Le Canadien reprend cette semaine le même rôle qu'il a joué le printemps dernier, celui du négligé qui n'a rien à perdre.

L'adversaire sera différent, certes, mais la situation est identique: à l'aube des séries, on ne donne pas cher de la peau du Tricolore.

«L'an dernier, les Capitals avaient sous-estimé nos chances de revenir dans la série et ça n'avait fait que gonfler notre confiance, s'est souvenu Jaroslav Spacek. Ça nous avait aidé, non seulement contre Washington, mais aussi face aux Penguins de Pittsburgh.

«Maintenant, les autres équipes sont au fait du genre d'équipe que nous sommes, d'autant plus que nous n'avons pas fait beaucoup de changements à notre formation. Mais ça demeure un avantage pour nous... en autant que l'on reprenne la même façon de jouer.»

Certains ont qualifié de miraculeuse la séquence de succès du Canadien le printemps dernier. Or, les miracles ne sont pas monnaie courante - c'est précisément ce qui en fait des miracles.

«Je ne crois pas aux miracles, je crois davantage que les choses arrivent pour une raison, a lancé Michael Cammalleri. Tout est plus faisable en envisageant les choses ainsi.»

La pression sur Boston

On voit souvent des joueurs envoyer l'étiquette de favoris dans l'autre camp avant le début d'une série. C'est parfois très peu crédible. Cette fois, peu de gens s'opposeront à ce que les Bruins de Boston soient donnés favoris.

«C'est sûr qu'ils le sont, a concédé David Desharnais. Nous savons que nous pouvons les battre, mais les Bruins ont terminé la saison au troisième rang et nous au sixième...»

«Les Bruins amorcent la série à domicile et sont supposés l'emporter, a renchéri Cammalleri. Ce sont eux qui devraient ressentir toute la pression.»

Il y a en effet une certaine pression sur les Bruins. Leur équipe, fourbie de l'arrivée de Tomas Kaberle, Chris Kelly et Rich Peverley en cours de saison, est bâtie pour gagner maintenant. Et l'entraîneur-chef Claude Julien n'est pas sans savoir que son poste sera menacé si les Bruins n'atteignent pas au moins la finale d'Association...

S'ils se galvanisent de cette pression et la mettent à bon escient, les Bruins seront difficiles à arrêter. Mais s'ils choisissent de l'ignorer, trop confiants de leurs atouts, ils pourraient subir le même sort que les Capitals l'an passé.

«Moi je ne veux même pas que l'on répète ce qu'on a fait l'an dernier, a insisté Cammalleri à propos de telles surprises.

«Car je veux gagner la Coupe Stanley!»

Une guerre de profondeur

Si les Bruins sont si bien cotés à l'heure actuelle, c'est entre autres parce qu'ils ont une profondeur digne des vrais aspirants à la Coupe Stanley.

Si leurs attaquants d'élite et ceux du Canadien peuvent arriver à se livrer une bonne bataille, la guerre pourrait bien se jouer sur le terrain des troisième et quatrième trio.

«Les Bruins ont beaucoup de profondeur et leurs joueurs de troisième et quatrième trios ont probablement plus d'expérience et plus de matchs joués que nous, a reconnu la recrue Lars Eller. Mais ce n'est pas nécessairement cela qui va déterminer l'issue de la série.

«Ce sera plutôt à savoir quelle équipe veut le plus. Or, je sais que notre équipe veut beaucoup! Nous avons plusieurs jeunes qui sont affamés et qui sont prêts.

«Nous allons batailler et nous sommes prêts à patiner plus qu'eux et à travailler plus fort qu'eux.»

Sept points sur 82 matchs

Gabarit, discipline, profondeur, efficacité à cinq contre cinq: autant d'atouts qui jouent en faveur des Bruins. Le Tricolore a peu de cartes dans sa manche, si ce n'est sa rapidité et son jeu de transition, qu'il ne déploie pas toujours avec régularité.

Il y a tout de même une vaste expérience des séries dans le vestiaire du CH. Aux Gionta, Gomez, Gill et Moen s'est ajouté Brent Sopel parmi les joueurs ayant déjà soulevé la Coupe Stanley.

Le vétéran défenseur compte mettre à profit l'expérience acquise l'an dernier avec les Blackhawks de Chicago.

«Ceux qui se sont rendus jusqu'au bout savent à quel point c'est spécial, a dit Sopel. Je pense que c'est surtout important de faire comprendre aux jeunes qu'ils doivent relaxer et profiter du moment.»

Le Canadien n'a pas de problème à enfiler le costume du négligé, mais n'entend pas pour autant afficher un quelconque complexe d'infériorité.

«Il n'y a tout de même eu, après 82 matchs, qu'une différence de sept points entre les deux équipes, a rappelé Jacques Martin.

«Nous avons eu une bonne fiche contre eux en saison régulière et au chapitre des buts marqués par les deux équipes, ça s'équivaut pas mal. Tout laisse croire que ce sera une très bonne série.»

Photo: Bernard Brault, La Presse