Vous savez comment on est, nous, les experts de la rondelle. On aime les grandes théories. On aime creuser. Chercher des explications savantes tout le temps. Le Canadien joue mal? C'est à cause du système de l'entraîneur, c'est à cause des trios chambardés, c'est à cause du poids psychologique provoqué par cette saison du centenaire.

Du moins, c'est ce que je croyais. Mais hier, dans le vestiaire du CH à Brossard, j'ai appris que le Canadien joue mieux quand son gardien arrête les rondelles.

Fallait y penser. Il y a plusieurs années, Punch Imlach, un obscur philosophe bien de son temps, expliquait combien le hockey est un sport simple. «Il faut mettre la rondelle dans le but adverse, et empêcher l'autre équipe de la mettre dans notre but», affirmait-il. Comprendre par là que le hockey, ce n'est pas de la physique nucléaire. C'est même assez simple: tu gagnes quand ton gardien arrête les rondelles.

Le Canadien a eu quelques problèmes cette saison (insérez votre propre blague juste ici), mais le plus grave problème, c'est que le Sauveur n'arrêtait rien. Là, le Sauveur recommence à avoir l'air d'un sauveur, et son club se met à jouer de mieux en mieux.

Coïncidence? Je ne pense pas.

«On a besoin d'un Carey Price en grande forme chaque soir, me disait hier Patrice Brisebois. Un gardien qui excelle, ça fait toute la différence. C'est une réalité. Les bonnes équipes sont bonnes grâce à leur gardien. Quand ton gardien joue bien, c'est toute l'équipe qui joue avec confiance.»

Le défenseur a raison. Ceux qui ont vu le CH, mardi soir contre les Blackhawks de Chicago, ont vu un club qui ne jouait pas avec la peur de faire des gaffes. Enfin, on a vu un CH qui jouait pour gagner. Grande différence...

Il y a deux semaines à peine, Alex Kovalev me confiait que le Canadien de cette saison jouait trop souvent avec nervosité. Qu'il jouait avec la peur de perdre. Kovalev me disait que tout ça menait aux erreurs... et aux défaites.

Mais avec un gardien en forme, soudainement, plus personne n'est nerveux. Avec un gardien en forme, soudainement, c'est toute l'équipe qui a meilleure mine.

«Depuis quelques matchs, on a recommencé à croire en nous, a ajouté Brisebois. C'est un sentiment qu'on avait perdu en cours de saison. Mais là, on l'a retrouvé.»

C'est la beauté du hockey de la LNH, n'est-ce pas? Un club peut jouer tout croche pendant quelques mois, puis retrouver son aplomb au bon moment et se pointer en séries éliminatoires le vent en poupe. Malgré sa saison de misère, malgré toutes les histoires négatives que l'on sait, le Canadien, avec six matchs à faire, peut encore se faufiler en séries. Et sauver sa saison.

«La situation est quand même alarmante, a voulu préciser Brisebois, qui ne tient rien pour acquis. Ce n'est pas gagné. On a connu une saison plus difficile qu'on l'imaginait au départ, et là, on n'a pas le choix, il faut s'en sortir. Bob (Gainey) a changé une couple de choses depuis qu'il est derrière le banc, et on sent enfin que tout le monde est sur la même longueur d'onde.

«Mais la grande différence? On joue avec plus de confiance...»

Alors voilà. Depuis que le Sauveur a recommencé à faire son travail, ça plane pour vos Canadiens. Mais ça doit continuer. Les bons gardiens jouent bien le temps de quelques matchs. Les grands gardiens, eux, sont capables de transporter une équipe à eux seuls, surtout lorsque ça se met à chauffer.

Voilà quatre ans qu'on nous dit que Price est un grand gardien. Voilà quatre ans qu'on nous dit que ce jeune homme adore la pression, qu'il adore rayonner lorsque ça compte vraiment, qu'il se surpasse toujours lorsque la barre est haute.

Ça tombe bien, la barre est présentement très haute. Plus que six matchs pour sauver ce centenaire du désastre. À Price de jouer comme le gardien qu'on nous a promis.