Le Canadien devrait-il tenter de dénicher plus de joueurs francophones? Inévitablement, la question revient à chaque année. Scotty Bowman, lui, croit avoir la réponse.

«J'ai été entraîneur pour le Canadien, et j'ai toujours cru que ce que les partisans voulaient en premier, c'est une équipe gagnante, a-t-il expliqué à La Presse, lors du camp d'entraînement des Blackhawks au United Center de Chicago. Bien sûr, il y aura toujours des partisans qui vont exiger plus de joueurs francophones avec le club, mais je crois qu'il s'agit d'une minorité. Pour la majorité des fans, ce qui compte, c'est que l'équipe gagne.»

Scotty Bowman sait de quoi il parle. L'homme, qui est aujourd'hui consultant chez les Blackhawks de Chicago - son fils Stan est le directeur général du club -, a dirigé le Canadien pendant huit saisons, de 1971 à 1979.

Ces saisons glorieuses ont marqué l'histoire du CH, puisqu'elles auront permis à la formation d'y récolter la Coupe Stanley en cinq occasions. Ces équipes misaient sur plusieurs joueurs francophones d'importance, dont Guy Lafleur, Jacques Lemaire et Serge Savard.

Mais selon Bowman, les partisans aimaient ces équipes avant tout parce qu'elles gagnaient.

«Il y avait des joueurs francophones, mais aussi des Dryden, Shutt, Robinson... c'était un bon mélange. C'était aussi une autre époque. De nos jours, souvent, le Canadien doit repêcher en milieu de peloton, et ce n'est pas là qu'on peut trouver un Vincent Lecavalier, par exemple. On peut toujours dénicher des perles rares comme Martin St-Louis, mais un gars comme ça, c'est une exception.

«À talent égal, oui, le Canadien devrait choisir le joueur francophone en premier. C'est nécessaire. Mais encore une fois, je pense qu'environ 90% des partisans du Canadien veulent avoir une équipe gagnante avant tout.»

Le Canadien aurait dû choisir David Perron

Scotty Bowman ne veut surtout pas blâmer la direction du Canadien, mais il a un nom en tête quand on lui demande si le CH aurait pu prendre de meilleures décisions au repêchage.

«Je me souviens d'avoir parlé à Serge Savard il y a quatre ou cinq ans. Son fils est engagé dans le hockey junior au Québec et Serge m'avait parlé d'un joueur plein de talent, David Perron. Ça, c'est un joueur que le Canadien aurait peut-être dû repêcher. Mais plusieurs équipes ont choisi de ne pas le repêcher, pas seulement le Canadien.»

Perron, qui va entreprendre sa quatrième saison dans l'uniforme des Blues de St. Louis, avait été le 26e joueur repêché en 2007. Le Canadien, qui possédait deux choix au premier tour cette année-là, avait plutôt misé sur le défenseur Ryan McDonagh au 12e rang ainsi que sur Max Pacioretty au 22e.

De tous les espoirs choisis au premier tour du repêchage de 2007, seul Patrick Kane, le premier choix au total, a disputé plus de matchs dans la LNH que Perron.

«Je suis sûr que le Canadien aimerait repêcher un patineur francophone comme Jonathan Toews, a ajouté Bowman. Mais pour faire ça, il faut détenir le troisième choix au repêchage! Je me souviens qu'à l'époque, notre directeur général Sam Pollock réussissait à échanger des vétérans pour obtenir des choix de première ronde, mais aujourd'hui, ce n'est plus possible de faire ça. La plupart des équipes préfèrent conserver leurs choix, surtout ceux de premier tour.»

Du reste, Scotty Bowman reconnaît que les joueurs francophones qui portent le chandail du Canadien ont souvent plus de pression que les autres. Mais il n'y voit pas un problème, bien au contraire.

«Tout le monde va observer un gars comme Louis Leblanc, il va ressentir beaucoup de pression. Les joueurs francophones ont de la pression à Montréal, mais c'est de la bonne pression. Ça les pousse à toujours donner leur maximum.»