La grand-messe du hockey junior commence aujourd'hui à London, en Ontario. Les meilleures équipes du pays et certains des plus talentueux joueurs de 16 à 20 ans vont s'affronter jusqu'au 25 mai. À l'enjeu, la Coupe Memorial. Les Foreurs de Val-d'Or participent pour la troisième fois de leur histoire au tournoi. En 1998, Steve Bégin, anciennement du Canadien, y était comme joueur. Cette année, il a été invité à titre de grand frère.

Steve Bégin est en train de «vivre un trip». Il n'est plus un joueur de la Ligue nationale de hockey, pourtant lui aussi vit la frénésie des séries éliminatoires. Pour la première fois de sa vie, celui qui a raccroché ses patins l'hiver dernier à l'âge de 35 ans les vit derrière un banc plutôt que sur la patinoire.

C'est un petit cadeau de la vie. Quand les Foreurs de Val-d'Or lui ont demandé de jouer le rôle de grand frère pour les séries, Bégin ne savait pas trop quoi penser. Il a accepté sur-le-champ, mais jamais il ne se doutait que l'équipe avec laquelle il a fait ses armes junior se rendrait aussi loin.

«On ne donnait pas cher de la peau des Foreurs en début de saison. Personne ne nous voyait en séries. On nous percevait comme des vendeurs à Noël. Et là, on a gagné le championnat. C'est une belle histoire», raconte-t-il en entrevue.

Les Foreurs se sont rendus loin. Ils ont même gagné la Coupe du président, remise à l'équipe championne de la LHJMQ, pour la troisième fois de leur histoire. La première fois, c'était en 1998, alors que Bégin était capitaine.

La petite troupe de Val-d'Or va affronter ce soir les Knights de London en lever de rideau de la Coupe Memorial, ce tournoi qui sacre la meilleure équipe junior au pays. Steve Bégin sera derrière le banc, aux côtés de l'entraîneur-chef Mario Durocher, comme il l'a été durant ces séries.

L'expérience est à la fois grisante et frustrante. Grisante, parce que Bégin part ce matin pour la Coupe Memorial, comme il le faisait il y a 16 ans de cela, à l'aube d'une belle carrière professionnelle. C'est un peu une manière de boucler la boucle.

Frustrante, parce que Bégin trouve ça franchement difficile d'être derrière un banc. Prenez le septième match de la série finale contre le Drakkar de Baie-Comeau, par exemple. Les Foreurs menaient 3-0 quand, tout à coup, le vent a tourné.

«Ç'a été très, très, très stressant. On menait 3-0. Notre gardien était en train de jouer un match superbe comme il l'a fait souvent pendant les séries. Quand le Drakkar a compté le premier but, ça a fait du bruit dans la cabane, raconte Bégin, rappelant que le match avait lieu à Baie-Comeau. Au deuxième, c'était encore pire. Au troisième, le plafond a levé. On ne s'entendait plus.

«Derrière le banc, je me sentais en prison, comme menotté. Joueur, on peut sauter sur la glace et essayer de faire la différence, dit-il. Là, je ne savais pas trop quoi leur dire: le message ne passait pas! Je ne savais pas quoi faire et là, à 55 secondes de la fin, on marque!»

Entraîneur? Pas maintenant

Bégin jure qu'il apprécie l'expérience. Ce qui manque le plus aux joueurs fraîchement retraités, c'est l'adrénaline des soirs de match, la pression des objectifs, la quête de victoires. «Être entraîneur, c'est ce qui ressemble le plus à jouer au hockey», estime Bégin.

Mais malgré le plaisir qu'il éprouve lors de ces séries avec les Foreurs, Bégin n'entend pas se lancer dans une carrière d'entraîneur. Il veut voir grandir ses deux filles et seulement après, peut-être...

«J'adore mon expérience. On a gagné la Coupe du président. On a une chance de gagner la Coupe Memorial. Mais je ne serais pas prêt à me lancer comme entraîneur. J'ai fait beaucoup de sacrifices quand j'ai joué au hockey, j'ai hypothéqué ma vie familiale. Être entraîneur, c'est encore plus prenant qu'être joueur. Je ne suis pas prêt à mettre ma famille sur hold. Pas dans un avenir rapproché.»

En attendant, Bégin espère dans les prochains jours laver l'affront de 1998 quand lui, Roberto Luongo et les Foreurs avaient perdu leurs trois matchs de la Coupe Memorial. Bégin pense que les Valdoriens ont tout ce qu'il faut pour rivaliser avec les équipes canadiennes.

Il cite bien sûr l'attaquant Anthony Mantha, qui compte 24 buts en 24 matchs éliminatoires et 57 buts en 57 matchs de saison «régulière». «On ne peut pas demander mieux», dit Bégin.

Mais il parle aussi de l'attaquant Anthony Richard, «un joueur vraiment intense» qui porte par ailleurs le numéro 9 d'un certain autre Richard. Il parle de Pierre-Maxime Poudrier, «qui marque des buts importants». Il parle de l'excellent défenseur offensif Guillaume Gélinas. Il parle aussi du gardien Antoine Bibeau, efficace durant ces séries et «quasiment miraculeux», selon les mots de l'ancien joueur du Canadien.

Bégin sera donc là, derrière le banc des Foreurs, pour le match de ce soir. Pourquoi? Pour venger l'humiliation de 1998, si possible. Mais surtout pour vivre une fois de plus les hauts et les bas du sport. Car on a beau quitter le hockey, le hockey, lui, ne vous quitte jamais tout à fait.