Malgré une cinquième participation en séries éliminatoires en six ans, malgré une place dans le carré d'as au printemps, une majorité de fans du Canadien ont laissé entendre leur mécontentement cet été.

On a mal digéré l'échange de Jaroslav Halak, le départ de Guy Boucher et de ses adjoints et l'embauche d'entraîneurs anglophones pour les remplacer sans compter la sélection d'un autre hockeyeur américain en première ronde.

Même si on pourrait supposer le contraire, le président de l'équipe, Pierre Boivin, dit ne pas avoir été surpris par l'ampleur de la réaction des partisans à la suite de la transaction qui a envoyé Halak aux Blues de St. Louis.

«Pas vraiment parce que nous, comme le public, avons vécu des moments extraordinaires à la suite de la performance de Jaro», a commenté Pierre Boivin, hier matin, avant le début du tournoi de golf du Tricolore au club Laval-sur-le-Lac.

«Mais on avait une décision à prendre et nos hommes de hockey étaient unanimes: pour le court, le moyen et le long terme, Carey Price constitue le gardien d'avenir de l'organisation. C'est difficile parce parfois, on doit prendre des décisions qui ne seront pas populaires le lendemain, mais s'il fallait prendre des décisions sur le pouls des partisans d'une journée à l'autre, ou d'un mois à l'autre, on aurait une organisation chaotique. La responsabilité des hommes de hockey est d'avoir une perspective à plus long terme.»

Le président se défend aussi de ne pas tout mettre en oeuvre pour avoir le maximum de francophones au sein de l'organisation malgré, entre autres, le départ de Guy Boucher pour le Lightning de Tampa Bay.

«Il faut tout de même se rappeler que c'est nous qui avons embauché ces entraîneurs pour Hamilton. On a déjà oublié le travail fait il y a un an et on est blâmés de ne pas répéter. Pierre (Gauthier) a mentionné qu'il voulait des hommes d'expérience de la LNH (pour diriger les Bulldogs de Hamilton) et des spécialistes de la défense, ce sont des critères qui entrent en considération. Cela dit, le Canadien compte dans son personnel de hockey 10 francophones du Québec. Aucune équipe, même celles qui ont fait des changements récemment, n'est proche d'avoir 10 francophones parmi ses hommes de hockey. On a un propriétaire qui est parfaitement bilingue, le président, le directeur général, l'entraîneur est francophone, c'est une très forte proportion.»

Pierre Boivin remet aussi en perspective la faible représentation francophone parmi les joueurs de l'équipe.

«On ne doit pas s'arrêter au nombre de francophones au sein du club dans un début de saison, mais voir les efforts faits par l'organisation pour donner la meilleure chance aux Québécois. Ce n'est pas uniforme sur une période de 10 ans. Il y a des cycles. Et c'est important de travailler avec les vrais chiffres dans ce débat. Au camp des recrues à Brossard, 11 des 31 joueurs provenaient de la LHJMQ. Faites vos recherches, et essayez de trouver une équipe qui en compte autant. Et cette semaine, 17 des 58 joueurs présents au camp proviennent de la LHJMQ. À chaque année, une trentaine de joueurs sont invités à des séances d'évaluation à Montréal. De là sortent les Lefebvre, les Dumont, les Massé. Certains d'entre eux n'ont même pas été repêchés.»

Invité à réagir aux propos de Pauline Marois et de Pierre Curzi, qui affirment que le Canadien est un symbole du fédéralisme, Pierre Boivin a répliqué avec une boutade: «J'imagine que quand le nom de notre équipe est le Canadien, on part peut-être avec une prise contre nous...»

Le directeur général du Canadien, Pierre Gauthier, est conscient du fait francophone au Québec, mais il affirme qu'il doit d'abord se concentrer sur ses objectifs.

«C'est simple, ma mission, c'est de gagner. J'ai travaillé dans des marchés différents où les missions étaient un peu différentes, selon l'endroit. Ici, on réalise aussi qu'il faut une présence francophone sur la glace. Mais il faut comprendre que le nombre de joueurs francophones, ça change continuellement. On prend avant tout des décisions pour rester compétitifs dans la LNH. J'ai travaillé pendant des années comme dépisteur, et je sais que le terme 'à talent égal' n'existe pas. Il n'y a jamais deux joueurs pareils.»