Marc-André Bergeron n'avait jamais assisté à un match de la LNH avant d'endosser l'uniforme des Oilers d'Edmonton en 2002.

Jamais allé au Colisée pour voir les Nordiques. Jamais non plus au Forum ou au Centre Molson, à l'époque, pour aller voir jouer le Canadien. Originaire de Trois-Rivières, Bergeron, gamin, n'en avait que pour les Draveurs de la LHJMQ.

Grand-papa étant juge de but, le petit bonhomme s'assoyait tout juste à ses côtés, le nez dans la baie vitrée, pour suivre «son» club, qui est mort de sa belle mort en 1992 et pour lequel il n'a jamais pu jouer.

Bergeron ne réalise donc pas un rêve de jeunesse en se joignant au Canadien. Mais n'allez pas croire qu'il reste de marbre à l'idée de disputer un premier match dans l'uniforme tricolore. «Le Canadien, ça reste le Canadien», a indiqué le défenseur qui s'amène pour relancer l'attaque à cinq. L'attaque tout court. Une attaque anémique depuis qu'elle est privée de son principal atout: Andrei Markov.

Lorsqu'il défilera avec ses autres coéquipiers à l'écran géant avant le match de ce soir, le nouveau venu lancera: «Je suis Marc-André Bergeron.» Il devrait profiter de l'occasion pour ajouter: «Et je ne suis pas Andrei Markov.»

Pourquoi? Parce qu'en dépit de qualités offensives indéniables, Bergeron ne pourra pas résoudre tous les problèmes du Tricolore.

Mais voilà: fort des six points récoltés en trois matchs, à Hamilton, réclamé à grands cris par plusieurs commentateurs et amateurs impatients, Bergeron s'amène avec ce difficile mandat à relever.

Bergeron jouera beaucoup.

Il chassera sans doute Roman Hamrlik de la première vague de l'attaque à cinq et aura l'occasion de distribuer des passes ou de décocher de puissants tirs frappés.

Et si les Gomez, Cammalleri et autres piliers de l'attaque se réveillent un peu, Bergeron récoltera sa part de points.

Mais le fait qu'on attende autant du défenseur qui a été snobé par le Canadien et les 29 autres équipes de la Ligue l'été dernier - il ne faudrait quand même pas l'oublier - nous permet de nous poser une question importante: où diable se cache la belle profondeur dont le Canadien se targuait d'avoir cette année?

Aussi bon soit Andrei Markov, il n'est pas normal que l'équipe végète autant en son absence.

Avec un gain et cinq revers sans Markov cette année, le Canadien présente un dossier de six victoires, 24 défaites et deux autres en prolongation ou fusillade lorsqu'il se défend sans son meilleur joueur depuis le retour du lock-out de 2004-2005.

Il est plus anormal encore que les pertes additionnelles de Ryan O'Byrne et Glen Metropolit plongent l'équipe dans un tel marasme, et qu'on ne puisse remplacer ces joueurs qui ne sont pourtant que des joueurs de soutien.

Yannick Weber n'a pas fait le travail. Shawn Belle non plus. On n'a pas même songé - ou si on l'a fait, on y a vite renoncé - à donner une chance à Mathieu Carle ou à P.K. Subban.

Et à l'attaque, qui pousse vraiment dans le dos des cinq premiers attaquants?

Certainement pas Max Pacioretty. Pas plus que Guillaume Latendresse ou Maxim Lapierre, qui sont discrets depuis le début de l'année. Encore moins D'Agostini, Stewart ou Chipchura.

Travis Moen a bien essayé. Mais il est passé du troisième trio au premier, puis au quatrième. Il reste le gros Georges...

C'est donc loin d'être concluant. Alors qui?

«Tom Pyatt m'a impressionné à Hamilton, et Sergei Kostitsyn est le meilleur joueur là-bas. Il a énormément de talent», a assuré Marc-André Bergeron, hier.

Il serait peut-être temps de donner une chance à Pyatt, qui a connu un bon camp.

Et grand temps de prendre une décision avec Kostitsyn: on le confine à la Ligue américaine; on le ramène à Montréal où on accroche une balise à sa ceinture pour savoir en tout temps où il se trouve; on l'échange. Sinon, on pourrait le perdre.

Il est trop tôt pour paniquer. Et oui, on doit donner du temps pour que ce groupe de joueurs se transforme en équipe. Mais il est quand même inquiétant de constater la fragilité de cette formation, qui plie déjà les genoux alors que la bataille ne fait que commencer...