Le cliché voulant que les équipes gagnantes soient sans histoires est faux, et le Canadien en donne une autre preuve.

Malgré 10 victoires en 14 matchs, Jacques Martin doit justifier un peu plus chaque jour sa gestion de P.K. Subban, dont il n'a pas voulu confirmer la présence en uniforme, ce soir à Detroit.

«C'est un privilège de jouer à ce niveau et il y a des responsabilités qui y sont rattachées», a dit l'entraîneur, jeudi, à propos des jeunes qui, comme Subban, arrivent dans la ligue.

«C'est important de bien comprendre les attentes, les valeurs de l'équipe et tout ce qui est rattaché au mot 'professionnel'», a-t-il plus tard ajouté.

Quels que soient les motifs ayant mené au retrait de Subban - sa gestion des risques, le contrôle de ses émotions ou, comme l'affirmait la SRC, une suggestion du comité de leaders à Martin de passer un message à Subban - on aurait tort de croire que ces quelques matchs sur la galerie de presse seront nocifs pour la suite des choses.

Pour s'en convaincre, inutile de chercher loin. On n'a qu'à regarder devant le filet.

«Le succès se définit par la façon de gérer l'échec»

Durant les dernières séries, Carey Price était au bout du banc à regarder Jaroslav Halak multiplier les exploits. L'expérience, sans être humiliante, lui a apporté de l'humilité.

«Même si je ne jouais pas, j'ai travaillé fort durant les deux derniers mois et j'ai soutenu mes coéquipiers, nous avait dit Price après l'élimination des siens. C'est l'une des meilleures décisions que j'aie jamais prises.»

L'agent de Price, Gerry Johannson, suivait de près ce qui se passait avec son poulain le printemps dernier. Et le fait que Price ait perdu momentanément son poste de numéro un ne l'a pas inquiété.

«Ce qui s'est passé avec Carey l'an passé n'est pas unique, a expliqué Johannson à La Presse. Tous les jeunes joueurs passent à travers ça, même si la situation change selon les responsabilités du joueur et le marché dans lequel il évolue.»

«En tant qu'agent, on veut garder nos joueurs concentrés sur leur travail lorsqu'ils font face à l'adversité, a confié Johannson. Car le succès se définit par la façon de gérer l'échec. C'est le résultat de notre réaction dans les situations difficiles.»

«Ça peut être une blessure, un problème avec le coach, un problème de temps de glace ou bien l'absence apparente d'opportunité ou de respect. C'est dans ces moments-là que le joueur doit prendre la décision de devenir meilleur.»

Price a eu vite fait de donner raison à son agent et surtout au Canadien. Dès le début de la saison régulière, il s'est montré à la fois sérieux et affamé, humble et travaillant.

Un processus bénéfique

Ce n'est pas un hasard si Jacques Martin multiplie les liens entre la situation de ses gardiens l'an dernier et celle que Subban et Yannick Weber vivent en ce moment.

«L'année dernière a été importante pour le développement de Carey, a rappelé l'entraîneur, jeudi. Plusieurs personnes ne le comprennent pas, mais il y a un processus qui avait été mis en place et qui a vraiment aidé Price à grandir et à faire de lui un meilleur joueur.

«C'est un processus dont nos jeunes - que ce soit Weber, Subban ou Lars Eller - bénéficieront eux aussi à long terme.»

Si les vétérans de l'équipe sont bel et bien allés voir Jacques Martin pour lui faire part du peu de réceptivité qu'avait Subban envers la critique, on pourra aisément faire un parallèle avec les remontrances d'Andrei Markov à l'endroit de Price l'an dernier.

Des remontrances qui ont touché la cible et qui ont permis à Price, selon les dires d'un coéquipier, de « devenir un homme ».

À Toronto samedi

Il y a quand même une différence fondamentale entre la compétition devant le filet l'an dernier et le retrait de Subban à la faveur de Weber.

C'est que le Tricolore peut trouver une façon d'avoir ses deux jeunes défenseurs dans la formation en même temps, alors qu'il ne peut utiliser qu'un gardien à la fois.

Price avait été retiré à la faveur de Halak parce que Halak jouait mieux. Subban, selon toute vraisemblance, est retranché pour des raisons qui n'impliquent que lui.

Voilà pourquoi la situation actuelle ne durera pas.

Il y a tout lieu de croire qu'avec deux matchs en 24 heures, le pensum de trois matchs de Subban tire à sa fin. Surtout que la rencontre de samedi a lieu à Toronto, la ville natale de l'arrière de 21 ans.

Au plan de la motivation, c'est l'endroit idéal pour le relancer.