Kyle Wellwood qualifie son coéquipier Roberto Luongo de «véritable rocher». Une expression bien choisie. Le Québécois vient de gagner ses huit derniers matchs et pourrait devenir le premier gardien à remporter la Coupe Stanley comme capitaine depuis Charlie Gardiner... en 1934!

«Looooooooooooou!!!!» Ce cri sourd retentit à au moins une trentaine de reprises lors de chaque match disputé au General Motors Place, le domicile des Canucks de Vancouver, depuis le début des séries éliminatoires.

 

Ce sont les partisans des Canucks qui expriment leur joie quand le gardien étoile Roberto Luongo arrête un tir à bout portant de l'adversaire ou fait un simple arrêt de routine, ou encore quand il capte la rondelle de la mitaine ou étire la jambière pour faire un arrêt papillon.

Le gardien natif de Saint-Léonard est non seulement le capitaine de l'équipe depuis septembre - c'est la première fois qu'un gardien porte le «C» depuis près de 60 ans - mais il est aussi considéré comme un véritable dieu du hockey par les partisans des Canucks. Un dieu qui se tient bien debout avec ses 6'3 et ses 205 livres alors que les Canucks, la seule équipe canadienne encore en vie, tentent de rafler la Coupe Stanley pour la première fois.

Luongo connaît des séries extraordinaires jusqu'ici. Les Canucks ont éliminé les Blues de St.Louis en quatre matchs en première ronde. La fiche de Luongo? Étincelante avec une moyenne de but accordé de 1,15, un taux d'efficacité de ,962% et un blanchissage en poche. «Chaque partie, Roberto démontre pourquoi il est notre capitaine. C'est un leader. Il aime jouer. Il aime les exercices. Il veut toujours s'améliorer. En tant que coéquipiers, on veut juste le suivre et jouer de la même manière qu'il le fait. C'est sûr que c'est amusant de le voir aller. Mais c'est aussi amusant de le suivre», affirme l'ailier droit des Canucks, Steve Bernier.

Pas étonnant, donc que les partisans des Canucks portent en grand nombre le chandail numéro 1 dans les gradins durant les matchs et qu'ils vénèrent leur nouveau capitaine en criant: «Loooooooooooooooooou!!!!»

«Cela a un effet apaisant. C'est la première fois que j'entends des fans crier comme cela. Les fans adorent Roberto», poursuit Bernier.

«Je pense que la façon dont il joue jusqu'à présent dans les séries démontre pourquoi ils l'aiment autant. Tout le monde l'appuie. Mais je ne pense pas que Roberto les entende. Il est tellement concentré sur la partie. Il veut tellement bien faire que c'est quelque chose que nous seulement, les joueurs, entendons!» ajoute-t-il.

L'organisation des Canucks alimente le statut de dieu de Luongo. Sur le cadran géant, au-dessus de la patinoire, le visage du capitaine défile constamment durant le match. Et à l'extérieur de l'édifice, une immense banderole bien en vue de Luongo faisant au moins 20 pieds par 40 pieds est attachée au domicile des Canucks.

Bill Durnan, du Canadien de Montréal, a été le dernier gardien de but à porter le titre de capitaine d'une équipe de la Ligue nationale de hockey. C'était en 1947-48. Mais les règles de la LNH ont été modifiées peu après pour interdire à une équipe de désigner un gardien de but capitaine pour des raisons de logistique. Le «C» ne peut même pas apparaître sur le chandail du gardien. On ne voulait plus voir un gardien quitter son filet, comme le faisait régulièrement Durnan, pour discuter d'une décision controversée avec un arbitre à l'autre bout de la patinoire ou encore pour s'entretenir avec son entraîneur. Mais compte tenu de l'importance de Luongo, les Canucks ont fait fi de cette règle en le désignant capitaine quand même en septembre. Un autre joueur s'occupe toutefois de discuter avec l'arbitre. Et Luongo ne porte par le «C» sur son chandail, mais sur le bas de son masque.

Durant leur premier match de la série quart-de-finale contre les jeunes Blackhawks de Chicago, jeudi soir, Luongo a encore une fois sauvé la mise en réalisant des arrêts importants en début de match. Après 10 minutes, il avait affronté huit tirs. Son adversaire, Nikolai Khabibulin, n'avait fait face qu'à deux lancers. Le score était toujours 0-0. Les joueurs des Canucks étaient manifestement engourdis sur la glace après une semaine d'inactivité. Mais pas Luongo. Et la foule s'en est rapidement aperçue.

Après le match, remporté 5-3 par les Canucks, même s'ils s'étaient donné une avance de 3-0 après 40 minutes de jeu, les journalistes s'étaient attroupés autour du capitaine pour obtenir ses commentaires.

Affichant son calme légendaire, il a répondu à toutes les questions des scribes. Même à celles du journaliste de La Presse, qui a davantage l'habitude d'interroger le premier ministre Stephen Harper ou le chef libéral Michael Ignatieff sur les dossiers chauds de la politique canadienne que de bombarder de questions des joueurs dans un vestiaire.

«Il faut travailler fort pendant 60 minutes. Ils ont des joueurs talentueux et ils peuvent marquer des buts. Il est important de continuer à attaquer, peu importe notre avance comme on l'a fait durant les 40 premières minutes», a lancé le capitaine aux journalistes en guise de premier commandement que doit respecter tout joueur qui se respecte.

Est-ce le fait d'être justement capitaine d'une équipe augmente la pression sur ses épaules durant les présentes séries? «Bien sûr que non. Cela fait partie du sport. Dans le hockey, il y a toujours de la pression. Il faut juste savoir composer avec ça. Et il n'y a pas de problème!», a-t-il répondu à La Presse.

Les coéquipiers de Luongo voient les choses de la même façon. «Il est un véritable rocher devant le filet. C'était 3-3 et le reste de l'équipe ne jouait pas tellement bien et il n'a jamais exprimé ses frustrations. Cela a permis à l'équipe de se regrouper et de remporter le match», lance d'un trait le petit joueur de centre Kyle Wellwood, le visage tuméfié après le match, atteint au visage par un coup d'un joueur des Blackhawks.

Pour l'entraîneur Alain Vigneault, le calme affiché par son capitaine, même lorsque la pression est forte, permettra à ses troupes de garder l'objectif ultime en tête: remporter la victoire à chaque match.

«Roberto est capable de rassurer ses coéquipiers et de montrer l'exemple. Il fait tout ce qu'il faut pour permettre à l'équipe d'avoir du succès. (...) Roberto se met déjà beaucoup de pression sur les épaules pour être le meilleur. Mais la façon dont il exerce son mandat de capitaine, c'est de donner l'exemple. Il est toujours le mieux préparé de l'équipe.»