucher le vétéran Marty Turco cette année-là.

«Je pensais que j'étais prêt une couple d'années avant ça, a-t-il admis. Ce sont des décisions qui étaient prises par la direction de l'équipe, et je devais vivre avec ça. Mais j'ai choisi de ne jamais lâcher...»

«Attendre mon tour»

C'est la première véritable présence de Crawford en grande finale. En 2010, quand les Hawks ont tout gagné, il n'était même pas en uniforme. C'est Antti Niemi qui était le numéro un, et Cristobal Huet, le second.

Choix de deuxième ronde en 2003, Crawford ne semblait plus faire partie des plans de l'équipe à ce moment-là. «J'étais content pour les gars qui ont gagné la Coupe, mais quand on ne joue pas, ce n'est pas la même chose, a-t-il reconnu. J'ai dû attendre mon tour en retrait et je dois dire que ça m'a poussé à me surpasser, ça m'a motivé. Je ne pense pas que la direction du club me devait quelque chose. Dans une situation comme la mienne, on peut seulement s'assurer de tout donner pour forcer la main des patrons par la suite.»

Et voilà qu'aujourd'hui, on parle de Corey Crawford comme d'un candidat potentiel au trophée Conn-Smythe, remis au joueur le plus utile des séries. Mais il s'agit là d'un trophée qui n'est pas au centre de ses préoccupations. En fait, on a plutôt l'impression que le jeune homme aimerait mieux l'autre trophée, le plus gros, qui porte le nom d'un certain M. Stanley.

Ce trophée qu'il n'a pu gagner il y a trois ans.

«Le plus important, c'est la victoire. Je place toute ma concentration sur le prochain match. Et si je gagne le Conn-Smythe, ce sera comme un boni...» a lancé Crawford avant de prendre congé.