L'entraîneur Benoît Groulx essayait de mettre le doigt sur quelque chose. Il parlait d'Anthony Beauvillier, le jeune attaquant de 17 ans des Cataractes de Shawinigan qu'il supervise cette semaine lors des matchs entre les étoiles russes et québécoises.

«Moi, j'ai le feu qui brûle ici, a-t-il dit hier en se tapant la poitrine. Je sens qu'il a la même chose.»

Venant d'un entraîneur vétéran de 14 saisons dans la LHJMQ, le compliment pèse. «Anthony est 10e compteur de la ligue à 17 ans. C'est pas rien», a lancé Groulx.

Vrai qu'Anthony Beauvillier connaît toute une saison. Le centre en est à sa deuxième année dans le junior majeur et il a déjà, en 24 matchs, dépassé sa récolte de la saison dernière. Il compte 35 points avec Shawinigan, a été invité à la Super série Subway et rêve maintenant de recevoir avant Noël une invitation au camp d'Équipe Canada junior.

«Beauvillier, il a décollé. Il est parti», disait récemment avec admiration l'un des plus fins observateurs des Cataractes, l'ancien du Canadien André Pronovost, détenteur d'abonnements de saison et accessoirement grand-père d'Anthony Mantha.

Beauvillier sera admissible au repêchage de la LNH au printemps. Les prévisions, pour l'instant encore très provisoires, en font un choix de deuxième tour.

«On m'a donné beaucoup de responsabilités offensives et défensives à ma première saison. Cet été, j'ai été au camp d'Équipe Canada des moins de 18 ans. Alors, j'ai commencé la saison en pleine confiance », explique Beauvillier, un attaquant de 5'10 (faible) et 180 lb qui n'est pas 10e marqueur de la LHJMQ, mais plutôt 9e, attention.

«Le sentiment de victoire, c'est ce que j'aime le plus au hockey. De gagner, je ne sais pas comment décrire ça. C'est le fun, lance-t-il. Et me lever le matin pour aller jouer au hockey, ce n'est jamais difficile.»

Né à Sorel, il a appris à jouer sur les glaces de la région et dans la rue devant chez lui. Son petit voisin était un certain Nicolas Aubé-Kubel, espoir des Flyers de Philadelphie, avec qui il a joué au hockey bottine, mais aussi dans le hockey mineur.

Anthony a commencé le hockey pour imiter son grand frère. De quatre ans son aîné, Francis Beauvillier a joué cinq saisons dans la LHJMQ. Mais Anthony n'a jamais eu le gabarit de son frère.

«Ça m'a tout le temps suivi. "Il est bon, mais il est petit", qu'ils disaient. Depuis toujours, je cherche à faire mentir ceux qui disent ça. Comme l'a déjà dit Martin St. Louis, ça devient une motivation.»

La passion

Beauvillier est jeune et son visage enfantin n'arrange pas les choses. Mais déjà à Shawinigan, on parle de lui comme du prochain capitaine. Il est dégourdi et n'a pas peur de prendre sa place devant les vétérans.

«J'aime ça, mettre l'ambiance dans une chambre», explique Beauvillier, qui aime dérider ses coéquipiers en leur lançant des répliques des films Les Boys.

Mais ce côté bon enfant en cache un autre plus intense: ce feu dont parle Benoit Groulx.

Le premier match entre les Québécois et les Russes a eu lieu mardi à Bathurst, au Nouveau-Brunswick. L'entraîneur des étoiles de la LHJMQ a senti Beauvillier stressé.

«On lui a parlé après le match. On lui a dit de ne pas se mettre trop de pression. Il doit jouer sa game. Il ne doit pas sauter sur la glace stressé en pensant à telle chose qu'il doit faire ou telle autre. Il doit s'amuser. Il doit jouer comme il est capable de le faire. Sa game, c'est de la passion, de la vitesse, du talent et de l'énergie. Il a un bel avenir devant lui.»

Groulx a donné un conseil à Beauvillier: «Il doit apprendre à jouer ces parties-là dans le même état d'esprit que quand il va jouer dehors avec ses chums. Au bout de la ligne, il y a une puck, elle tombe et on joue.»

Comme lorsqu'il était enfant dans les rues de Sorel. Mais à voir la vitesse avec laquelle il s'est adapté au jeu de la LHJMQ, Beauvillier ne devrait pas tarder à s'habituer aux grands rendez-vous, comme le Mondial junior. Si ce n'est pas cette année, ce sera les années suivantes.

«Tout le monde rêve de représenter son pays au championnat U20. Il y a de grands joueurs qui ont participé au tournoi, comme Jonathan Huberdeau, Jonathan Drouin, Sidney Crosby, dit-il. C'est impressionnant.»

Hier à Rimouski, Beauvillier a passé la soirée à embêter les Russes, qui le lui rendaient bien. Toujours dans la circulation, souvent devant le gardien Igor Shesterkin, parfois sur les fesses, puis à genoux, à se relever pour repartir.

«C'est un gars qui joue avec beaucoup de passion, tranche Groulx. C'est pour ça qu'on l'a amené ici. Parce qu'on pense qu'il a les qualités nécessaires dans l'avenir pour faire partie des équipes de Hockey Canada. Est-ce qu'il est prêt pour y aller tout de suite? L'avenir nous le dira.»