Debout derrière le banc de son équipe, une jeune partisane des Bruins tenait entre ses mains, samedi, une pancarte sur laquelle était écrit: la poutine est la seule bonne chose qu'on retrouve à Montréal.

Vrai que la poutine y est bonne. Elle est même succulente dans quelques endroits bien choisis. Coiffée de quelques morceaux de foie gras, elle devient gastronomique.

Mais après deux matchs d'une série que son équipe devait avaler en cinq ou six bouchées, la jeune partisane devrait ajouter le Canadien, Carey Price et Jacques Martin à sa liste de trouvailles de qualité à dénicher à Montréal.

Après deux matchs, le Canadien est bien meilleur que les Bruins dans la majorité, sinon la totalité, des aspects du jeu. À commencer par l'intelligence et l'engagement déployés sur la patinoire.

Carey Price fait rougir de honte tous les directeurs généraux qui ont - y en a-t-il vraiment? - préféré Tim Thomas dans la course au trophée Vézina tant il domine son vis-à-vis par son calme, sa technique, sa prestance.

Quant à Jacques Martin, il trouve encore le moyen de soutirer d'une équipe ordinaire, protégée par un gardien extraordinaire, le potentiel maximum. Une équipe qui, à l'image de son entraîneur, n'a rien de flamboyante, mais qui est ô combien calme, tenace, efficace. Tout ça en dépit des absences d'Andrei Markov et de Josh Gorges.

Inversement, les Bruins qui sont mieux nantis à l'attaque comme à la ligne bleue, sont incapables d'offrir leur plein potentiel. À l'image de leur entraineur-chef, ils semblent tendus, impatients, étouffés par la pression reliée à leur rôle de favoris.

«On tire de l'arrière 0-2. On devient donc les négligés. À nous de prendre les moyens pour profiter de ce changement de rôle», a lancé Milan Lucic, croisé dans le vestiaire des Bruins avant leur envolée vers Montréal hier.

On verra ce que ça donnera. Car s'il est vrai que la pression de favoris ne pèse plus sur les épaules de Lucic et de ses coéquipiers, celle d'éviter un troisième revers consécutif dès ce soir sera plus lourde encore à porter.

Surprise ou déception

Chaque printemps amène son lot de surprises dans la LNH. Et c'est tant mieux. Mais ce qui surprend le plus depuis le début du 33e duel Montréal-Boston en séries éliminatoires, ce n'est pas l'excellence des performances du Tricolore, mais bien la piètre qualité de celles des Bruins.

«Je suis déçu de voir que nous ne jouons pas à la hauteur de notre talent. Le Canadien a sa part de responsabilité pour expliquer ses deux victoires. Mais nous commettons des erreurs. Des erreurs coûteuses qui découlent de mauvaises décisions, de nonchalance. En séries, c'est impardonnable», a convenu Claude Julien.

Lorsqu'on lui a demandé s'il était surpris de voir le Canadien jouer avec autant d'efficacité, l'entraîneur-chef des Bruins a esquissé un rare sourire. «Surpris? Pas du tout! C'est ça le pire: ils ont fait exactement la même chose l'an dernier contre Washington et Pittsburgh. Nos gars étaient informés. Ils savaient qu'on ne devait pas donner l'avance au Canadien, car on se ferait emboîter tout de suite après. Une fois en avant, le Canadien ne concède pas de surnombres. Il ne donne pas grand-chose. Et quand on a une chance, le gardien est là pour faire l'arrêt», a défilé Claude Julien.

Un peu plus et il ajoutait que le temps était venu de lancer la serviette.

Le damné premier but

Le Canadien n'a eu besoin que de 2 minutes 44 secondes pour prendre les devants dans le premier match. Samedi, il a pris le contrôle dès la 47e seconde. Après 140 secondes de jeu, c'était déjà 2-0. Sur la galerie de presse du TD Garden, on ne se demandait plus si les Bruins marqueraient un but, mais bien s'ils gagneraient un match dans cette série.

Ça devrait arriver. Même que les Bruins peuvent encore remporter la série. Mais s'ils perdent ce soir, le spectre d'un balayage prendra de l'ampleur. Beaucoup d'ampleur...

Avec l'attention apportée au premier but dans toutes les conversations entendues dans le vestiaire des Bruins hier, il est à souhaiter pour Claude Julien et les partisans de son équipe que ce premier but soit accordé par Carey Price et non Tim Thomas, ou Tuukka Rask, si Boston décide de secouer l'équipe avec un changement de gardien.

Car une fois en avance au pointage, le Canadien intimide bien plus les Bruins que toutes les taloches, coups d'épaule et coups salauds assénés par les Bruins qui ont intimidé le Canadien. C'est loin du scénario que plusieurs attendaient...