Ça y est, c'est reparti. Le Canadien ne gagne plus, le système de Jacques Martin est trop compliqué, la chimie n'opère pas. Alors, on fait quoi? On exige de Bob Gainey qu'il fasse des échanges. Genre, maintenant.

C'est bien nous, ça. À Montréal, on pense que tout peut se régler avec un petit «trade», comme on dit dans la Zone Molson Ex. Dans les journaux, à la télé, à la radio ou sur les blogues, les «experts» hurlent à peu près tous la même chose: Bob Gainey doit bouger. Comment? Ça, c'est souvent moins clair, mais qu'importe. Il doit bouger. C'est tout ce qui compte.

C'est bien beau, mais il faudrait peut-être comprendre une chose: Bob Gainey n'est pas un magicien.

Faites l'exercice. Allez. Regardez un peu l'alignement du Canadien, et dites-moi qui, dans cette bande, serait susceptible de faire saliver un DG adverse. Vous verrez, ils ne sont pas si nombreux.

Parmi ceux que les «experts» voudraient envoyer ailleurs, c'est souvent les mêmes noms qui reviennent. Tenez, les frères K. Il faut les échanger. C'est évident. Mais qui en veut? Ça, c'est moins évident. Andrei touche 3,2 millions cette saison, et l'énigmatique Serge patauge dans la Ligue américaine après avoir menacé de se pousser en Russie. Je répète la question: qui en veut?

L'autre nom qui revient, c'est Jaroslav Halak. Sa valeur est assez bonne, il est jeune, alors on juge que Bob Gainey devrait en profiter et l'échanger en retour d'un attaquant de qualité. Très bien. Mais Carey Price a-t-il vraiment démontré qu'il peut garder le filet chaque soir dans cette ligue? Démontré qu'il peut offrir de bonnes performances de façon régulière? La réponse est un gros non.

Du lot, c'est peut-être Tomas Plekanec qui est le joueur le plus intéressant pour les DG ennemis, même s'il est sans contrat pour la prochaine saison. Mais Bob Gainey peut difficilement laisser aller son attaquant le plus constant. Échanger Plekanec serait l'équivalent de dire à tout le monde que le CH abandonne.

Alors non, Bob Gainey ne peut pas vraiment bouger. Tout ce qu'il peut faire, c'est se croiser les doigts et espérer. Espérer qu'Andrei et Serge K retrouvent leur touche magique. Espérer que Carey Price se mette à jouer comme le sauveur qu'on nous a tant vanté. Espérer que Max Pacioretty patine enfin comme le surdoué qu'il est censé être. Et espérer que Markov revienne au plus vite.

De toute façon, les joueurs ne veulent pas d'un échange.

«On a déjà un bon groupe de gars, m'a dit Brian Gionta hier. Les occasions de marquer sont là. C'est sûr qu'on va avoir des hauts et des bas. Non, je ne pense pas qu'un échange serait une bonne chose pour nous. Tous les gars qui sont ici peuvent jouer dans cette ligue; ce n'est qu'une question de temps avant que la chimie opère.»

Bob Gainey doit avoir hâte que cette fameuse chimie finisse par opérer. Cela dit, s'il est dans cette fâcheuse position, c'est sa faute. Cette équipe, c'est la sienne.

Et si ça ne se replace pas, c'est lui qui va devoir en payer le prix.

David Perron, le Canadien, et un dépisteur dans le champ

Il y a de ces histoires qui ne s'inventent pas. Tenez, un collègue m'a raconté hier une anecdote tout à fait savoureuse concernant David Perron, un jeune tout plein de talent que le Canadien avait épié brièvement avant le repêchage de 2007.

Voici.

Un dépisteur du Canadien (que je ne nommerai pas parce que je suis gentil) observe le jeune Perron lors d'un match de hockey junior il y a trois ans, à Lewiston. Dans les estrades, entre deux bouchées, le dépisteur pousse la remarque suivante à voix haute, près d'un membre de la famille Perron: «David Perron ne jouera jamais dans la Ligue nationale.»

Pas pire comme prédiction, n'est-ce pas? Perron, qui en est à sa troisième saison avec les Blues de St. Louis, a déjà sept buts et quatre passes au compteur cette saison.

Quand on entend des histoires comme celles-là, on comprend un peu mieux pourquoi le Canadien est rendu aussi bas.