Jean-François Houle était sceptique quand son ancien entraîneur de la Ligue de la côte Est, Ted Sator, l'a supplié de donner un essai à l'un de ses jeunes défenseurs à l'Université Lindenwood, un obscur collège américain qui n'est même pas de calibre division 1 ou 3.

«J'ai beaucoup de respect pour Ted (ancien entraîneur-chef des Rangers de New York), raconte l'entraîneur de l'Armada de Blainville-Boisbriand, et j'ai accepté de recevoir son joueur au camp. Mais à mes yeux, c'était impossible qu'un jeune homme de 19 ans dont je n'avais jamais entendu parler se taille un poste avec notre club.»

Non seulement Daniel Walcott, né à Montréal mais ayant déménagé aux États-Unis à l'adolescence, a-t-il mérité une place avec l'Armada, mais il est devenu un rouage essentiel et joue au sein de la première vague en supériorité numérique.

Il a ainsi imité Claude Giroux et Francis Bouillon, entre autres, qui ont accédé aux rangs juniors par la porte de derrière.

«Dès ses premiers coups de patin au camp, on s'est tous regardés et on s'est dit... wow!», raconte le fils de l'ancien DG du Canadien, Réjean Houle.

Toujours est-il que l'Armada devait être un club en reconstruction cet hiver, selon de nombreux observateurs du hockey junior québécois.

Au classement, cependant, l'équipe du président Joël Bouchard a une fiche parfaite de 8-0-0-0, la meilleure au Canada!

Et c'est avec des Walcott, des Christopher Clapperton, ignoré à son année de repêchage en 2012 mais aujourd'hui le meilleur compteur de la LHJMQ, des Danick Martel, jamais repêché au niveau junior, que l'Armada domine ses rivaux.

«Quand on a échangé Julien Leduc et Élie Bérubé, deux vétérans en défense, au camp d'entraînement, tout le monde pensait qu'on avait jeté la serviette, raconte Jean-François Houle. En plus, on avait perdu notre capitaine Xavier Ouellet aux Red Wings. Mais ils n'avaient pas vu notre camp d'entraînement, ils ne savaient pas ce que nous avions sous la main, Walcott entre autres.»

Une recette bien simple

La recette de l'Armada de Blainville-Boisbriand est simple: le statut importe peu quand vient le temps de la sélection des joueurs, et la force de caractère, l'éthique de travail, la discipline et les qualités humaines passent souvent avant le talent.

«L'an dernier, la direction n'a pas hésité à suspendre Stefan Matteau et Cédric Paquette, même s'ils étaient nos meilleurs joueurs, relate le gardien de 20 ans Étienne Marcoux. Chez nous, ça ne fonctionne pas si tu n'es pas discipliné ou si tu penses seulement à toi. C'est toujours l'équipe avant tout, les gars ne se préoccupent pas de leur fiche personnelle.»

L'Armada a accordé seulement 15 buts en 8 matchs et en a marqué 34. L'équipe est rapide, disciplinée, et minimise les erreurs.

«Les joueurs intelligents ont beaucoup de valeur à nos yeux, explique Jean-François Houle. Ils seront toujours bien positionnés. Quand tu possèdes cette notion du jeu et que tu as soif d'apprendre, les chances de succès sont immenses. Christopher Clapperton a toujours été très sous-estimé. Il a été boudé l'an dernier au repêchage et je ne croyais même pas qu'on allait le repêcher cette année, même si, nous, on sait à quel point il est bon. On travaille avec lui depuis trois ans.»

Les Panthers de la Floride se réjouissent d'avoir pu le repêcher en cinquième ronde cet été. Clapperton a 20 points en 8 matchs, au premier rang des compteurs de la LHJMQ.

«Cédric Paquette est un autre exemple, mentionne Houle. On l'avait repêché en sixième ronde du repêchage junior. Il a été repêché par le Lightning de Tampa Bay l'an dernier et il a des chances d'atteindre la LNH.»

L'Armada réussit à dominer malgré l'absence de sa vedette Marc-Olivier Roy, repêché en deuxième ronde en 2013, toujours ennuyé par une blessure à la main subie au camp des Oilers d'Edmonton.

«On va être encore plus solides quand il va revenir, dit Clapperton. Mais l'Armada, ce n'est pas un seul joueur. On est soudés fort, les joueurs respectent les directives d'équipe, la communication est vraiment bonne entre les joueurs et les entraîneurs.»

L'équipe se tapait un long voyage en autobus vers Moncton hier. La route est toujours moins longue quand on connaît du succès...

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